Sans autorisation domaniale : les ouvrages de défense contre la mer tombent à l’eau
Publié le :
31/05/2024
31
mai
mai
05
2024
Le récent jugement du Tribunal administratif de Rennes rappelle l’importance d’une gestion commune et mutualisée du recul du trait de côte. Il ne sert à rien de lutter seul contre l’avancée de la mer, et encore moins sans autorisation.De manière classique, nul ne peut, sans disposer d'un titre l'y habilitant, occuper une dépendance du domaine public (articles L2122-1 du CG3P et suivants).
Or, le domaine public maritime comprend notamment le rivage de la mer, c’est à dire tout ce qu’elle couvre et découvre en l’absence de perturbations météorologiques exceptionnelles (Article L2111-4 du CG3P).
Vous l’aurez compris, le domaine public maritime s’étend en même temps que l’eau monte.
Dans cette affaire, en vertu d’une autorisation d’urbanisme délivrée, un concarnois a érigé un mur de soutènement de 34 mètres de long et de 3 mètres de haut devant sa propriété afin de lutter contre l’érosion.
En revanche, ces travaux, pour partie édifiés sur l’emprise du domaine public maritime, ont été exécutés sans autorisation d’occupation de ce domaine public.
Le Tribunal rappelle donc naturellement que : « une autorisation d’urbanisme ne vaut pas autorisation d’occupation du domaine public maritime, alors même que les plans de la déclaration préalable laissaient suggérer que le pied du mur serait en-dessous du niveau 0 ».
Par conséquent, cette occupation du domaine public, sans autorisation préalable, est irrégulière et constitutive d’une contravention de grande voierie, et ce, même s’il s’agit d’un ouvrage de défense contre l’érosion dont l’intérêt général pourrait être défendu.
L’administré a été condamné par le Tribunal à régler une amende d’un montant de 1 000 euros et à démolir l’ouvrage.
Ce jugement ne va pas sans rappeler l’histoire de Benoît Bartherotte lequel a érigé et entretien depuis une quarantaine d'années un ouvrage exceptionnel de près de 450 mètres de long pour protéger la pointe du Cap-Ferret de l'érosion.
Néanmoins, cette lutte vaine a été rendue possible dès lors que l'État, après une première contestation, a finalement reconnu la digue d'utilité publique et a octroyé une autorisation d’occupation domaniale.
Finalement, l’édification d’un ouvrage de défense contre la mer nécessite une autorisation d’occupation du domaine public maritime lorsqu’elle prend appui, même pour partie, sur ce dernier.
De manière générale, l’édification de ce type d’ouvrage doit être le fruit d’une réflexion commune sur le long terme : il convient de garder à l’esprit qu’un ouvrage de protection peut également avoir des incidences négatives.
Les enjeux sont immenses, et nécessitent une approche partenariale entre l’État et les collectivités, dans une vision patrimoniale.
TA Rennes, 1er mars 2024, n° 2300342
Cet article n'engage que son auteur.
Auteur
Elorri DALLEMANE
Avocate
1927 AVOCATS - Poitiers
LA ROCHELLE (17)
Historique
-
Défense contre la mer et propriétaires privés : le recours possible aux Associations Syndicales Autorisées
Publié le : 13/06/2024 13 juin juin 06 2024Collectivités / Environnement / EnvironnementFace au recul du trait de côte, se pose la question de la mobilisation des propriétaires privés dans les opérations de défense contre la mer. Si certain...
-
Sans autorisation domaniale : les ouvrages de défense contre la mer tombent à l’eau
Publié le : 31/05/2024 31 mai mai 05 2024Collectivités / Environnement / EnvironnementLe récent jugement du Tribunal administratif de Rennes rappelle l’importance d’une gestion commune et mutualisée du recul du trait de côte. Il ne sert à ri...
-
L’éolien oui, mais pas quoiqu’il en coûte sur le plan écologique
Publié le : 14/05/2024 14 mai mai 05 2024Collectivités / Environnement / EnvironnementDans un arrêt du 18 avril 2024 n°471141 commune de Tardère et autres, le Conseil d’État est venu apporter une importante contribution à la démonstration de...
-
Décret n°2024-318 du 8 avril 2024 relatif au développement de l’agrivoltaïsme et aux conditions d’implantation des installations photovoltaïques sur des terrains agricoles, naturels ou forestiers : enfin du nouveau en matière d’agrivoltaïsme !
Publié le : 13/05/2024 13 mai mai 05 2024Collectivités / Environnement / EnvironnementL’agrivoltaïsme est un système créé en 1981. Notre territoire est en retard en matière de développement durable et l’agrivoltaïsme n’est apparu en France...
-
Recul du trait de côte : la liste des communes littorales menacées s’allonge
Publié le : 16/04/2024 16 avril avr. 04 2024Collectivités / Environnement / EnvironnementDans le contexte d’une juste agitation au sujet de l’érosion côtière, un projet de décret révisant la liste des communes dont la politique d’aménagement do...
-
Le manque de préparation des communes littorales françaises au recul du trait de côte
Publié le : 25/03/2024 25 mars mars 03 2024Collectivités / Environnement / EnvironnementLe 12 mars, à l’occasion de la publication de son rapport annuel pour l’année 2024, la Cour des comptes a formulé de vives critiques concernant la gestion...
-
Instruction du 14 décembre 2023 relative à la mise en œuvre du décret n°2021-795 du 23 juin 2021 et du décret n°2022-1078 du 29 juillet 2022 relatifs à la gestion quantitative de la ressource en eau : précisions sur ses modalités
Publié le : 26/02/2024 26 février févr. 02 2024Collectivités / Environnement / EnvironnementLe ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires est venu préciser les modalités de la gestion quantitative de la ressource en ea...