Interdiction des règlements et virements en cours au moment du prononcé de la liquidation judiciaire : Quelle solution ?
Commentaire de l'arrêt Cass. com., 1er juillet 2021, n° 20-18.759, FS-B+R
Il y a comme un air de vacances qui souffle dans les voiles de la Cour de Cassation et ce n’est pas pour déplaire, en l’espèce, aux établissements de crédits qui profitent de cette douce brise pour aplanir un contentieux important : celui du sort des règlements postérieurs en cas de liquidation judiciaire.
Dans le cas d’espèce soumis à la Haute Cour, une société a été placée en liquidation judiciaire par jugement du 8 avril 2015. La banque de ladite société a donc procédé à la clôture du compte ouvert au sein de ses livres et a adressé le solde créditeur au liquidateur.
Or, ce liquidateur a assigné la même banque pour que soient déclarés inopposables à la procédure collective les paiements et encaissements effectués sur le compte de la société à compter de sa mise en liquidation judiciaire et ainsi obtenir une somme de 365 021,69 euros.
La cour d’appel de Paris a, par un arrêt du 9 juin 2020, donné raison au liquidateur. La banque a été condamnée à payer à la liquidation judiciaire la somme de 322 445,19 euros.
Sans grande surprise, l’établissement de crédit a donc formé un pourvoi en cassation.
L’argumentation soulevée par la banque est habile et séduisante.
En effet, elle soutient qu’un titre interbancaire de paiement (TIP) tout comme un ordre de virement s’analysent comme des ordres de paiements qui sont donc irrévocables et que leur bénéficiaire acquiert un droit définitif sur les fonds, dès que les ordres sont reçus par le prestataire de services de paiements (en l’occurrence, la banque).
Il découle de ce raisonnement que les virements et les TIP sont donc opposable à la procédure collective si l’ordre de paiement a été reçu par la banque avant le prononcé de la liquidation judiciaire.
La Haute Cour est conquise par ce raisonnement.
Elle rappelle d’une part que le jugement qui prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l’administration et de la disposition de ses biens et interdiction de tout règlement, les actes de disposition effectués postérieurement à ce jugement étant inopposables à la procédure collective.
D’autre part, elle énonce qu’il résulte de l’article L. 133-6 du Code monétaire et financier qu’une opération de paiement est autorisée si le payeur a donné son consentement à son exécution et qu’ainsi, l’émetteur d’un ordre de paiement dispose des fonds dès la date à laquelle il consent à cette opération.
La Cour de Cassation casse l’arrêt d’appel en considérant qu’en ayant statué en faveur du liquidateur, la Cour d’appel a violé les articles susvisés.
Cet arrêt est bienvenu en ce qu’il permet de préciser que seule la date à laquelle la banque du payeur a reçu l’ordre de virement du débiteur doit être prise en considération, et non celle de la réception des fonds par la banque du bénéficiaire.
Ainsi, avant de procéder au reversement des fonds au liquidateur, il est conseillé aux établissements de services de paiements de vérifier, au préalable, si les ordres de paiement ont été reçus avant le prononcé de la liquidation judiciaire qui intervient, pour rappel, rétroactivement à minuit, lorsque la décision est rendue.
Cet article n'engage que son auteur.
Auteur
Maxime HARDOUIN
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