Divorce et liquidation judiciaire

Liquidation judiciaire et divorce du débiteur : le liquidateur doit contester la prestation compensatoire par voie de tierce opposition au jugement de divorce

Publié le : 03/01/2022 03 janvier janv. 01 2022

En l’espèce, deux époux mariés sous le régime de la séparation de biens ont acquis en indivision un immeuble. L’un des époux a fait l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire et, par la suite, a divorcé. 
Or, le jugement de divorce a accordé à l’ex-épouse une prestation compensatoire en capital de 95.000 €, sous la forme de l’abandon par le mari de sa part indivise dans l’immeuble acquis conjointement.
Cependant, le liquidateur n’était pas partie à cette instance.

Le liquidateur entendait rendre inopposable à la procédure l’abandon du bien personnel du débiteur.
Dans ces conditions, le liquidateur a assigné l’ex-épouse pour obtenir le partage de l’indivision et préalablement, la vente aux enchères de l’immeuble indivis en faisant valoir que les dispositions patrimoniales du jugement de divorce étaient inopposables à la procédure collective.

Un premier jugement, confirmé par un arrêt d’appel, fait droit à la demande du liquidateur. L’ex-épouse forme donc un pourvoi en cassation.

La Cour de cassation quant à elle, casse l’arrêt d’appel et rappelle que « le dessaisissement ne concernant que l’administration et la disposition des biens du débiteur liquidation judiciaire, ce dernier a qualité pour intenter seule une action en divorce ou y défendre, cette action, attaché à sa personne, incluant alors la fixation de la prestation compensatoire mise à sa charge ». Autrement dit, l’absence du liquidateur à l’instance de divorce ne rend pas les dispositions patrimoniales de la séparation inopposables à la procédure collective.

Elle ajoute, au grand dam du liquidateur, que ce dernier, « qui entend rendre inopposable à la procédure l’abandon, à titre de prestation compensatoire, d’un bien personnel du débiteur marié sous le régime de la séparation des biens qui a été décidés par le juge du divorce, doit exercer une tierce opposition contre cette disposition du jugement de divorce. »

Cette solution de la Cour de cassation n’est pas sans rappeler celle qu’elle avait jugée, le 16 janvier 2019 au cours de laquelle la Haute Cour avait également retenu que l’action en divorce ou en défense, est attachée à la personne du débiteur tout en précisant néanmoins que cette action était sans préjudice de l’exercice par le liquidateur d’une tierce opposition contre la disposition du jugement de divorce que le liquidateur souhaitait rendre inopposable à la procédure collective (Cass. Com., 16 janvier 2019 n°17-16.334).

Ainsi, en cas de divorce, dès lors que les dispositions du jugement de divorce sont susceptibles d’avoir un impact sur la masse active et/ou passive du débiteur divorcé, il nous semble que le liquidateur doit exercer une tierce opposition au jugement divorce.

En effet, d’une part, le liquidateur doit s’assurer de la défense de l’intérêt collectif des créanciers. Cela suppose donc d’agir, par la voie de la tierce opposition, contre la disposition du jugement prévoyant l’abandon, à titre de prestation compensatoire, d’un bien personnel du débiteur.

Il importe de préciser que cette tierce opposition peut être régularisée pendant 30 ans à compter du jugement, si et seulement si toutefois, le jugement n’a pas été notifié au liquidateur, auquel cas, le délai est de deux mois suivant la notification.

D’autre part, il nous semble que si une telle action pouvait être intentée par le liquidateur, l’inertie de ce dernier, pourrait entraîner sa responsabilité dès lors que son inaction aurait causé un appauvrissement de l’actif réalisable (ou une augmentation du passif) et donc un préjudice à la collectivité des créanciers.


Cass. Com. 20 octobre 2021, n°20-10.710


Cet article n'engage que son auteur.
 

Auteur

Maxime HARDOUIN

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