Loi industrie verte

La loi Industrie verte du 24 octobre 2023, vers une révolution administrative ?

Publié le : 27/11/2023 27 novembre nov. 11 2023

La loi n°2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte a été publié au Journal Officiel le 24 octobre dernier. Elle vise à engager la réindustrialisation du pays et ainsi permettre à la France « de se positionner comme le futur leader européen de l'industrie verte et le terreau des technologies vertes de demain", selon les mots de Bruno le Maire, Ministre de l’Economie.
Aux dires de la communication gouvernementale, la loi industrie verte entend répondre à un double objectif : environnemental (une baisse de 41 millions de tonnes d’équivalent CO2 est attendue d'ici 2030 grâce aux principales mesures qu’elle contient) et économique, en réponse notamment à l'Inflation Reduction Act américain. Pour cela, la loi prévoit une « révolution administrative », selon B. Le Maire, en prévoyant en particulier de diviser par deux le délai procédural nécessaire à l’implantation d’un site industriel, de 17 à 9 mois. 

De nombreuses mesures sont prévues, réparties autour de trois objectifs qui forment l’ossature de la loi : faciliter et accélérer les implantations industrielles et réhabiliter les friches ; favoriser les entreprises vertueuses dans la commande publique ; financer l’industrie verte. 

Voici une présentation de certaines d’entres elles. 

Faciliter et accélérer les implantations industrielles et réhabiliter les friches 

Cela passe tout d’abord par une « planification industrielle ». Les SRADDET permettront de définir une planification régionale par des « objectifs de développement industriel ». La planification sera également nationale, l’Etat élaborera une « stratégie nationale pour une industrie verte » pour la période 2023-2030 ». 

Afin de réduire le délai de délivrance des autorisations environnementales auxquelles sont soumis les projets de sites industriels (article L181-1 du Code de l’environnement), les consultations du public se feront en simultanéité de l’instruction des dossiers par l’administration (article 4 de la loi). C’est l’une des mesures phare de cette loi. 

Après l’échec des sites naturels de compensation, la loi industrie verte crée les « sites naturels de compensation, de restauration et de renaturation » (SNCRR). L’objectif est de faciliter la mise en œuvre des obligations de compensation lorsqu’il est porté atteinte à la biodiversité. La mutualisation des sites de compensation n'est plus obligatoire et les conditions de l'agrément sont simplifiées.

Puis, autre mesure phare, une procédure exceptionnelle est prévue pour les projets identifiés par décret comme « projet d’intérêt national majeur » lorsqu’ils revêtent une importance particulière pour la transition écologique ou la souveraineté nationale.

Si le projet identifié n’est pas compatible avec le SRADDET, le SCOT ou le PLU notamment, ces derniers devront être modifiés pour permettre la réalisation du projet, sous contrôle des autorités de l’Etat. Cette mesure a fait l’objet d’une vive opposition de la part des élus locaux, qui contestaient une mainmise des préfets sur les documents locaux d’urbanisme. L’Association des Maires de France (AMF) dénonçait une « recentralisation qui ne dit pas son nom » (communique de presse du 16 mai 2023). Un compromis a été trouvé et il est désormais prévu que cette procédure de mise en compatibilité ne pourra être engagé qu’après accord du maire de la commune concerné, de l’EPCI et de la région. En cas de contradiction entre la position régionale et locale, c’est la décision de la commune ou de l’EPCI qui primera (article 19). 

Favoriser les entreprises vertueuses dans la commande publique

La loi Industrie verte donne de la matière au mouvement de verdissement de la commande publique.  

L’article 25 de la loi habilite le gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance pour prévoir un nouveau dispositif d’exclusion facultative des procédures de passation des marchés publics et des contrats de concession qui concernera les entreprises ne respectant pas leurs obligations de publication d’informations en matière de durabilité issues de la directive (UE) n° 2022/2464.

Les acheteurs publics auront également la possibilité d’exclure des procédures de passation des contrats de la commande publique les entreprises ne satisfaisant pas à l’obligation d’établir leur bilan carbone (le BEGES prévue par l’article L. 229-25 du Code de l’environnement).

De plus, l’article 29 précise la définition de « l’offre économiquement la plus avantageuse ». Au-delà de la question du coût, elle « peut également être déterminée sur le fondement d'une pluralité de critères non discriminatoires et liés à l'objet du marché ou à ses conditions d'exécution, parmi lesquels figure le critère du prix ou du coût et un ou plusieurs autres critères comprenant des aspects qualitatifs, environnementaux ou sociaux » (nouvelle rédaction de l’article L2152-7 du Code de la Commande Publique). 

Financer l’industrie verte 

Enfin, la loi prévoit un ensemble de mesures destinées à financer ce mouvement de réindustrialisation, par la mobilisation de fonds publics et privés.  

L’épargne privée est concernée, par la création d’un nouveau "plan d'épargne avenir climat" (PEAC), destiné aux jeunes de moins de 21 ans (article 34 de la loi). 

Dans cette logique de financement, le projet de loi de finances pour 2024 met en place un crédit d'impôt "investissement industries vertes" (C3IV) pour attirer les investissements vers l'éolien, le photovoltaïque, les batteries et les pompes à chaleur.

Le paysage géographique et administratif français n’a pas fini de se transformer. 


Cet article a été rédigé par Julie Gervais de LAFOND, Étudiante alternante au sein du cabinet DROUINEAU 1927- Master 2 Droit public. Il n'engage que son auteur.

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