
Principe de précaution et antennes relais
Publié le :
20/02/2012
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2012
Pas de violation du principe de précaution en l'absence d'éléments circonstanciés faisant apparaître, en l'état des connaissances scientifiques, des risques mêmes incertains.
Pas de violation du principe de précaution: CE, 30 janvier 2012Arrêt du Conseil d’Etat du 30 janvier 2012, SOCIETE ORANGE France (req. n°344992)
Par cet arrêt, le Conseil d’Etat apporte des précisions sur les conditions d’opposabilité du principe de précaution, tel qu’il est énoncé à l’article 5 de la Charte de l’environnement.
En l’espèce, le maire de la commune de Noisy-le-Grand avait fait opposition à une déclaration préalable déposée par la société ORANGE France en vue de l’installation d’une antenne de téléphonie mobile et de baies techniques sur le territoire de la commune.
Le Tribunal administratif de Montreuil avait rejeté la demande de la société tendant à l’annulation de cet arrêté, par un jugement en date du 18 novembre 2010, en considérant que si le motif tiré de l’article R. 111-2 du Code de l’urbanisme ne pouvait légalement justifier la décision d’opposition, faute d’atteinte suffisamment certaine, en l’état des connaissances scientifiques, à la salubrité ou à la sécurité publiques, le motif tiré de l’article 5 de la Charte de l’environnement justifiait à lui seul l’arrêté attaqué.
Le Conseil d’Etat a censuré la position retenue par les premiers juges et a ainsi précisé les conditions d’application du principe de précaution.
Il a ainsi statué : « que s'il appartient, dès lors, à l'autorité administrative compétente de prendre en compte le principe de précaution lorsqu'elle se prononce sur l'octroi d'une autorisation délivrée en application de la législation sur l'urbanisme, les dispositions de l'article 5 de la Charte de l'environnement ne permettent pas, indépendamment des procédures d'évaluation des risques et des mesures provisoires et proportionnées susceptibles, le cas échéant, d'être mises en œuvre par les autres autorités publiques dans leur domaine de compétence, de refuser légalement la délivrance d'une autorisation d'urbanisme en l'absence d'éléments circonstanciés faisant apparaître, en l'état des connaissances scientifiques, des risques, même incertains, de nature à justifier un tel refus. »
La haute juridiction a considéré que le principe de précaution ne permet pas à une autorité administrative de prononcer légalement une opposition à une déclaration préalable sans avoir préalablement recherché l’existence d’éléments circonstanciés faisant apparaître des risques même incertains. La seule référence au principe de précaution et aux risques incertains, sans élément circonstancié, ne justifie donc pas un refus de délivrance d’une autorisation d’urbanisme.
Dans cette affaire, le Conseil d’Etat a constaté qu’au vu des pièces versées au dossier il n’existe aucun élément circonstancié de nature à établir l'existence, en l'état des connaissances scientifiques, d'un risque pouvant résulter, pour le public, de son exposition aux champs électromagnétiques émis par les antennes relais de téléphonie mobile.
La position retenue par la haute juridiction a été confirmée dans un autre arrêt rendu le même jour par le Conseil d’Etat (req. n°344993).
La haute juridiction avait déjà été amenée à se prononcer sur l’application du principe de précaution en matière d’autorisation d’urbanisme (CE 19 juillet 2010, req. n°328687).
Elle avait ainsi statué que le principe de précaution devait être pris en compte lorsqu’une autorité administrative se prononçait sur l'octroi d'une autorisation délivrée en application de la législation sur l'urbanisme, reconnaissant ainsi que l'article 5 de la charte de l'environnement était directement opposable aux autorisations d'urbanisme.
Désormais, en application de cette nouvelle jurisprudence, cette simple « prise en compte » ne sera plus suffisante.
L’autorité administrative devra rechercher, au vu des pièces du dossier et en l’état des connaissances scientifiques, s’il existe des éléments circonstanciés faisant apparaître des risques, mêmes incertains, de nature à justifier un refus de délivrance d’une autorisation d’urbanisme.
Cette jurisprudence est enfin également intéressante en ce qu’elle précise le pouvoir d’appréciation du juge administratif en matière d’application du principe de précaution. Son contrôle semble en la matière ainsi renforcé.
Cet article n'engage que son auteur.
Crédit photo : Par cet arrêt, le Conseil d’Etat apporte des précisions sur les conditions d’opposabilité du principe de précaution, tel qu’il est énoncé à l’article 5 de la Charte de l’environnement. © MyTrainArt - Fotolia.com
Auteur

Jean-Philippe RUFFIE
Avocat Associé
Cabinet LEXIA, Membres du conseil d'administration
BORDEAUX (33)
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