Non-lieu à statuer et frais irrépétibles

Non-lieu à statuer et frais irrépétibles

Publié le : 12/11/2014 12 novembre nov. 11 2014

L’article L 761-1 du CJA fait expressément référence à « la partie tenue aux dépens ou à défaut à la partie perdante » pour condamner l’une des parties en litige au bénéfice d’une indemnité au titre des dispositions de l’article L.761-1 CJA.Ainsi, l’article L 761-1 du CJA fait expressément référence à « la partie tenue aux dépens ou à défaut à la partie perdante » pour condamner l’une des parties en litige au bénéfice d’une indemnité au titre des dispositions de l’article L.761-1 CJA.

Si la jurisprudence a, quant à elle, eu l’occasion de préciser qu’en la matière, le juge dispose d’un important pouvoir souverain d’appréciation (C.E 13 mars 1991 « Ministre des affaires sociales c/ Conate » Rec. T. p 1137, C.E 13 mars 1992 « Ministre de l’Agriculture » Rec. p. 1229, C.E 5 mai 1999 « Société groupe maritime et commercial du pacifique » Rec. p. 987), encore faut-il que la partie condamnée sur ce fondement, non tenue aux dépens, puisse être considérée comme la partie perdante.

Si le Conseil d’Etat a déjà été amené à considérer qu’un non-lieu ne faisait pas obstacle au prononcé d’une condamnation au titre des frais irrépétibles, (CE 25 octobre 2006, req. N°273954), cela visait une hypothèse dans laquelle l’administration avait annulé la décision contestée pour faire droit à la demande de la société requérante.

Rien de tel dans l’espèce qui vient de donner lieu à un intéressant arrêt de la Cour Administrative d’Appel de Nantes (CAA Nantes, 7 novembre 2014, n°13NT01718).

Dans cette affaire, suite à un recours exercé par un voisin qui, parallèlement avait saisi le juge des référés d’une demande d’expertise technique en raison de problèmes d’écoulement des eaux pluviales dans le village dans lequel se situait le projet contesté, le bénéficiaire du permis de construire attaqué avait écrit au Maire de la Commune pour demander l’annulation du permis qui lui avait été délivré.

Le Maire, qui n’avait d’autre alternative, a annulé le permis, et conclu au non-lieu à statuer.

Le Tribunal avait pris acte de ce non-lieu, mais avait cru devoir néanmoins condamner la Commune à verser aux requérants une indemnité au titre des dispositions de l’article L.761-1 CJA.

Face à la multiplication de décisions en ce sens, la Commune (fait rarissime) a entendu contester cette décision devant la Cour administrative d’appel de Nantes, faisant valoir, d’une part qu’elle ne pouvait être considérée comme la partie perdante, et d’autre part qu’elle n’avait pas de son propre chef décidé d’annuler la décision contestée, mais qu’elle avait été saisie d’une demande d’annulation du permis contesté, par les pétitionnaires qui, sous compromis d’acquisition du terrain objet du permis contesté, ont préféré renoncer à leur projet, compte-tenu des délais de procédure.

La Cour administrative de Nantes annule la décision de première instance aux termes d’une motivation qui devrait désormais cadrer les choses, et éviter que l’on soit contraint de faire un appel, pour éviter une condamnation, en engager ainsi des frais supérieurs à la condamnation invalidée … parce que la Cour n’a pas assorti son arrêt de frais irrépétibles, mais les questions de principe, n’ont par essence pas de prix :

« .. Que par ordonnance du 29 mai 2013, le Président de cette juridiction a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions fin d’annulation de M et Mme L. et mis à la charge de la Commune le versement aux intéressés d’une somme de 800 euros au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative ; qu’il ressort, toutefois, des pièces du dossier que le retrait en cause est intervenu à la demande du pétionnaire ; que la seule circonstance qu’était en cours dans la commune, à la demande de M. et Mme L, une expertise judiciaire relative à des problèmes d’écoulement des eaux pluviales, ne suffit pas à établir que le permis délivré était entaché d’illégalité et que la commune aurait été de ce fait la partie perdante à l’instance ; que par suite la commune est fondée à soutenir que c’est à tort que, par l’article 2 de l’ordonnance attaquée, le président du tribunal administratif l’a condamné à verser la somme de 800 euros à M. et Mme L au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ».



Cet article n'engage que son auteur.

Crédit photo : © Gina Sanders - Fotolia.comAux termes des dispositions de l’article L 761-1 du Code de Justice Administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut, la partie perdante à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation.»

Auteur

Vincent LAHALLE
Avocat Associé
LEXCAP RENNES
RENNES (35)
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