Limites de l'autonomie de la QPC (question prioritaire de constitutionnalité)

Limites de l'autonomie de la QPC (question prioritaire de constitutionnalité)

Publié le : 23/02/2012 23 février févr. 02 2012

Si le Conseil d’Etat avait jugé la question sérieuse et l’avait transmise au Conseil Constitutionnel, ce dernier aurait statué même si entre temps le désistement avait été constaté par la Cour.

Admission de la QPC et désistement de l'appelant 1. Dans le cadre de l’appel interjeté devant la Cour de Marseille par le Préfet des Pyrénées Orientales à l’encontre d’un jugement du Tribunal Administratif de Montpellier, la commune des Angles, intimée, avait posé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) relative à l’article L 144-1 du code forestier.

Par ordonnance du 7 novembre 2011, le président de la 7ème chambre de la Cour avait transmis la QPC au Conseil d’Etat.

Suivant mémoire enregistré le 30 novembre 2011, le Préfet s’était désisté de son appel devant la Cour de Marseille.

La question du devenir de la QPC se posait donc, eu égard au désistement intervenu.


2. Par arrêt du 1er février 2012, le Conseil d’Etat s’est estimé valablement saisi de l’examen de la QPC.

Pour autant, il a considéré que celle-ci ne présentait pas de caractère sérieux et ne l’a donc pas renvoyée au Conseil Constitutionnel.

Mais l’intérêt de l’arrêt réside essentiellement dans l’admission de la QPC alors même que, dans le litige qui en est le support, l’appelant a informé la juridiction d’appel de son désistement.

Dans la mesure où, à la date où le Conseil d’Etat a rendu sa décision, la Cour administrative d’appel de Marseille n’avait pas donné acte de ce désistement, il a estimé que la QPC n’avait pas perdu son objet.

A contrario, il faut sans doute en déduire que si l’arrêt constatant le désistement était intervenu avant l’audience au Conseil d’Etat, ce dernier aurait déclaré la QPC sans objet.


3. L’on sait que le juge du fond saisi d’une QPC statue « sans délai » sur le sort de celle-ci, et qu’en cas de transmission au Conseil d’Etat, le procès est en quelque sorte « gelé » par l’effet d’un sursis à statuer. En revanche, rien ne peut empêcher un requérant de décider de se désister du recours à l’occasion duquel la QPC lui a été opposée. Et dans cette hypothèse la juridiction ne paraît pas tenue de surseoir à constater le désistement, même si la dérogation n’est pas formellement envisagée par l’article 23-3 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 …

Si le Conseil d’Etat a trois mois pour décider de renvoyer ou non la QPC au Conseil Constitutionnel (qui a lui-même trois mois pour statuer), le jugement ou l’arrêt constatant le désistement peut intervenir dans un laps de temps plus ou moins long.

Autrement dit, selon le moment auquel interviendra la décision constatant le désistement, la QPC sera ou non transmise. Son examen pourrait ainsi varier en fonction de données purement administratives comme la gestion des rôles des juridictions du fond…

En revanche, si le Conseil d’Etat avait jugé la question sérieuse et l’avait transmise au Conseil Constitutionnel, ce dernier aurait statué même si entre temps le désistement avait été constaté par la Cour, et ce, en application des dispositions de l’article 23-9 de l’Ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, issu de la Loi. Organique no 2009-1523 du 10 déc. 2009. (1)

A ce stade, la QPC devient en effet pleinement autonome et indépendante du procès sur lequel elle s’est greffée.

Cette solution doit d’autant plus être approuvée que dans l’hypothèse où un tiers serait intervenu volontairement devant le Conseil Constitutionnel en application de l’article 6 du règlement, en vigueur depuis le 1er juillet 2011, le tiers intervenant conserverait son intérêt à voir statuer sur la QPC, quand bien même le procès initial se terminerait par une décision constatant le désistement du requérant. (2)


Index:

(1) Art. 23-9/ Lorsque le Conseil constitutionnel a été saisi de la question prioritaire de constitutionnalité, l'extinction, pour quelque cause que ce soit, de l'instance à l'occasion de laquelle la question a été posée est sans conséquence sur l'examen de la question.

(2) Toute partie qui justifie d’un intérêt spécial peut intervenir volontairement devant le Conseil Constitutionnel dans les trois semaines suivant la transmission d’une QPC, alors même qu’elle est tout à fait étrangère au procès à l’occasion duquel la QPC aura été posée.

Cet article n'engage que son auteur.

Crédit photo : © antoinemonat- Fotolia.com

Auteur

CHARLES-NEVEU Brigitte
Avocate Honoraire
NEVEU, CHARLES & ASSOCIES
NICE (06)
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