La Section du contentieux du Conseil d’État précise les suites de l’annulation d’une réintégration après révocation
Publié le :
01/02/2023
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Par une décision du 9 décembre 2022 (CE, sect., 9 déc. 2022, n° 451500), publiée au recueil Lebon, la Section du contentieux du Conseil d’Etat statuant en référé précise les conditions dans lesquelles l’employeur public peut retirer la décision de réintégration d’un agent lorsque la révocation qui avait été annulée par le juge de première instance est confirmée par un juge d’appel ou après pourvoi en cassation : ainsi, l’autorité compétente ne peut retirer la décision que dans un délai raisonnable, apprécié en fonction de la situation concrète, et après avoir invité l’agent à présenter ses observations.Dans cette affaire, le conseil départemental de la Seine-Saint-Denis avait infligé à un agent adjoint administratif de seconde classe la sanction disciplinaire de révocation à compter du 15 mai 2017. Le juge des référés du tribunal administratif de Montreuil ayant suspendu l’exécution de cette sanction et ordonné la réintégration provisoire de l'intéressé, le président du conseil départemental, en exécution de cette ordonnance, avait réintégré l’agent à titre provisoire par une décision du 8 septembre 2017.
La sanction de révocation a été ensuite annulée par un jugement du 22 janvier 2018, lequel a ordonné la réintégration de l’agent à compter du 15 mai 2017. Le jugement a toutefois été annulé par la cour administrative d’appel de Versailles par un arrêt du 4 décembre 2019, lequel a fait l’objet d’un pourvoi en cassation toujours pendant. Dans ce cadre, le président du conseil départemental a retiré, par décision du 19 janvier 2021, la décision du 8 septembre 2017 portant réintégration de l’agent, plus d’un an après l’intervention de la décision d’appel.
Saisi par l’agent, le juge des référés du tribunal administratif de Montreuil a suspendu l’exécution de la décision retirant la décision de réintégration à titre provisoire. Le conseil départemental a formé un pourvoi en cassation contre cette ordonnance.
Après une appréciation classique de la condition d’urgence, regardée comme satisfaite dès lors que la décision privait l’agent de l’intégralité de sa rémunération et que celui-ci justifiait de l’absence d’autres revenus susceptibles de faire face à ses charges familiales, le Conseil d’Etat commence par rappeler les règles selon lesquelles la décision de réintégration peut être retirée, puis précise les conséquences notamment pécuniaires du retrait de la décision de réintégration.
Plusieurs conditions sont ainsi nécessaires pour que la décision de réintégration puisse être retirée :
- une condition de fond d’abord : les motifs de la décision d’appel qui infirme le jugement annulant la sanction de révocation ne doit pas faire obstacle à une nouvelle décision de révocation ;
- une condition de délai ensuite : la décision retirant la décision de réintégration ne peut intervenir que dans un délai raisonnable de quatre mois, décompté à compter de la notification à l'administration de la décision rendue en appel ou, passé ce délai, si un pourvoi en cassation a été introduit contre l'arrêt d’appel, à compter de la réception de la décision qui rejette le pourvoi ou de la notification de la décision juridictionnelle qui, après cassation, confirme en appel l'annulation du premier jugement ;
- une condition de procédure enfin, tenant au respect des droits de la défense : la décision retirant la décision de réintégration doit, dans tous les cas (qu’elle intervienne après la décision d’appel infirmant le jugement, ou, en cas de pourvoi en cassation, après le rejet du pourvoi ou la confirmation en appel de l’annulation du premier jugement après cassation), être précédée d’une procédure contradictoire se traduisant par une invitation de l’agent à présenter ses observations.
Au cas présent, la Haute Juridiction relève que la décision de retrait de la décision de réintégration par le président du conseil départemental est intervenue au-delà d’un délai raisonnable de quatre mois après la notification de l’arrêt ayant infirmé le jugement annulant la sanction de révocation. Il en résulte qu’il existe, en l’état de l’instruction, un moyen propre à créer un doute sérieux sur la légalité de cette décision, de sorte que c’est à bon droit que le juge des référés du tribunal administratif de Montreuil a suspendu l’exécution de la décision retirant la décision de réintégration de l’agent.
Cet article n'engage que son auteur.
Auteur
Mélissa GOASDOUÉ
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