
Sur la prise illégale d'intérêts
Publié le :
03/07/2014
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Les dernières lois récentes rendues à la fin de l’année 2013 sont venues durcir la notion de conflit d’intérêts.C’est le cas de l’article 2 de la Loi n°2013-907 du 11 octobre 2013 qui est venue dire du conflit d’intérêts qu’il est constitué par toute situation d’interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés, situation qui est de nature à influencer ou à paraitre influencer l’exercice indépendant, impartial et objectif d’une fonction.
Cette Loi du 11 octobre 2007 a été suivie par la Loi n°2013-1117 du 6 décembre 2013 qui, en son article 6, a complété la rédaction de l’article 432-12 sur la prise illégale d’intérêts.
Pour mémoire, je rappelle que l’article 432-12 définit la prise légale d’intérêts comme le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public ou par une personne investie d'un mandat électif public, de prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt quelconque dans une entreprise ou dans une opération dont elle a, au moment de l'acte, en tout ou partie, la charge d'assurer la surveillance, l'administration, la liquidation ou le paiement.
Cette infraction est punie de cinq ans d'emprisonnement et d'une amende de 500 000 €.
La jurisprudence rendue depuis une dizaine d’années est venue par petites touches préciser ce qu’il fallait comprendre de cet article avant sa nouvelle rédaction par la Loi de décembre 2013.
La prise directe d’intérêts se conçoit lorsque l’élu prend part à la délibération de la collectivité dans laquelle il siège attribuant un marché à la société dont il est le dirigeant.
Il en est de même pour un Maire qui propose le choix d’une société dans laquelle il travaille.
Mais de tels exemples, particulièrement spectaculaires ou grossiers, ne sont pas les plus courants.
La jurisprudence est venue de manière beaucoup plus subtile décrire la prise légale d’intérêts dans des actes indirects, par personne interposée.
Est ainsi sanctionné l’élu ayant participé à une délibération mais également celui qui a un simple pouvoir d’émettre un avis en vue d’une décision prise par d’autres.
La Cour de Cassation juge ainsi depuis un arrêt du 9 mars 2005, numéro 04-83615.
Il est de même jugé que la collégialité de la décision ne change rien dans la déclaration de responsabilité.
Voyez Cour de Cassation, Chambre criminelle, 25 janvier 2006. N°05-84.782.
Et plus encore, il est jugé que la participation des élus n’est pas nécessaire pour que soit constituée la prise illégale d’intérêts, seule comptant la fonction de l’élu.
Voyez Cour de Cassation, Chambre criminelle, 19 novembre 2003, n°02-87336 ou encore 9 février 2005, n°03.85697.
Un intérêt patrimonial, même minoritaire et par personne interposée en vue de liens de famille notamment, suffira à caractériser la prise illégale d’intérêts pour l’élu qui aura participé à la délibération ou qui, sans voter, aura eu une influence sur la décision.
C’est à l’aune de ces observations et de la réécriture récente de l’article 432-12 du Code pénal, qu’on ne peut que conseiller aux élus, nouvellement élus notamment, de s’attacher les services d’un avocat spécialisé en droit public pour analyser tel ou tel projet de décision ou de signature avant de prendre quelques risques que ce soit.
Cet article n'engage que son auteur.
Crédit photo : © Gina Sanders - Fotolia.com
Auteur

DROUINEAU Thomas
Avocat
1927 AVOCATS - Poitiers
Saint-Benoît (86)
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