Contentieux du droit d'auteur et compétence territoriale

Publié le : 11/03/2009 11 mars mars 03 2009

En matière de contrefaçon, l’auteur dispose d’une option de compétence : il peut assigner le contrefacteur au lieu de son domicile mais a également le choix entre la juridiction du lieu dommageable ou celle où le dommage a été subi.

Contrefaçon et compétence territorialePar jugement en date du 19 juin 2008, le Tribunal de Commerce de Paris s’est déclaré compétent pour connaître d’un litige contre une société de vente par correspondance ayant son siège dans le ressort du Tribunal de Commerce de Lille alors que les documents habituels de rattachement à la compétence parisienne n’étaient pas versés aux débats.

La société demanderesse, revendiquant des droits d’auteur sur un dessin, a assigné le vépéciste devant le Tribunal de Commerce de Paris, en se fondant sur la présence d’un produit contrefaisant dans un catalogue.

Même si cette société avait versé aux débats des extraits du site internet de la société défenderesse, imprimés à Paris, aucun constat d’huissier relatif à l’accessibilité de ce site depuis Paris n’avait été préalablement établi.

La motivation de cette exception d’incompétence par la société de vente par correspondance était donc classique : aucun fait de contrefaçon ne pouvait être rattaché au territoire parisien, la preuve d’un fait dommageable survenu à Paris n’était pas davantage rapportée.

La société TROUILLET affirmait quant à elle que la société de vente par correspondance commercialisait ses produits dans toute la France, sans qu’il soit besoin de produire un constat d’huissier.

La société TROUILLET apportait par ailleurs la preuve de ce que :
- aucune restriction en terme de lieu de livraison ne figurait sur le bon de commande inclus dans le catalogue versé aux débats;
- la société livrait ses marchandises dans toute la France métropolitaine (CGV) ;
- la société défenderesse disposait de points de livraison et de retrait des marchandises « relais colis » à Paris ;
- les catalogues du vépéciste sont distribués ou vendus à Paris.

La société TROUILLET s’est également prévalue de jurisprudences anciennes selon lesquelles, en matière de contrefaçon, le lieu du fait dommageable se situe en tous les lieux où le produit contrefait a été commercialisé (CA Paris 25 avril 1978, Gaz. Pal. 1978, 448) ou offert à la vente (CA Paris 15 juin 1982 : Gaz. Pal. 1982, 2, Somm. 378), ainsi que là où sont adressés les lettres ou catalogues comportant les éléments contestés (CA Paris 17 févr. 1988 : Dalloz 1989, Somm.275, Julien).

Le Tribunal de Commerce de Paris a retenu sa compétence en fondant sa décision sur les éléments suivants : « Attendu que selon l’article 46 du CPC, en matière délictuelle, le demandeur peut saisir à son choix la juridiction du lieu dommageable ou celle du ressort de laquelle le dommage a été subi,
Attendu qu’en matière de contrefaçon, il est de jurisprudence constante que le lieu du fait dommageable se situe en tous lieux où le produit contrefait a été commercialisé,
Attendu que ceci vaut aussi pour les lieux où sont adressés les lettres ou catalogues comportant les éléments contestés,
Attendu qu’il n’est pas sérieusement contestable, ni contesté par la société XXXX, que les produits vendus par elle par correspondance, le sont sur tout le territoire national et notamment à Paris,
Attendu que la société T…… rapporte la preuve de ce que la société XXXX dispose de point de livraison à Paris,
Attendu en outre, que le site internet www.xxxxxx.fr démontre qu’il s’agit d’un site en « .fr » accessible en France et par définition en tout lieu en France et notamment à Paris. »

La question se pose désormais de savoir si les Tribunaux de Grande Instance qui récupèrent le contentieux du droit d’auteur depuis la loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008, feront preuve d’autant de discernement. Nous les y engageons vivement, dans l’intérêt bien compris des sociétés victimes d’actes de contrefaçon.


Corinne CHAMPAGNER KATZ
Spécialiste en propriété intellectuelle
Avocat au Barreau de Paris

Et Charlotte GALICHET
Avocat au Barreau de Paris





Cet article n'engage que son auteur.

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