
Fonctionnaire territorial : quelle prescription pour la demande de reconnaissance de l'imputabilité au service d'une maladie ?
Publié le :
17/08/2017
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2017
L'applicabilité de la prescription de quatre ans à la demande de reconnaissance de l'imputabilité au service d'une maladie formulée par les fonctionnaires territoriaux.
L’article 23 du décret n°87-602 du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux, dispose que :
« Lorsque l'administration est amenée à se prononcer sur l'imputabilité au service d'une maladie ou d'un accident, elle peut, en tant que de besoin, consulter un médecin expert agréé.
La commission de réforme n'est pas consultée lorsque l'imputabilité au service d'une maladie ou d'un accident est reconnue par l'administration. La commission de réforme peut, en tant que de besoin, demander à l'administration de lui communiquer les décisions reconnaissant l'imputabilité ».
L’article 32 du décret n°86-442 du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires, prévoit que :
« La demande tendant à ce que la maladie soit reconnue comme ayant été contractée dans l'exercice des fonctions doit être présentée dans les quatre ans qui suivent la date de la première constatation médicale de la maladie.
La commission de réforme n'est toutefois pas consultée lorsque l'imputabilité au service d'une maladie ou d'un accident est reconnue par l'administration.
L'avis de la commission de réforme et le dossier dont elle a disposé sont transmis à l'administration dont relève l'agent intéressé ».
A priori, à la lecture de ces textes, il semblerait que jusqu’à l’entrée en vigueur du décret n°87-602, applicable spécifiquement à la fonction publique territoriale, les demandes de reconnaissance d’imputabilité au service d’une maladie dont souffre un fonctionnaire connaissaient une prescription de quatre ans à compter de la première constatation médicale de la maladie.
A partir de l’entrée en vigueur du décret n°87-602, il pouvait sembler que des dispositions spécifiques à la fonction publique territoriale s’appliquaient en matière de désignation des médecins agrées, d’organisation des comités médicaux et des commissions de réforme et plus généralement de congés de maladie.
Dans cette hypothèse, il est vrai qu’en matière de reconnaissance d’imputabilité au service d’une maladie ou d’un accident, le régime prévu pour les fonctionnaires territoriaux était plus favorable que celui applicable aux fonctionnaires d’Etat puisque l’article 23 du décret de 1987 ne prévoit pas de prescription en la matière.
Cette inégalité de traitement, pourtant édictée par le Gouvernement, explique certainement les décisions rendues par la plupart des juridictions administratives faisant application de la prescription de quatre aux demandes de reconnaissance d’imputabilité au service d’une maladie formulées par des fonctionnaires territoriaux.
Ainsi, la Cour administrative d’appel de Versailles, dans un arrêt du 5 juillet 2012, n°11VE01424, a opposé à la demande de reconnaissance de l’imputabilité au service de la maladie d’un agent d'entretien territorial non titulaire de la Courneuve la prescription de quatre ans.
Elle a pourtant également visé le décret n°87-602 du 30 juillet 1987 mais n’a fait application que de l’article 37 aux termes duquel « Le fonctionnaire ne pouvant, à l'expiration de la dernière période de congé de longue maladie ou de longue durée attribuable, reprendre son service est soit reclassé, en application du décret n° 85-1054 du 30 septembre 1985 susvisé, soit mis en disponibilité, soit admis à la retraite après avis de la commission de réforme prévue par le décret n° 65-773 du 9 septembre 1965 ».
La Cour a été suivie, notamment, par le Tribunal administratif d’Amiens (Jugement du 3 février 2016, n°1101296), par celui de Cergy-Pontoise, (Jugement du 30 juin 2016 n°1401720) et par celui de Limoges (Jugement du 6 juillet 2017, n°1500313).
Seul le Tribunal administratif de Poitiers (Jugement du 3 février 2016, n°1301850) a jugé que :
« Considérant que la communauté d’agglomération fait valoir que la demande de reconnaissance de l’origine professionnelle de sa maladie a été formée par Mme N... après l’expiration du délai de quatre ans à compter de la première constatation médicale prévu par l’article 32 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l’organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d’aptitude physique pour l’admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires ;
Considérant, toutefois, que cet article n’est applicable qu’à la reconnaissance de l’origine professionnelle d’une maladie ayant conduit au placement d’un agent de l’Etat en congé de longue durée ; que Mme N..., agent de la fonction publique territoriale, n’entre pas dans le champ de ces dispositions ; que sa demande de reconnaissance de l’origine professionnelle de son affection, au titre de laquelle elle a été placée en congé de maladie ordinaire, est régie par l’article 16 du décret du 30 juillet 1987 relatif à l’organisation des comités médicaux, aux conditions d’aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux, lequel ne fixe aucun délai ».
De surcroît, ce jugement se prononce explicitement sur la question de l’application ou pas de la prescription de quatre ans aux fonctionnaires territoriaux.
Ce qui n’est objectivement pas le cas des décisions précitées qui se bornent à appliquer l’article 32 du décret n°86-442 à des fonctionnaires territoriaux, sans statuer ni sur l’applicabilité de ces dispositions à ces fonctionnaires, ni sur la circonstance que le décret de 1987 ne leur est pas applicable.
Cette question mérite naturellement que le Conseil d’Etat en soit saisie ou, éventuellement, que le Gouvernement amende le décret de 1987. Dans l’attente, et face à l’interprétation dominante, il convient de considérer que les fonctionnaires territoriaux sont, à l’instar des fonctionnaires de l’Etat, soumis à une prescription de quatre pour formuler leur demande de reconnaissance de l’imputabilité au service de leur maladie.
Cet article n'engage que son auteur.
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Auteur
MONPION Anne
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