Bail commercial et dépôt de garantie

Bail commercial : la fin de la confiscation automatique du dépôt de garantie

Publié le : 02/12/2025 02 décembre déc. 12 2025

La question de la qualification juridique de la clause permettant au bailleur de conserver le dépôt de garantie en cas de résiliation du bail commercial a connu une clarification jurisprudentielle importante le mois dernier.
Longtemps envisagée comme un mécanisme unilatéralement favorable au bailleur, cette disposition est désormais, de manière constante, analysée comme une clause pénale, soumise au pouvoir modérateur du juge lorsqu’elle constitue une sanction pécuniaire consécutive à une faute contractuelle du preneur.

L’article 1231-5 du Code civil permet en effet au juge de réduire ou d’augmenter la pénalité prévue contractuellement si celle-ci est manifestement excessive ou dérisoire. Or, exiger la conservation intégrale du dépôt de garantie sans examen du préjudice réel dépasse la fonction originelle de ce dépôt, destiné non pas à sanctionner le locataire, mais à garantir la bonne exécution de ses obligations et à couvrir d’éventuelles réparations ou manquements prouvés.

L’arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation en date du 20 novembre 2025 (n° 24-16.763) constitue une décision de principe déterminante à cet égard.

Dans cette affaire, la bailleresse revendiquait la conservation pure et simple de la somme de 18 402,96 €, correspondant au dépôt de garantie, alors même que le loyer annuel s’élevait à 67 000 €. La Cour relève que la bailleresse ne chiffrait pas le préjudice subi du fait de la résiliation du bail et confirme l’analyse des juges du fond, qui avaient qualifié la clause de clause pénale et réduit son montant à seulement 50 €. La Cour valide cette position en jugeant que la pénalité contractuelle présentait un caractère manifestement excessif et justifiait une réduction souveraine de son montant

Cette décision marque une limitation salutaire contre le risque d’enrichissement sans cause du bailleur et confirme que la simple acquisition de la clause résolutoire ne suffit pas à justifier la conservation d’une somme notable sans rapport démontré avec le préjudice.

Le juge demeure le garant de la proportionnalité, principe fondamental en matière de pénalités contractuelles.

Ainsi, dans la rédaction des baux commerciaux, toute clause prévoyant la conservation du dépôt de garantie doit être appréhendée avec prudence : elle ne peut produire effet que dans la mesure où le bailleur est en mesure de justifier le préjudice lié à la résiliation. À défaut, la clause sera requalifiée en clause pénale et pourra être ramenée à un montant symbolique, réduisant à néant l’argument contractuel initialement invoqué.


Cet article n'engage que son auteur.

Auteur

Christophe Delahousse
Avocat
Cabinet Chuffart Delahousse, Membres du Bureau, Membres du conseil d'administration
ARRAS (62)
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