Aide juridictionnelle et transaction

Publié le : 25/08/2009 25 août août 08 2009

A condition que l’avocat ait travaillé pour obtenir la transaction, il a droit au versement des indemnités d’aide juridictionnelle comme s’il avait obtenu un jugement.

Rémunération de l'expert et transactionEn matière d’aide juridictionnelle, l’avocat intervenant et son client se posent parfois la question de savoir jusqu’où il doit aller dans un procès en cours, et est parfois convaincu de la nécessité pour lui d’obtenir un jugement pour être payé de ses efforts.

La question est encore plus épineuse lorsqu’une expertise s’est déroulée, ou que les parties sont en attente du dépôt de son rapport par l’expert.

Comment sera rémunéré l’expert ?

La transaction est-elle encore possible ?

La réponse à ces questions se trouve notamment dans le texte de la loi n°91-647, et plus particulièrement dans son article 39 qui dispose :

« Pour toute affaire terminée par une transaction conclue avec le concours de l'avocat, avant ou pendant l'instance, il est alloué à l'auxiliaire de justice une rétribution égale à celle due par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle lorsque l'instance s'éteint par l'effet d'un jugement.
Dans le cas où le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle renonce à poursuivre l'instance engagée, il est tenu compte de l'état d'avancement de la procédure.
Lorsque l'aide a été accordée en vue de parvenir à une transaction avant l'introduction de l'instance et qu'une transaction n'a pu être conclue, le versement de la rétribution due à l'avocat, dont le montant est fixé par décret en Conseil d'Etat, est subordonné à la justification, avant l'expiration du délai de six mois qui suit la décision d'admission, de l'importance et du sérieux des diligences accomplies par ce professionnel.
Lorsqu'une instance est engagée après l'échec de pourparlers transactionnels, la rétribution versée à l'avocat à raison des diligences accomplies durant ces pourparlers s'impute, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, sur celle qui lui est due pour l'instance. »

On le voit, à condition que l’avocat ait travaillé pour obtenir la transaction, il a droit au versement des indemnités d’aide juridictionnelle comme s’il avait obtenu un jugement.

On ne peut que conseiller aux confrères ayant œuvré pour l’obtention d’une transaction de se ménager la preuve de leurs efforts, par la conservation des courriers, le justificatif des entretiens et réunions ayant précédé l’établissement de cette transaction.

Encore cette hypothèse n’existe-t-elle que si la transaction a été obtenue en cours d’instance, c'est-à-dire après la délivrance d’un exploit introductif d’instance, et son enrôlement auprès d’une juridiction et que l’aide juridictionnelle a été délivrée pour mettre en œuvre une procédure.

Si l’une de ces deux conditions fait défaut, le mode de versement des indemnités AJ avant l’introduction de l’instance est moins simple pour l’avocat, qui doit alors justifier de manière beaucoup plus précise de l’étendue de ses diligences pour espérer obtenir une rétribution en fonction de l'importance et du sérieux des diligences accomplies par ce professionnel.

L’hypothèse envisagée par le texte est celle de l’obtention d’une décision d’AJ pour la recherche d’une transaction.(alinéas 3 et 4 de l’article 39).

Dans cette occurrence, la charge de la preuve des diligences accomplies se trouve entre les mains de l’avocat, de manière plus radicale que dans la première hypothèse.

En effet, dans la mesure où cette AJ a été obtenue pour une transaction, c’est en fonction des diligences accomplies que la rétribution sera versée.

Il semble à priori préférable par conséquent de mettre en œuvre une procédure à l’AJ, puis de transiger, afin d’avoir plus de certitudes quant à la rétribution.

En outre, le fait de lancer une procédure peut aider à la transaction (mais elle a aussi parfois l’effet inverse !)

Enfin, qu’en est-il de la rémunération de l’expert qui a travaillé lui aussi, et qui a déposé ou va déposer un rapport ?

Si le demandeur à l’expertise est celui qui bénéficie de l’AJ, dans l’ordonnance qui a désigné l’expert est mentionnée la prise en charge des frais d’expertise par l’ETAT, ce qui implique notamment qu’aucune consignation n’est versée.

L’article 40 de la loi énonce notamment :

L'aide juridictionnelle concerne tous les frais afférents aux instances, procédures ou actes pour lesquels elle a été accordée.
Le bénéficiaire de l'aide est dispensé du paiement, de l'avance ou de la consignation de ces frais.
Les frais occasionnés par les mesures d'instruction sont avancés par l'Etat.

Il ne s’agit que d’une avance, ce qui implique que l’ETAT devra retrouver, d’une manière ou d’une autre, les frais qu’ont engendré les opérations d’expertise.

En matière transactionnelle, le sort des frais d’expertise est évidemment pris en compte, et, le plus souvent, réparti entre les protagonistes.

C’est ce qu’il convient de prévoir à la transaction, en avisant le bureau d’aide juridictionnelle de ce processus transactionnel, pour fixer de manière contradictoire à l’égard de l’ETAT, la clé de répartition des frais d’expertise, et plus généralement des dépens.

En effet, si le demandeur à la procédure d’expertise est celui qui bénéficie de l’AJ, il a fait délivrer la ou les assignations au frais de l’Etat, de même que pour la rémunération de l’expert.

A défaut de mettre en mesure l’Etat de présenter ses observations via le bureau d’aide juridictionnelle, sur la transaction en cours, et de recueillir son accord sur la répartition des dépens, le bénéficiaire de l’AJ prend le risque de se voir demander remboursement des sommes ainsi avancées par l’Etat, auquel le défaut de jugement ne peut porter préjudice.

Là encore, la prudence est de mise, afin de garantir dans le temps la protection des intérêts financiers de ce client bénéficiaire de l’AJ, qui a fait sien le mot du poète selon lequel « un mauvais arrangement vaut mieux qu’un bon procès »…





Cet article n'engage que son auteur.

Auteur

DROUINEAU Thomas
Avocat
DROUINEAU 1927 - Poitiers
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