
Devoir de conseil et d'information de l'agent immobilier, vers une rigueur accrue
Publié le :
16/02/2024
16
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2024
L’agent immobilier est tenu à un devoir de conseil et d’information tant à l’égard du vendeur, qu’à l’égard de l’acquéreur, qui s’étend à la consistance matérielle du bien.A ce titre, il se doit de vérifier et de communiquer aux parties toutes les informations qui sont de nature à influer sur leur consentement.
Il est alors considéré que l’agent immobilier est redevable d’une obligation d’information renforcée.
Dans ce cadre, la jurisprudence a rappelé de façon très régulière que l’agent immobilier est un professionnel de la vente et de l’immobilier et non un professionnel de la construction (Cass, 3ème civ, 21 janvier 2015, n° 13-17.982) :
« l’état apparent de l’immeuble ne justifiait, de la part de cette société qui n’était pas un professionnel de la construction, aucune investigation supplémentaire par rapport ç l’information qui lui avait été donnée. »
Formulation une nouvelle fois consacrée dans un arrêt en date du 29 mars 2018 (Cass, 3ème civ, 17-13.157) :
« L’agent immobilier n’étant pas un professionnel de la construction, il n’est donc pas responsable du vice caché affectant un bien immobilier qu’il est chargé de vendre. »
La responsabilité de l’agent immobilier ne peut donc pas être engagée lorsque les désordres affectant l’immeuble vendu n’étaient pas apparents et que la preuve n’est pas rapportée qu’il connaissait le vice (Cour d’appel de Douai, 10 mai 2012, n° 11-04.997).
Dès lors qu’il ne peut pas être exigé d’un agent immobilier d’être un spécialiste de la construction, sa responsabilité ne peut-être engagée que s’il est établi que les désordres ou les défauts de conformité étaient apparents pour un non professionnel de la construction.
Mais dans ce cas, s’ils le sont pour l’agent immobilier, ils le sont également pour l’acquéreur, qui n’est pas plus compétent que lui dans le domaine de la construction.
Cette jurisprudence a également été appliquée lorsqu’en présence de fissurations visibles lors des visites effectuées préalablement à la vente, s’étant depuis lors aggravées au point d’être qualifiées de vice caché, leur gravité et leur origine ne pouvaient pas être appréciées par l’agent immobilier (Cass, 3ème civ, 23 octobre 2013, n° 10-15.687).
En tout état de cause, il a toujours été considéré que l’agent immobilier n’était pas tenu de procéder à une expertise technique du bien (Cass, 3ème civ, 9 décembre 2014, n° 13-24.765).
Il reste que les jurisprudences les plus récentes vont très clairement dans le sens d’un durcissement des exigences attendues de l’agent immobilier dans l’exécution de son mandat.
C’est ainsi que par un arrêt en date du 16 mars 2023 (Cass, 3ème civ, 16 mars 2023, n° 21-25.082), la Cour de cassation a condamné in solidum un agent immobilier et un diagnostiqueur sur le fondement du manquement à son devoir d’information, au motif qu’il « incombait à l’agent immobilier de mentionner la date et le type de construction de la maison dans la promesse de vente, s’agissant des caractéristiques essentielles du bien vendu.
En dernier lieu, par un arrêt en date du 21 décembre 2023 (Cass, 3ème civ, 21 décembre 2023, n° 22-20.045), la Cour de cassation a retenu la responsabilité de l’agent immobilier, en présence d’importantes traces d’infiltrations et de fortes dégradations des menuiseries au jour de la vente, « avec des infiltrations visibles sur la façade principale » (ce qui était nécessairement apparent aux yeux des acquéreurs), pour n’avoir pas « soupçonné un défaut d’étanchéité de la toiture » et avoir ainsi manqué à son obligation d’information et de conseil à l’égard des acquéreurs …
Cet article n'engage que son auteur.
Auteur

Ludovic GAUVIN
Avocat Associé
ANTARIUS AVOCATS ANGERS, Membres du Bureau, Membres du conseil d'administration
ANGERS (49)
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