Licenciement

Faute grave : l'employeur n'a ni forcément à se presser d'agir, ni à mettre à pied le salarié

Publié le : 31/01/2023 31 janvier janv. 01 2023

Un employeur peut-il licencier pour faute grave un salarié alors qu’il a mis près d’un mois pour le convoquer à un entretien préalable et ne l’a pas mis à pied à titre conservatoire le temps de la procédure ?
Ce délai et cette absence de mise à pied à titre conservatoire ne sont-ils pas contraires à la définition selon laquelle la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise ?

Non pour la Cour de cassation …(Cass. soc. 7 décembre 2022, n° 21-14484)

… mais cette réponse doit être appréciée au regard des circonstances.

La loi prévoit que l’employeur dispose d’un délai de 2 mois pour engager la procédure disciplinaire à compter du jour où il a eu connaissance du fait fautif (c. trav. art. L. 1332-4). 

En revanche, en cas de faute grave, les juges exigent traditionnellement de l'employeur qu’il engage la procédure de licenciement rapidement, ce afin de démontrer que la poursuite du contrat de travail a été rendue impossible, sans quoi la gravité des faits peut facilement être remise en cause.

Dans cette affaire, l’employeur avait mis près d’un mois pour engager la procédure sans mettre à pied à conservatoire le salarié : la cour d’appel reprochant à l’employeur ce délai écarta faute grave pour dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse.

La Cour de cassation casse cette décision retenant que :
 
  • le salarié était absent de l’entreprise. En effet le lendemain de la révélation des faits fautifs le salarié était en congé puis en arrêt de travail : 
« le fait pour l’employeur de laisser s’écouler un délai entre la révélation des faits et l’engagement de la procédure de licenciement ne peut avoir pour effet de retirer à la faute son caractère de gravité dès lors que le salarié, dont le contrat de travail est suspendu, est absent de l’entreprise. » 
 
  • la mise à pied à titre conservatoire ne constitue pas un préalable obligatoire à l’engagement d’une procédure de licenciement pour faute grave.

Déjà, dans un arrêt en date du 9 mars 2022, la Cour de cassation avait jugé que le fait pour l’employeur de laisser s’écouler un délai de quatre semaines entre la révélation des faits fautifs et l’engagement de la procédure de licenciement ne retirait pas à la faute son caractère de gravité dès lors que le salarié était en arrêt de travail (Cass. Soc., 9 mars 2022 n°20-20.872). 
Le présent arrêt vient confirmer cette jurisprudence.  

Retenons, qu’a contrario, laisser le salarié en poste et tarder dans la mise en œuvre de la procédure disciplinaire expose à ce que la faute grave soit écartée.

Si un délai est nécessaire avant d’engager la procédure de licenciement (investigations complémentaires, enquête…) et si le contrat du salarié n’est pas suspendu, la mise à pied à titre conservatoire s’impose pour être en cohérence avec la définition de la faute grave.
  

Cet article n'engage que ses auteurs.

Auteurs

Edith COLLOMB-LEFEVRE
Avocate Associée
Aguera Avocats
LYON (69)
Voir l'auteur Contacter l'auteur Tous les articles de l'auteur Site de l'auteur
Mathilde SCHOELER
Avocate
Aguera Avocats
LYON (69)
Voir l'auteur Contacter l'auteur Tous les articles de l'auteur Site de l'auteur

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