Indemnisations données par l'Etat à un époux rapatrié d'Algérie et biens propres
Publié le :
20/10/2010
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Les indemnisations données par l'Etat à un époux rapatrié d'Algérie ne sont pas des biens propres s'ils ont servi au logement de la famille.Indemnisation des rapatriés d'AlgérieMr Bouziane Y... et Mme Lahouria Z... se sont mariés le 16 mars 1983 devant l'officier d'état civil d'Albi sans avoir fait précédé leur union d'un contrat de mariage et sont donc soumis au régime de communauté de biens.
En 1991,1996 et 2000 Mr Bouziane , en sa qualité de rapatrié d’ALGERIE a reçu de l’Etat Français diverses sommes pour un montant total de 62.604,02 € , ces sommes étant versées en vertu de la loi du 26 déc. 1961 pour accéder à la propriété , et celle du 11 juin 1994 pour faire face aux remboursements d’emprunts.
Le couple utilise effectivement cette somme pour la construction du domicile conjugal.
Le divorce est prononcé le 7 septembre 2004 … et il faut liquider la communauté.
Maître A..., notaire, désigné pour procéder à la liquidation de leur régime matrimonial, a dressé un procès- verbal de difficulté le 23 novembre 2005 quant à :
- la nature exacte de propre ou de biens communs des sommes dont Monsieur Y... fait état en les revendiquant comme bien propre ( 1404 du code civil) et donnant lieu à récompense, et dont son ex épouse, déclare qu'elles n'ont été versées qu'à la communauté existant alors entre eux à titre de subvention et qu’elles doivent être considérées comme des biens communs.
Quid de la nature des sommes versées par l’Etat Français à Mr Bouziane Y. au cours du mariage : Bien propre ou Bien commun ?
Par jugement du 5 janvier 2007, le Tribunal de Grande Instance d'ALBI a :
- dit que les fonds perçus par Monsieur Y... d'un montant total de 62. 504, 10 euros constituent des biens propres au sens de l'article 1404 du Code civil.
Par arrêt en date du 20 mai 2008 la Cour d’Appel de TOULOUSE a :
- dit que c'est avec une exacte appréciation que le TGI a retenu que les aides, de 410. 000 francs soit 62. 504, 10 euros, octroyés à Monsieur Y par les services préfectoraux du Tarn en sa qualité de " harki " ,se rapportant pour chacune aux origines de ce dernier, à savoir sa qualité de rapatrié, constituent des biens propres .
La Cour de Cassation par l’arrêt ci-dessous reproduit infirme ces décisions et dit que :
« si les droits aux allocations et aux secours exceptionnels dont bénéficie un rapatrié d’Algérie pour lui permettre d’accéder à la propriété et de faire face à ses obligations de remboursement immobilier, exclusivement personnels, constituent des biens propres par nature, les sommes versées par l’Etat pendant le mariage en exécution de ces droits, pour lui permettre d’assurer le financement du logement familial, entrent en communauté, la cour d’appel a violé les textes susvisés .. »
Arrêt n° 584 du 9 juin 2010 (08-16.528) - Cour de cassation - Première chambre civile
Cassation partielle.
Demandeur(s) : Mme Lahouira... X...
Défendeur(s) : M. Bouziane... Y...
Sur le moyen unique :
Vu les articles 1401, 1402, alinéa 1 er, et 1404 du code civil ;
Attendu que le divorce de M. Y… et Mme X…, mariés sans contrat de mariage préalable, a été prononcé le 7 septembre 2004 ; que le notaire, désigné pour procéder à la liquidation de leur régime matrimonial, a dressé un procès-verbal de difficultés le 23 novembre 2005 ; que pendant le mariage, M. Y… avait reçu de l’Etat, en sa qualité de rapatrié d’Algérie, une somme de 60 000 francs versée sur le fondement de la loi n° 61-1439 du 26 décembre 1961 pour lui permettre d’accéder à la propriété, une allocation forfaitaire complémentaire de 110 000 francs et une aide exceptionnelle de 240 000 francs versée sur le fondement de la loi n° 94-488 du 11 juin 1994 pour lui permettre de faire face à ses obligations de remboursement immobilier ; que M. Y… a soutenu que ces sommes étaient des biens propres au sens de l’article 1404 du code civil et, en conséquence, que la communauté lui en devait récompense ;
Attendu que, pour décider que les sommes versées au titre de l’indemnisation et l’aide aux rapatriés constituent des biens propres de M. Y… et que la communauté lui en doit récompense à hauteur de 45 734,41 euros, l’arrêt attaqué retient, tant par motifs propres qu’adoptés, que le courrier de l’Agence nationale pour l’indemnisation des français d’Outre-Mer du 25 septembre 2006 précise que “les sommes perçues au titre des lois précitées par M. Y… lui sont personnelles ; qu’elle sont insaisissables et représentent un bien propre par nature au sens de l’article 1404 du code civil” ; que les trois décisions octroyant des fonds à M. Y… se rapportent toutes aux origines de ce dernier sans lesquelles il ne pourrait pas prétendre à ces aides ; que même si celles-ci ont effectivement pour but de remédier à la situation économique de M. Y…, soit pour l’aider à accéder à la propriété, soit pour lui permettre de faire face à d’importantes difficultés financières, la première raison d’être de ces aides est la qualité de M. Y… ;
Qu’en statuant ainsi, alors que si les droits aux allocations et aux secours exceptionnels dont bénéficie un rapatrié d’Algérie pour lui permettre d’accéder à la propriété et de faire face à ses obligations de remboursement immobilier, exclusivement personnels, constituent des biens propres par nature, les sommes versées par l’Etat pendant le mariage en exécution de ces droits, pour lui permettre d’assurer le financement du logement familial, entrent en communauté, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a dit que les sommes versées au titre de l’indemnisation et l’aide aux rapatriés constituent des biens propres de M. Y… et dit que la communauté doit récompense à M. Y… à hauteur de 45 734,41 euros pour l’utilisation de ces fonds propres, l'arrêt rendu le 20 mai 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse, autrement composée ;
Arrêt déféré à la Cour de Cassation : CA TOULOUSE : 20 Mai 2008 Arrêt n° 457.
Sophie DEBAISIEUX-LATOUR
Cet article n'engage que son auteur.
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