Le rapport Propositions pour un contentieux des autorisations d'urbanisme plus rapide et plus efficace : une belle lecture d'été
Publié le :
13/08/2018
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août
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2018
Il est de coutume, au seuil des vacances, d’emporter avec soi de belles lectures d'été pour, sur la plage à la campagne ou en montagne, ouvrir son esprit et vagabonder dans des zones intellectuelles peu fréquentées au cours de l'année.
Me pardonnera-t-on, cette année, de vous suggérer l’une de ces belles lectures ?
Il existe en effet un texte particulièrement instructif et remarquablement bien rédigé, que l'on ne peut que recommander au cours de cet été, et il s'agit des propositions pour un contentieux des autorisations d'urbanisme plus rapide et plus efficace.
Certes me direz-vous, du droit encore du droit !
Oui, mais pas seulement vous répondrai-je.
Car il s'agit bien, à chacun de ces rapports sur cette matière, d'une approche sociale et pourquoi pas sociétale du contentieux.
On rappellera, tout comme le fait le rapport, que ces propositions, issues du travail d'un groupe de réflexions, au terme d'une mission confiée le 9 août 2017, fait suite depuis plus de 20 ans à de nombreux autres rapports.
Le contentieux du droit d'urbanisme a toujours suscité l'intérêt du législateur et du pouvoir réglementaire dans une recherche constante d'une sécurité juridique accrue des autorisations d'urbanisme.
Le praticien pour les collectivités et promoteurs que je suis ne peux qu'abonder dans ce sens.
Les autorisations d'urbanisme sont bien souvent solides car menées au terme d'une analyse approfondie par les collectivités de manière très professionnelle et très sûre.
Cela n'interdit pas les recours et la plupart sont largement abusifs.
Le rapport du conseil d'État de 1992 « urbanisme pour un droit plus efficace », il y a plus de 25 ans, réfléchissait déjà au moyen de sécuriser les autorisations d'urbanisme.
Puis ce fut celui de Philippe Pelletier, « propositions pour une meilleure sécurité juridique des autorisations d'urbanisme » remis en janvier 2005.
Et bien évidemment le travail de la commission du président Labetoulle en 2013 « construction et droit au recours : pour un meilleur équilibre. »
Ces rapports ont à chaque fois inspiré des modifications du code de l'urbanisme qui sont allées jusqu'à une modification du code de justice administrative.
Parmi ces modifications, je rappelle celle qui est relative à la cristallisation des moyens.
Figurant initialement à l'article R600-4 du code de l'urbanisme, elle a été étendue par l'article R6 111 -7-1 du code de justice administrative à l'ensemble de la procédure administrative contentieuse.
C'est peu de dire combien le droit de l'urbanisme est inspirant et a donné au juge ainsi qu’au législateur et au pouvoir réglementaire de nombreuses occasions de faire évoluer le droit, et notamment la procédure administrative contentieuse.
Il n'est pas question à la faveur de ce court article de détailler ces propositions.
Je retiens cependant la volonté de faire du référé un véritable outil de régulation du contentieux d'une part et d'accroître la stabilité juridique des constructions achevées d'autre part.
Ce sont là deux mesures parmi les nombreuses mesures proposées qui me semblent tout à fait intéressantes.
Les mesures 5 à 7 sont en effet les suivantes : limiter le référé suspension dans le temps en ne l'autorisant que pendant un délai suivant la requête au fond.Pour l'application de l'article L521-1 du code de justice administrative, inscrire dans la loi une présomption d'urgence dès l'octroi de l'autorisation. Imposer, à peine de désistement d'office, la confirmation du maintien du recours au fond en cas de rejet de la demande de suspension, pour défaut de moyens de nature à créer un doute sérieux.
Voici des propositions absolument intéressantes, et que nous voudrions voir complétée par la possibilité pour le porteur du projet de susciter une réponse du juge administratif très rapidement.
