Loi Pinel: des changements majeurs en matière de baux commerciaux
Publié le :
30/07/2014
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La loi du 17 juin 2014 réformant le droit des baux commerciaux a été publiée le 19 juin dernier. Elle sonne sans doute le glas des belles années pour les bailleurs. Un certain nombre de modifications doivent être considérées comme majeures.Voici les principales modifications de législation :
Résiliation triennale par le bailleur
Il n’est désormais plus possible de prévoir dans le bail l’impossibilité pour le preneur de donner congé à l’expiration des périodes triennales.
Souvent, pour des raisons d’investissement, le bailleur souhaitait contraindre son locataire à rester dans les lieux six ans, voir neuf ans, en le privant des facultés de donner congé à l’expiration des périodes triennales.
Cette faculté est abrogée.
Sauf les baux d’une durée supérieure à neuf ans, les baux de locaux monovalents, les baux à usage exclusif du bureau peuvent prévoir des dispositions permettant de limiter les congés à l’issue des périodes triennales.
Durée des baux dérogatoires
L’article L.145-5 du Code de Commerce permettait aux parties de déroger aux statuts des baux commerciaux en concluant des contrats de baux dont la durée totale ne pouvait être supérieure à deux ans.
Si à l’expiration de cette durée le preneur restait en possession des locaux, il s’opérait un nouveau bail soumis aux statuts des baux commerciaux.
Désormais, la durée du bail dérogatoire ne peut excéder trois ans.
A l’issue de cette période de trois ans, les parties ne peuvent plus conclure un nouveau bail dérogatoire pour exploiter le même fond.
A l’expiration de la durée du bail (au maximum trois ans), au plus tard à l’issue d’un délai d’un mois à compter de l’échéance, le preneur qui reste où est laissé en possession bénéficie d’un nouveau bail soumis aux statuts des baux commerciaux.
Allégement des formalités
Désormais, les congés peuvent être donnés par lettre recommandée avec accusé de réception ou par acte extrajudiciaire.
La lettre recommandée avec accusé de réception est donc admise et entraîne la modification de l’article L.145-9 du Code de Commerce.
Seule la demande de renouvellement qui émane du Locataire doit être adressée par acte extrajudiciaire.
Prescription
L’article L.145-15 du Code de Commerce a été modifié.
Les clauses contraires à l’ordre publique visées par cet article ne sont plus nulles et de nul effet, mais sont désormais réputées non écrites.
Cela permet de les contester de manière perpétuelle sans être soumis au délai de prescription des nullités.
Réforme de la règle du déplafonnement du loyer (article L.145-34 du Code de Commerce)
Cette réforme est centrale.
En cas de modification notable des éléments mentionnés à l’article L.145-33, à savoir :
- changement de destination,
- changement des obligations respectives des parties,
- changement des caractéristiques du local,
- changement de facteurs locaux de commercialité,
Désormais, ce déplafonnement du loyer à la valeur locative, si cette valeur locative est à la hausse ne peut entraîner des augmentations supérieures pour une année à 10% du loyer acquitté au cours de l’année précédente (cet article mal rédigé risque d’entraîner un certain nombre de contentieux).
Cette règle s’applique également aux baux qui ont une durée supérieure à neuf ans.
L’article L.145-34 tente également de régler le montant de la variation du loyer lorsque le bail se poursuit par l’effet d’une tacite prolongation à l’issue de la durée de neuf ans sans excéder douze ans.
La variation doit être calculée à partir du dernier indice publié et connu pour une période d’une durée égale à celle qui s’est écoulée entre la date initiale du bail et la date de son renouvellement effectif (cet article paraît également mal rédigé et est susceptible de plusieurs interprétations…).
Il faut également comprendre à la lecture de nouvel article L.145-34 que pour les baux qui se poursuivent par l’effet d’une tacite prolongation au-delà de la période de douze ans, le déplafonnement du loyer à la hausse n’est pas limité à 10% du loyer acquitté au cours de l’année précédente.
Cet article consacre également l’indice trimestriel des loyers commerciaux au détriment de l’indice du coût de la construction.
