Agent immobilier : obligation d’information sur les risques de l’opération

Agent immobilier : obligation d’information sur les risques de l’opération

Publié le : 07/05/2018 07 mai mai 05 2018

L’agent immobilier qui apporte son concours à une opération d’investissement immobilier locatif est tenu, à l’égard de ses clients, d’une obligation d’information et de conseil sur les caractéristiques de l’investissement proposé et les risques susceptibles de remettre en cause la rentabilité annoncée.

Cassation civile 3e, 8 février 2018, n° 17-11051


C’est sous cette considération que la Cour de cassation a, dans une récente affaire, fait porter à un agent immobilier la responsabilité du fiasco d’une opération d’investissement immobilier locatif (Cassation civile 3e, 8 février 2018, n° 17-11051).

Les faits étaient les suivants : 


Un couple de particuliers est démarché par une agence immobilière spécialisée dans les placements immobiliers.

Celle-ci leur propose une opération d’investissement locatif dans une résidence de tourisme.

Le montage de l’opération est assez classique : une société de promotion immobilière lance un programme de construction d’une résidence de tourisme dans une station de sports d’hiver. Les appartements de la résidence sont mis en vente en l’état futur d’achèvement par l’entremise de l’agence immobilière.

Parallèlement à la vente, les acquéreurs des appartements consentent un bail commercial à la société exploitant la résidence. Les loyers versés aux investisseurs au titre de ce bail commercial assurent la rentabilité de l’opération.

La plaquette commerciale remise aux particuliers par l’agence immobilière mettait en avant la rentabilité et la sécurité de l’opération en utilisant des phrases telle que « la société (…) [la société exploitant la résidence] vous garantira un loyer quel que soit le remplissage effectif de votre appartement » ou encore « ensemble, optimisions votre investissement immobilier en toute sécurité ».

Séduits, notre couple de particuliers accepta de signer un contrat de réservation portant sur un appartement, une place de stationnement et deux casiers de ski. Le même jour, il conclut un contrat de bail commercial avec la société d’exploitation de la résidence.

Puis, après avoir obtenu un crédit immobilier auprès de la banque Crédit Mutuel, le couple signe l’acte authentique de vente.

Mais ce beau montage s’effondra tel un château de cartes lorsque - moins de deux ans après la signature du contrat de réservation – la société d’exploitation de la résidence fût placée en liquidation judiciaire.

Adieu donc sécurité et rentabilité. Sans parler des désordres et malfaçons de la construction que nos malheureux investisseurs durent également déplorer.

La responsabilité de l'agence immobilière retenue


Ces derniers décidèrent alors d’agir en responsabilité à l’encontre de la société de promotion immobilière, de la banque Crédit Mutuel et enfin de l’agence immobilière, pour manquement à leur obligation d’information et de conseil.

La Cour d’appel de Grenoble débouta intégralement les époux de leurs demandes en dommages et intérêts, estimant, notamment pour l’agence immobilière que celle-ci ne pouvait être tenue responsable ni de la défaillance de la société d’exploitation de la résidence, ni des désordres de la construction, qui sont des aléas que les époux devaient prendre en compte (CA Grenoble 1re chambre civile, 8 novembre 2016, n° 14/00439).

Saisi sur pourvoi des époux, la Cour de cassation jugea fondé l’arrêt d’appel en ce qu’il avait jugé non responsable la banque et la société de promotion immobilière.

En revanche, concernant la responsabilité de l’agence immobilière, la Cour de cassation censure le raisonnement de la Cour d’appel.

Selon elle, la Cour d’appel ne pouvait relever comme elle l’a fait que l’agence immobilière était spécialisée dans l’immobilier de placement et ne pas rechercher si celle-ci n’avait pas méconnu ses obligations d’information et de conseil à l’égard des époux investisseurs, en ne les alertant pas sur les risques de l’opération, notamment en cas de défaillance de l’exploitant et de non perception des loyers.

Dans ses motivations, la Cour de cassation n’avait pas manqué de souligner les termes de la plaquette commerciale de l’agence immobilière.

La portée pratique de cette décision n’est pas négligeable. Elle rappelle aux acteurs du secteur que le souci d’efficacité de l’argumentaire commercial ne doit pas conduire à laisser de côté leur devoir d’information et de conseil, ce sous peine de s’exposer à de lourdes condamnations en dommages et intérêts.


Cet article n'engage que son auteur.

Crédit photo : © AlcelVision - Fotolia.com


 

Auteur

Fatiha NOURI

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