Ainsi, l'on ne peut dans le référée suspension que se défendre.
Nous n'avons pas encore la possibilité d'agir pour provoquer une décision du juge nonobstant l'inertie du requérant qui, pour bloquer le projet, n'a pas toujours intérêt à agir vite en référé.
Cependant, les mesures proposées sont déjà particulièrement significatives et donneraient la possibilité, si on la lie avec une pratique dynamique des amendes pour recours abusif, aux promoteurs et porteurs de projets d'aller dans une sécurité accrue de leur projet vers une construction beaucoup plus rapide et beaucoup plus stable.
Car c'est là l'un des autres sujets brillamment abordés par ce rapport, à savoir la volonté de donner aux constructions achevées une véritable stabilité juridique.
Cela passe par plusieurs mesures allant de la clarification des règles de la prescription administrative à l'action en démolition conférée au préfet, en passant par la limitation à six mois du délai de contestation des constructions achevées.
Ce dernier point est particulièrement intéressant car extrêmement pragmatique.
Il propose la modification de l'article R600 – 3 du code de l'urbanisme introduit par le décret numéro 2007 – 18 du 5 janvier 2007.
Ce texte interdit, dans le temps, de contester une construction achevée.
Bien souvent, des propriétaires non avisés omettent d'apporter la preuve de l'affichage régulier de leur autorisation.
Il y a donc là une possibilité d'action contre le permis de construire accordé à une construction désormais achevée.
Certes, l’on sait que les possibilités de démolition sont réduites, mais il existe ainsi une incertitude sur la construction achevée que le groupe de travail propose de régler de manière particulièrement intelligente à mon sens en indiquant qu'aucune action en vue de l'annulation d'un permis de construire ou d'aménager ou d'une décision de non opposition à déclaration préalable n'est recevable à l'expiration d'un délai de six mois à compter de l'achèvement de la construction ou de l'aménagement.
Voilà, de manière extrêmement pragmatique, la possibilité d'une stabilisation de la construction achevée.
Enfin, et ce n’est pas le moindre des apports de ce texte, est proposée une série de mesures pour sanctionner plus efficacement les recours abusifs.
Il est temps en effet que l'on aboutisse sur ce sujet.
L'article 600 – 7 du code de l'urbanisme permet au juge administratif de condamner l'auteur d'un recours à allouer des dommages et intérêts au bénéficiaire du permis.
Les auteurs du recours, là encore de manière très pragmatique, et l'on y décèle la présence d'avocats praticiens du droit urbanisme, proposent donc d’indiquer que lorsque le droit de former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire est mis en œuvre dans des conditions qui traduisent un comportement déloyal de la part du requérant et qui causent un préjudice au bénéficiaire de permis, (avec suppression de la mention « excessif », et tout recours cause donc un préjudice…) celui-ci peut demander par un mémoire distinct au juge administratif saisi du recours de l'auteur, de condamner ce dernier au paiement de dommages-intérêts.
Pour amender une telle action, et de manière je pense regrettable, les auteurs précisent que toute association de protection de l'environnement agréée serait présumée ne pas adopter de comportement déloyal, ce qui est faire crédit à ces dernières d’une hauteur de vue et d'une impartialité peu compatibles avec l’objet même de leur existence.
À l'issue de cette lecture, on ressort ragaillardi, et convaincu qu’enfin en France, l'objectif de la production de plusieurs centaines de milliers de logements chaque année pourra bientôt voir le jour.
La présence d'avocats dans le groupe de travails était indispensable.
Elle l’est au quotidien auprès des collectivités et porteurs de projets pour sécuriser davantage leur travaux et permettre que dans notre pays, chacun puisse être rapidement et dignement logé : c'est une cause nationale.
Cet article n'engage que son auteur.
Auteur
DROUINEAU Thomas
Avocat
1927 AVOCATS - Poitiers
POITIERS (86)
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