Bail commercial et délais de la clause résolutoire

Bail commercial : non-respect des délais et acquisition de la clause résolutoire

Publié le : 04/10/2024 04 octobre oct. 10 2024

Les locataires en difficulté de règlement de loyers recherchent des possibilités pour sauver leur activité commerciale et l’occupation du local commercial.
L’une des possibilités offertes aux locataires est de solliciter, lorsqu’est engagée une procédure de référé-expulsion devant le Tribunal Judiciaire, la suspension des effets de la clause résolutoire et des délais de paiement.

Dans un cas d’espèce, le juge des référés avait rendu une ordonnance suspendant les effets de la clause résolutoire et accordé des délais, mais le locataire n’avait pas respecté ces délais.

Celui-ci a donc cru bon de saisir le juge du fond pour en obtenir, puis la Cour d’appel d’AIX-EN-PROVENCE qui a rendu un arrêt le 2 mars 2023.

Le locataire a fait grief à cet arrêt de lui refuser des délais rétroactifs, alors que l’ordonnance de référé initiale n’avait pas l’autorité de la chose jugée au principal, de sorte que le juge du fond avait tout à fait la capacité de statuer.

Le locataire a estimé que la Cour d’appel avait violé les dispositions des articles 1355 du Code civil et 480 du Code de procédure civile.

La Cour de cassation confirme la position de la Cour d’appel d’AIX-EN-PROVENCE et considère que lorsqu’une ordonnance de référé passe en force de chose jugée et qu’elle accorde au titulaire d’un bail à usage commercial des délais pour régler un arriéré de loyers en suspendant la réalisation de la clause résolutoire, le juge du fond qui constate que ces délais n’ont pas été respectés ne peut pas en accorder de nouveaux.

En ce sens, la Cour de cassation confirme une jurisprudence ancienne qui a plus d’une vingtaine d’années.

La Cour de cassation confirme qu’un juge du fond peut, sur le fondement de l’article L145-41 du Code de commerce, accorder rétroactivement des délais de paiement au locataire et suspendre les effets de la clause résolutoire, à la condition que le locataire n’ait pas déjà obtenu des délais en référé.

Le locataire n’ayant pas respecté les délais accordés par le juge des référés, le juge du fond n’était plus en capacité procéduralement d’en accorder.

Cette décision apparaît tout à fait logique.

En effet, une ordonnance de référé n’a pas au principal l’autorité de la chose jugée (article 488 du Code de procédure civile).

Théoriquement, un juge du fond peut remettre en cause une décision d’un juge des référés.

Mais, si une ordonnance de référé constate l’acquisition d’une clause résolutoire et devient définitive, c’est-à-dire qu’elle a été signifiée sans avoir fait l’objet d’un appel, elle doit s’imposer au juge du fond statuant dans une instance ayant un objet distinct.

Il s’agit d’une exception qui est fondée sur les dispositions de l’article L 145-41 du Code de commerce.

L’article L 145-41 du Code de commerce est très clair, les juges saisis peuvent suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation lorsque la résiliation n’est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l’autorité de la chose jugée.


Cour de cassation, 3ème chambre civile, 11 juillet 2024, n° 23-16.040


Cet article n'engage que son auteur.

Auteur

MEDINA Jean-Luc
Avocat Associé
CDMF avocats , Membres du conseil d'administration
GRENOBLE (38)
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