
Utilisation frauduleuse de la carte bancaire avec le code confidentiel : quel remboursement de la banque ?
Publié le :
27/06/2017
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06
2017
Vous vous faites voler votre carte bancaire et …le code confidentiel !
La Banque doit-elle vous rembourser votre solde bancaire devenu débiteur à cause des retraits frauduleux ?
Le client de la Banque, Monsieur Pierre X... ne sollicitait pas le remboursement de la totalité des retraits et paiements frauduleux issus du vol, mais seulement le paiement de la somme de 6. 572, 13 €, correspondant au solde débiteur de son compte courant au 13 décembre 2012 ; que pour ce faire, Monsieur Pierre X... fondait sa demande sur la faute commise par l'établissement de crédit, lequel a autorisé les paiements et retraits entraînant un solde débiteur du compte courant, lequel n'aurait pas été autorisé.
Il est à souligner au visa des articles L. 133-16 et suivants du Code monétaire et financier, que le payeur, c'est-à-dire le titulaire de la carte, supporte toutes les pertes occasionnées par des opérations de paiement non autorisées si ces pertes résultent d'un agissement frauduleux de sa part ou s'il n'a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave aux obligations mentionnées aux articles L. 133-16 et L. 133-17 :
Parmi ces obligations, figure celles de prendre toute mesure raisonnable pour préserver la sécurité de ses dispositifs de sécurité personnalisés et d'informer sans tarder son prestataire de service ou l'entité désignée par celui-ci lorsqu'il a connaissance de la perte, du vol, du détournement ou de toute utilisation non autorisée de son instrument de paiement ou des données qui lui sont liées, aux fins de blocage de l'instrument de paiement.
Une faute caractérisée du porteur de la carte, si elle est démontrée, engage sa responsabilité et le prive de la possibilité de se voir appliquer la franchise de l'article L. 133-19 du code monétaire et financier. (Article L133-1 :En cas d'opération de paiement non autorisée consécutive à la perte ou au vol de l'instrument de paiement, le payeur supporte, avant l'information prévue à l'article L. 133-17, les pertes liées à l'utilisation de cet instrument, dans la limite d'un plafond de 150 euros. )
Un arrêt de la CA de PAU du 30 septembre 2015 avait débouté le client de sa demande de paiement contre la Banque pour plusieurs motifs :
1) Qu'il résultait des dispositions du code monétaire et financier,
Et en particulier des articles L. 133-16 et suivants,
Que le titulaire de la carte supporte toutes les pertes occasionnées par des opérations de paiement non autorisées s'il n'a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave à son obligation de prendre toute mesure raisonnable pour préserver la sécurité de ses dispositifs de sécurité personnalisés et informé sans tarder son prestataire de services lorsqu'il a connaissance du vol de son instrument de paiement
2) Qu'une faute caractérisée du porteur de la carte, si elle est démontrée, engage sa responsabilité et le prive de la possibilité de se voir appliquer la franchise de l'article L. 133-19 dudit code.
La COUR d’APPEL avait retenu qu'en laissant sans surveillance, durant plusieurs jours, sa carte bancaire et son code confidentiel dans un local exposé à un important passage et insuffisamment sécurisé, M. X... avait commis une négligence grave ayant permis la réalisation des opérations frauduleuses ;
Qu’elle avait retenu également qu'en dépit des informations qui lui avaient été données sur les modalités à suivre en cas de vol, avec communication d'un numéro téléphonique accessible 24 heures sur 24 pour faire opposition, M. X... a attendu le lendemain de la découverte du larcin pour se rendre à son agence bancaire et faire bloquer les paiements, contribuant, là encore, par sa négligence, à la réalisation de son propre dommage ;
La COUR en avait déduit que M. X... ne saurait prétendre au remboursement des sommes débitées et qu'il importe peu, dans ces conditions, de se pencher sur l'éventuelle faute de la banque qui aurait laissé débiter le compte en l'absence de découvert autorisé ;
La COUR DE CASSATION, dans un arrêt du 17 mai 2017 (Cour de cassation, chambre commerciale, numéro de pourvoi: 15-28209)
Au visa des articles 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, et L. 133-19 du code monétaire et financier ;
Casse et annule la décision de la CA de PAU et renvoi à la COUR de TOULOUSE, condamnant la Banque aux dépens.
Aux motifs :
Qu'en statuant ainsi, alors que la négligence grave retenue contre le titulaire de la carte bancaire pour n'avoir pas préservé la sécurité de celle-ci et de son code confidentiel ne le privait pas du droit d'invoquer le manquement du banquier à ses propres obligations en application des règles du droit commun de la responsabilité contractuelle, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Les faits de l’espèce démontraient un certain laxisme du client … Pour ne pas dire plus !
Il ressortait des pièces produites que le vol s'était déroulé dans un local situé au marché du Foirail, occupé par Monsieur Pierre X... qui y avait déposé une sacoche contenant entre autres documents un courrier de sa banque comportant son code confidentiel (…) .
De plus s'il avait prétendu par la suite avoir été victime d'un vol par effraction, force est de constater qu'il n'avait pas fait état de cette circonstance lors de son dépôt de plainte initial.
Qu’il s'était en effet contenté de préciser " qu'il avait déposé sa sacoche dans une petite remise se trouvant dans la partie postérieure du stand " et que " le dimanche 9 décembre 2012 à... heures, il avait voulu prendre sa serviette dans la petite remise et ne l'avait pas trouvée.
Qu’il n’avait déclaré les faits à la Banque que trois jours plus tard et n’avait pas fait non plus état du fait que la réserve aurait été verrouillée à clé et que la porte aurait été fracturée.
Cinq ans après les faits, il obtient enfin satisfaction ! Et ce grâce aux conseils avisés de son Avocat.
Conscient tout de même de la désinvolture de son client, l’Avocat avait judicieusement engagé la procédure sur la responsabilité contractuelle de la Banque pour obtenir remboursement du compte débiteur de plus de 6000,00 €, et il s’était gardé des viser les dispositions de l’Article L133-18 pour réclamer la totalité des retraits et paiements frauduleux :
« En cas d'opération de paiement non autorisée signalée par l'utilisateur dans les conditions prévues à l'article L. 133-24, le prestataire de services de paiement du payeur rembourse immédiatement au payeur le montant de l'opération non autorisée et, le cas échéant, rétablit le compte débité dans l'état où il se serait trouvé si l'opération de paiement non autorisée n'avait pas eu lieu. »
A coup sûr, la négligence grave du client aurait été retenue pour débouter ce dernier de ses demandes de remboursement des retraits et paiements frauduleux.
L’arrêt ne précise pas si, par sa carte bancaire, le client disposait d’une assurance protection juridique pour couvrir les frais de procédure et honoraires lui permettant d’aller jusqu’en Cassation, mais c’est une autre histoire !
Cet article n'engage que son auteur.
Crédit photo : © qech - Fotolia.com
Auteur

VINCENT-ALQUIE Marie-Christine
Avocate
ALQUIE - membre du GIE AVA , Membres du conseil d'administration, Invités permanents : anciens présidents
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