Seul l’indice des loyers commerciaux et l’indice des loyers des activités tertiaires sont applicables pour déterminer la hausse du loyer.
Il faut donc en conclure que l’article L.112-2 du Code Monétaire et Financier n’ayant pas été modifié par la loi PINEL, l’indice du coût de la construction demeure licite dans le cadre des clauses d’échelle mobile, c’est-à-dire dans le cadre des indexations.
Il convient de préciser que le déplafonnement prévu à l’article L.145-39 du Code de Commerce qui intervient lorsque le loyer se trouve augmenté ou diminué de plus d’un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement dans le cadre d’une révision et lorsque le bail est assorti d’une clause d’échelle mobile voir également sa variation limitée à 10 % du loyer acquitté au cours de l’année précédente.
Exigence d’un état des lieux
La loi PINEL a introduit un nouvel article L.145-40-1 du Code de Commerce (texte d’ordre public).
A chaque prise de possession par un locataire et lors de la restitution des locaux, un état des lieux doit être établi contradictoirement et amiablement par les parties par un tiers mandaté par elle et joint au contrat de location.
Si le bailleur ne fait pas diligences, il ne peut pas bénéficier de la présomption prévue à l’article 1731 du Code Civil qui prévoit qu’en cas d’absence d’état des lieux, le local est présumé avoir été donné en bon état.
Cet article s’applique à toutes prises de possession d’un local intervenant à compter de l’entrée en vigueur de la loi, soit le 1er septembre 2014.
Introduction d’un mode de répartition des charges.
Il s’agit d’une modification spectaculaire prévue par la loi PINEL par la création de l’article L.145-40-2 du Code de Commerce qui est d’ordre public.
Tout contrat de location doit comporter un inventaire précis et limitatif des catégories de charges et d’impôts liés au bail comportant l’indication de leur répartition entre le bailleur et le locataire.
Cet inventaire doit donner lieu à un état récapitulatif annuel.
Le contrat de location doit également comporter un budget prévisionnel des travaux devant intervenir jusqu’à la première échéance triennale.
Un tel document doit être fourni par le bailleur à chaque échéance triennale du bail.
Cet article est applicable aux contrats conclus à compter du 1er septembre 2014 ou renouvelés à compter de cette date.
Cet article va mettre fin à l’habitude des bailleurs consistant à transférer l’ensemble des charges aux locataires, même si la jurisprudence au fil des années est devenue de plus en plus restrictive dans l’appréciation des clauses de transfert de charges.
Cet article d’ordre public qui entre en vigueur le 1er septembre 2014 ainsi qu’à tous les contrats renouvelés est susceptible de modifier l’équilibre financier des contrats.
Un décret à paraître devrait préciser l’inventaire des catégories de charges.
Introduction d’un droit de préférence
Le texte de la loi PINEL introduit un nouvel article d’ordre public L.145-46-1 du Code de Commerce qui instaure un droit de préférence au profit du locataire en cas de vente des murs commerciaux.
Le locataire doit être averti par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise en mains propres en indiquant le prix et les conditions de la vente envisagée.
Le locataire dispose d’un délai d’un mois pour se prononcer et en cas d’acceptation, d’un délai de deux mois pour réaliser la vente, sauf recours à un prêt portant le délai de réalisation à 4 mois.
L’ensemble du texte entre en vigueur le 1er septembre 2014, mais ses nouvelles dispositions diffèrent en fonction de la nature de la modification à venir.
Les nouvelles règles applicables à l’encadrement des hausses de loyer, à l’établissement de l’état des lieux et à l’augmentation de la durée maximale du bail précaire entrent en vigueur à compter du 1er septembre 2014.
Les règles applicables au droit de préférence par le bailleur seront pour leurs parts applicables à compter du 1er décembre 2014 mais ces dispositions ne sont pas d’ordre public.
Cet article n'engage que son auteur.
Crédit photo : © herreneck - Fotolia.com
Auteur
MEDINA Jean-Luc
Avocat Associé
CDMF avocats , Membres du conseil d'administration
GRENOBLE (38)
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