
Les dangers de la médiation dans les procédures d’appel, attention aux délais pour conclure
La médiation a le vent en poupe, tout le monde en parle, les institutions, qu'il s'agisse de la Chancellerie ou de nos instances professionnelles, invitent à y adhérer, à se former, et à l’utiliser.
Certains y voient une manière d’apaiser les conflits dans certains dossiers, d'autres, qui tentent de limiter le coût de la justice sur les Finances Publiques, y voient une manière de traiter des dossiers aux frais des justiciables.
Au-delà de ces débats, la médiation dans le contexte judiciaire ne répond pas moins à des exigences procédurales très strictes.
Lorsque la médiation est proposée dans le cadre d'une procédure d’appel, il ne faut pas oublier que la procédure d'appel ne tolère aucune erreur. Même sans grief, et donc « pardonnable », les erreurs sont souvent sanctionnée par le terme prématuré de la procédure.
Ainsi, si la médiation interrompt les délais, tel que cela est rappelé par l'article 910-2 du Code de Procédure Civile:
« La décision d'ordonner une médiation interrompt les délais impartis pour conclure et former appel incident mentionnés aux articles 905-2 et 908 à 910 du même code. L'interruption de ces délais produit ses effets jusqu'à l'expiration de la mission du médiateur ».
Cette interruption des délais ne peut se faire que sur une durée maximum de six mois tel que cela est prévu par l'article 131-3 du Code de Procédure Civile.
Article 131-3 du CPC :
« La durée initiale de la médiation ne peut excéder trois mois. Cette mission peut être renouvelée une fois, pour une même durée, à la demande du médiateur. »
La Cour d’appel de PAU dans un arrêt du 28 juin 2019, avait retenu que l'appelant qui n'a pas conclu dans le délai de trois mois suivant les six mois de la décision ordonnant la médiation encourt la caducité de son appel malgré la médiation toujours en cours et la non-fixation d'une audience de rappel du dossier pour examen de la situation.
La Cour de cassation vient de confirmer la Cour d’appel de PAU , dans un arrêt du 12 janvier 2023 (20.20941), dont la motivation est la suivante :
« 6. Selon l'article 910-2 du code de procédure civile, dans sa version issue du décret no 2017-891 du 6 mai 2017, la décision d'ordonner une médiation interrompt les délais impartis pour conclure et former appel incident mentionnés aux articles 905-2 et 908 à 910 du même code. L'interruption de ces délais produit ses effets jusqu'à l'expiration de la mission du médiateur.
7. Ayant constaté que la mission du médiateur avait pris fin le 20 février 2017, c'est à bon droit que l'arrêt retient, en substance, que ce terme marque la reprise de l'instance, que doit être décompté à partir de cette date le délai de trois mois imparti à l'appelant pour conclure et que l'appelante ajoute au texte de l'article 910-2 du code précité lorsqu'elle soutient que l'instance n'a pas repris au motif que le médiateur n'a pas remis de note de fin de médiation au juge et que l'affaire n'a pas été fixée à une audience de mise en état.
8. L'arrêt ajoute enfin que les pourparlers poursuivis de façon informelle ne
sont pas de nature à interrompre les délais pour conclure. »
Aussi, les praticiens veilleront à ne pas tomber dans le piège d’une médiation qui se prolonge. La suspension pour cause de médiation est d'une durée limitée.
Cet article n'engage que son auteur.
Auteur

MICHELOT Nicolas
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