
Confinement et pertes d’exploitation: modus operandi destiné à vérifier la possibilité d’une couverture d’assurance...
Publié le :
05/06/2020
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A la crise sanitaire induite par la propagation du coronavirus, s’est rapidement ajoutée une crise économique : des centaines de milliers d’entreprises ont dû brutalement arrêter leur activité sur décision administrative et cela pendant une durée supérieure à deux mois …. Et l’effet domino généré par le confinement a touché, de façon systémique, un panel très large de secteurs d’activité économique….
Dans un tel contexte, l’assureur doit-il intervenir de façon systématique ? Une lecture attentive du contrat d’assurance s’impose car pandémie ne rime pas parfaitement avec assurabilité ....
Les pratiques du marché
Un très grand nombre de polices sur le marché français prévoient l’exclusion des pandémies.La raison en est simple: avant d’assurer un risque, il faut faire des estimations actuarielles, à partir de statistiques tirées du passé.
Or, les précédents se comptent sur les doigts d’une main : la grippe espagnole en 1919, puis la grippe asiatique en 1957, enfin la grippe de Hongkong en 1969) ; un passé qui se révèle être largement insuffisant pour les actuaires, d’autant que les épidémies de 1957 et de 1969 sont peu comparables avec celle de 1919.
Aussi, faut-il que le risque soit mutualisable; à défaut, l’assurabilité d’un tel risque est fortement compromise.
C’est pourquoi, les assureurs (et les réassureurs) ont jusqu’alors été peu enclins à garantir les conséquences des pandémies qui peuvent être planétaires et affecter toutes les populations, en un temps simultané.
Aucune véritable mutualisation des risques ne pouvant alors être envisagée...
Cette exclusion fait en quelque sorte écho, en son principe, à l’exclusion classique des dommages occasionnés soit par la guerre (civile ou étrangère) soit par les émeutes ou mouvements populaires, qui sont prises en charge exclusivement par l’Etat, sauf dispositions contraires dans la police (article L.121-8 du code des assurances).
Nous touchons là les limites de l’assurabilité.
Cependant, certains assureurs, dans le cadre de certaines polices à péril dénommé, ou encore dans le cadre de « polices tous risques sauf » acceptent, moyennant surprime, de délivrer une extension de garantie portant sur la perte de marge brute résultant d’une décision de fermeture administrative.Soulignons que cette réponse assurantielle ne se révélera souvent que partielle par rapport aux besoins de couverture des entreprises, et ceci pour trois raisons:
1) sur le marché français, à peine 50% des entreprises sont assurées en Perte d’exploitation.
2) rares sont les polices qui garantissent les pertes d’exploitation survenues en dehors de tout dommage matériel direct, c’est-à-dire en l’absence d’événement garanti (incendie, explosion, dégât des eaux...). On parle alors de « dommages immatériels non consécutifs à un événement garanti » ou encore de « dommages immatériels purs ».
3) les plafonds de garanties en matière de dommages immatériels purs sont souvent d’un montant faible.
A l’occasion de la crise sanitaire actuelle, une lecture attentive des contrats s’impose…
La démarche consiste à vérifier dans sa police s’il a été prévu une extension couvrant la perte de marge brute en cas de fermeture administrative.L’absence de cette extension de garantie, l’absence de garantie portant sur les dommages immatériels purs aura pour conséquence directe une non-prise en charge par l’assureur.
Mais si cette extension existe, il est impératif de vérifier :
- d’une part, si les pandémies ne figurent pas parmi les exclusions , au titre de cette extension de garantie,
- d’autre part, si cette exclusion répond, en sa formulation, aux exigences formelles de l’article L113-1 du code des assurances.
Il est donc impératif de lire ses conditions générales, ses conventions spéciales et particulières afin de vérifier, au cas par cas, l’existence ou non d’une garantie dommages immatériels purs, l’absence ou non d’une exclusion visant les pandémies.
En l’absence de garantie est-il raisonnable d’envisager la mise en cause de l’intermédiaire d’assurance qui a conseillé l’assuré lors de la souscription du contrat ?
Il faudrait alors prouver que cette extension existait bien à l’époque chez l’assureur, que la surprime correspondant à cette extension n’était pas dissuasive, pour le preneur d’assurance, bref, que l’intermédiaire, en ne la proposant pas, avait réellement fait perdre à l’assuré une chance d’être garanti en matière de dommages immatériels purs.…. et pour l’avenir ?
Quant à la solution pour l’avenir, celle-ci devrait passer par la mise en place d’un régime de catastrophe sanitaire qui pourrait s’inspirer du régime des catastrophes naturelles adopté dans le cadre de la loi du 13 juillet 1982, selon des modalités d’indemnisation des victimes inspirées du régime de catastrophes technologiques résultant de loi du 30 juillet 2003.En effet, un régime de solidarité nationale s’impose au regard des enjeux financiers en cause qui dépassent largement les capacités financières du secteur de l’assurance et nécessitent l’intervention de l’Etat.
Cet article n'engage que son auteur.
Auteur

LEDUCQ Xavier
Avocat Associé
CRTD & Associés 92, CRTD & Associés PARIS
PARIS (75)
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