
Un échange de mails peut avoir la même valeur qu’un contrat écrit
Publié le :
06/11/2018
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2018
Lorsqu'un écrit est exigé pour la validité d'un contrat, il peut être établi et conservé sous forme électronique, rappelle la Cour de cassation dans une décision du 11 juillet 2018.
Rappelons les faits.
Le 27 juin 2013, l’ASSE Loire ( le club de football professionnel de Saint Etienne) avait confié à la société AGT UNIT, dont le gérant est Monsieur Alexandre Gontran , titulaire d’une licence d’agent sportif, le soin de négocier le transfert du joueur gabonais Pierre Emerick Aubameyang au sein du club de football allemand : le Borussia Dortmund.Le transfert a été très rapide, réalisé en quelques jours. La société AGT UNIT a, dans la foulée, transmis sa facture à l’ASSE Loire, pour un montant de 777 400 euros TTC. Ce que le club stéphanois a, tout aussi rapidement, refusé de payer.
Le club de football a expliqué qu’il avait, en réalité, mené les négociations seul. Et que, de surcroît, le transfert n’avait pas respecté l’article L 222-17 du Code du sport qui stipule que le contrat d’agent sportif doit revêtir une forme écrite, écrit qui faisait défaut.
La société d'agent sportif a assigné l’ASSE Loire en paiement de la somme représentant le montant de la commission qu'elle estimait lui être due en vertu d'un mandat reçu de cette société aux fins de négocier avec le club allemand de football de Dortmund, le transfert d'un joueur, ainsi qu'en allocation de dommages-intérêts.
Par arrêt du 10 novembre 2016, la Cour d'appel de Lyon a rejeté les demandes de cette société d'agent sportif au motif "qu'un message électronique ne peut, par nature, pas constituer l'écrit concentrant les engagements respectifs des parties", exigé par l'article L. 222-17 du Code du sport.
Selon la Cour, les courriels échangés par les parties ne regroupaient pas dans un seul document les mentions obligatoires prévues par l'article L. 222-17, et ce en violation de ce texte.
La société AGT UNIT a formé un pourvoi en cassation en faisant valoir que l’ASSE Loire ne pouvait prétendre que le mandat litigieux ne respectait pas les règles énoncées par le Code du sport au seul motif qu'il avait été conclu par un échange de courriels, dès lors que ceux-ci comportaient tous les éléments exigés par ces dispositions.
Le pourvoi est accueilli et la première chambre civile de la Cour de Cassation casse et annule l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Lyon au double motif suivant :
- "Qu'en statuant ainsi, alors que l'article L. 222-17 du Code du sport n'impose pas que le contrat dont il fixe le régime juridique soit établi sous la forme d'un acte écrit unique, la cour d'appel, en ajoutant à la loi une condition qu'elle ne comporte pas, a violé le texte susvisé"- "Attendu que, pour statuer comme il le fait, l'arrêt retient qu'un message électronique ne peut, par nature, constituer l'écrit concentrant les engagements respectifs des parties ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés"
Ainsi , La cour considère que, sur la forme électronique du contrat, en vertu de l’article 1108-1 du Code civil (en vigueur au moment du litige, repris désormais à l’identique à l’article 1174 du même code), « lorsqu’un écrit est exigé pour la validité d’un acte juridique, il peut être établi et conservé sous forme électronique », dans les conditions prévues par ce même code. Le requérant ne pouvait donc pas se prévaloir du simple fait que le contrat avait été conclu par un échange de courriels pour affirmer qu'il n'était pas valide.
Cet article n'engage que son auteur.
Crédit photo : © Onidji - Fotolia.com
Auteur

Christophe Delahousse
Avocat
Cabinet Chuffart Delahousse, Membres du Bureau, Membres du conseil d'administration
ARRAS (62)
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