
Les assignations à résidence dans le cadre de l'état d'urgence validées par le Conseil constitutionnel
Publié le :
23/12/2015
23
décembre
déc.
12
2015
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 11 décembre 2015 par le Conseil d'État d'une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article 6 de la loi du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence dans sa rédaction résultant de la loi n° 2015-1501 du 20 novembre 2015.Ces dispositions fixent le régime juridique des mesures d'assignation à résidence qui peuvent être décidées par le ministre de l'intérieur lorsqu'est déclaré l'état d'urgence en application de la loi du 3 avril 1955.
Les critiques du requérant n'étaient adressées qu'aux neuf premiers alinéas de l'article 6 de la loi du 3 avril 1955, ce qui a conduit le Conseil constitutionnel à restreindre le champ de la QPC à ces dispositions. Le requérant faisait notamment grief à ces dispositions de méconnaître les droits garantis par l'article 66 de la Constitution et de porter atteinte à la liberté d'aller et de venir.
Dans sa décision du 22 décembre 2015, Le Conseil constitutionnel a d'abord relevé les conditions auxquelles est subordonné le prononcé d'une assignation à résidence et précisé qu'une telle mesure relève de la seule police administrative et ne peut donc avoir d'autre but que de préserver l'ordre public et de prévenir les infractions.
Il a jugé que, tant par leur objet que par leur portée, ces dispositions ne comportent pas de privation de la liberté individuelle au sens de l'article 66 de la Constitution.
Cependant, s'agissant de l'astreinte à domicile dont peut faire l'objet une personne assignée à résidence, le Conseil constitutionnel a jugé que la plage horaire maximale de cette astreinte, fixée à douze heures par jour, ne saurait être allongée sans que l'assignation à résidence soit alors regardée comme une mesure privative de liberté, dès lors soumise aux exigences de l'article 66 de la Constitution.
En ce qui concerne la liberté d'aller et de venir, après avoir relevé que la Constitution n'exclut pas la possibilité pour le législateur de prévoir un régime d'état d'urgence, le Conseil constitutionnel a jugé que les dispositions contestées n'y portent pas une atteinte disproportionnée au bénéfice de trois séries de considérations.
En premier lieu, l'assignation à résidence ne peut être prononcée que lorsque l'état d'urgence a été déclaré. Celui-ci ne peut être déclaré, en vertu de l'article 1er de la loi du 3 avril 1955, qu'« en cas de péril imminent résultant d'atteintes graves à l'ordre public » ou « en cas d'événements présentant, par leur nature et leur gravité, le caractère de calamité publique ». Par ailleurs, ne peut être soumise à une telle assignation que la personne résidant dans la zone couverte par l'état d'urgence et à l'égard de laquelle « il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité et l'ordre publics ».
En deuxième lieu, tant la mesure d'assignation à résidence que sa durée, ses conditions d'application et les obligations complémentaires dont elle peut être assortie doivent être justifiées et proportionnées aux raisons ayant motivé la mesure dans les circonstances particulières ayant conduit à la déclaration de l'état d'urgence. Le juge administratif est chargé de s'assurer que cette mesure est adaptée, nécessaire et proportionnée à la finalité qu'elle poursuit.
En troisième lieu, en vertu de l'article 14 de la loi du 3 avril 1955, la mesure d'assignation à résidence prise en application de cette loi cesse au plus tard en même temps que prend fin l'état d'urgence. L'état d'urgence, déclaré par décret en conseil des ministres, doit, au-delà d'un délai de douze jours, être prorogé par une loi qui en fixe la durée. Sur ce point, le Conseil constitutionnel a précisé, d'une part, que cette durée ne saurait être excessive au regard du péril imminent ou de la calamité publique ayant conduit à la déclaration de l'état d'urgence. D'autre part, si le législateur prolonge l'état d'urgence par une nouvelle loi, les mesures d'assignation à résidence prises antérieurement ne peuvent être prolongées sans être renouvelées.
Source:Communiqué de presse du Conseil constitutionnel - 2015-527 QPC
Virginie MEREGHETTI-FILLIEUX
Cet article n'engage que son auteur.
Historique
-
Numérotation des habitations: rappel de la réglementation
Publié le : 24/02/2017 24 février févr. 02 2017Collectivités / Environnement / EnvironnementDans une réponse ministérielle du 24 janvier 2017, le ministre de l'Intérieur rappelle la réglementation en matière de numérotation des habitations. Dans...
-
Antennes-relais: la loi ABEILLE pour une meilleure information de la population
Publié le : 10/11/2016 10 novembre nov. 11 2016Collectivités / Environnement / EnvironnementDéclinaisons d’une nouvelle gouvernance de l’information en matière d’exposition du public aux ondes électromagnétiques : transparence et prémisses de concer...
-
Réforme de l'autorité environnementale
Publié le : 03/05/2016 03 mai mai 05 2016Collectivités / Environnement / EnvironnementUn décret du 28 avril 2016 prévoit que la fonction d’autorité environnementale pour les plans et programmes relèvera désormais d'une mission régionale d'auto...
-
Création d'un commissaire à l'information stratégique et à la sécurité économiques et d'un « service de l'information stratégique et de la sécurité économiques »
Publié le : 01/02/2016 01 février févr. 02 2016Collectivités / Environnement / Principes générauxUn décret du 29 janvier 2016 institue un commissaire à l'information stratégique et à la sécurité économiques et porte création d'un service à compétence nat...
-
Les assignations à résidence dans le cadre de l'état d'urgence validées par le Conseil constitutionnel
Publié le : 23/12/2015 23 décembre déc. 12 2015Collectivités / Environnement / Principes générauxLe Conseil constitutionnel a été saisi le 11 décembre 2015 par le Conseil d'État d'une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité au...
-
Avant la COP21, la France adopte le décret relatif aux budgets carbone nationaux et à la stratégie nationale bas-carbone
Publié le : 26/11/2015 26 novembre nov. 11 2015Collectivités / Environnement / EnvironnementLe décret définissant la stratégie nationale bas-carbone (SNBC) pour le climat de la France a été publié.Le décret n° 2015-1491 du 18 novembre 2015 relatif a...
-
Réforme du droit d'asile: publication d'un décret d'application
Publié le : 24/09/2015 24 septembre sept. 09 2015Collectivités / Environnement / Principes générauxUn décret du 21 septembre 2015 précise les modalités d'application de la loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d'asile.Le décret...