Syndicat de copropriétaires et troubles anormaux du voisinage

Syndicat de copropriétaires et troubles anormaux du voisinage

Publié le : 11/10/2017 11 octobre oct. 10 2017

Dans un arrêt du 11 mai 2017, la Cour de cassation rend un arrêt de principe,  en reprochant à la Cour d’Appel d’avoir rejeté l’action « alors qu’un Syndicat des Copropriétaires peut agir à l’encontre d’un copropriétaire sur le fondement d’un trouble anormal du voisinage… »

La notion de trouble anormal de voisinage n’a pas été directement créée par la loi.
 
Ce sont les Tribunaux qui ont institué cet adage suivant lequel « nul ne doit causer à autrui aucun trouble anormal de voisinage».
 
Cette notion trouve toutefois une base légale dans l’article 544 du Code Civil relatif au respect de la propriété privée.
 
En justice, l’avantage de cette notion de trouble anormal de voisinage vient de ce que le voisin victime (le propriétaire, un copropriétaire, voire un locataire) n’a pas besoin de démontrer la faute du voisin auteur du trouble.
 
La responsabilité de ce dernier est une responsabilité de plein droit dont il ne peut pas se dégager en prouvant qu’il n’a commis aucune faute. (cass.3°civ 4/02/1971)
 

En matière de copropriété :

 
Ce principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage s’applique notamment à tous les occupants d’un immeuble en copropriété quel que soit leur titre d’occupation.
 
La Cour de cassation a ainsi admis que le syndicat des copropriétaires pouvait être poursuivi à ce titre pour les troubles émanant de la copropriété,  (Cass. 3e civ. 12-2-1992 n° 89-19.297 P : Bull. civ. II n° 44 ; Cass. 3e 11-5-2000 n° 98-18.249 FS-PB : RJDA 11/00 n° 1061).
 
Inversement, le syndicat peut invoquer ce principe pour agir en réparation contre un tiers voisin auteur d’un trouble de voisinage subi collectivement par les copropriétaires (Cass. 3e civ. 10-10-1984 n° 83-14.811 : Bull. civ. III n° 165 ; Cass. 3e civ. 6-3-1991 n° 88-16.770).
 

Mais jusqu’à présent, la Cour de cassation n’avait pas évoqué le cas du syndicat des copropriétaires qui agissait contre un copropriétaire, auteur du trouble.

 
Elle vient de statuer par un arrêt du 11 mai 2017 (Cass. 3° ci.n°16-14339 publié au Bulletin)
 
En l’espèce, le parking d’un immeuble soumis au régime de la copropriété subissait des infiltrations dont l’origine, après expertise, résultait de travaux effectués par un copropriétaire dont le lot surplombait ledit parking sinistré.
 
La question juridique posée était de savoir si l’action du Syndicat des Copropriétaires contre ce copropriétaire devait être basée sur les dispositions de la loi du 10 juillet 1965 relatives au statut de copropriété, ou sur le régime jurisprudentiel de la responsabilité pour trouble anormal de voisinage.
 
La Cour d’Appel avait considéré que le Syndicat des Copropriétaires était irrecevable à agir sur le fondement de la notion de trouble anormal de voisinage et aurait dû fonder son action sur les dispositions de la loi du 10 juillet 1965.
 
En effet cette loi contient notamment les articles suivants :
 
  • L’article 9 alinéa 1er qui précise que « chaque copropriétaire dispose des parties privatives comprises dans son lot ; il use et jouit librement des parties privatives et des parties communes sous la condition de ne porter atteinte ni aux droits des autres copropriétaires ni à la destination de l’immeuble ».
 
  • L’article 14 de cette loi précise : « la collectivité des copropriétaires est constituée en un Syndicat qui a la personnalité civile…Il a pour objet la conservation de l’immeuble et l’administration des parties communes. Il est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers par le vice de construction ou le défaut d’entretien des parties communes… ».
 
Ainsi, dès lors que cette loi contient, en ses articles 9 et 14, la notion d’atteinte au droit des autres copropriétaires et/ou à la destination de l’immeuble, la question se posait de savoir si cela n’excluait pas la possibilité de fonder une action en responsabilité contre un copropriétaire sur la notion jurisprudentielle de trouble anormal de voisinage.
 
Le Syndicat des Copropriétaires considérant toutefois qu’il pouvait agir sur le fondement du trouble anormal de voisinage avait formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt.
 
La Cour de Cassation rend manifestement un arrêt de principe ce 11 mai 2017 en reprochant à la Cour d’Appel d’avoir rejeté l’action « alors qu’un Syndicat des Copropriétaires peut agir à l’encontre d’un copropriétaire sur le fondement d’un trouble anormal du voisinage… »
 
Cette position de la Cour de Cassation facilite l’action du Syndicat des Copropriétaires contre des copropriétaires auteurs de troubles puisqu’il ne sera pas nécessaire, comme il a été vu ci-dessus, de démontrer une faute à leur encontre, la seule nécessité étant de démontrer l’existence d’un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage.
 
 
Cet article n'engage que ses auteurs.


Crédit photo : © Wild Orchid - Fotolia.com
 

Auteurs

DRUJON d'ASTROS Constance
Avocate Associée
SCP DRUJON d'ASTROS & ASSOCIES
AIX-EN-PROVENCE (13)
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DRUJON D'ASTROS Jean-Rémy

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