
Pas de modification de la rémunération du salarié sans son accord express
Publié le :
30/06/2017
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2017
La rémunération contractuelle d’un salarié constitue un élément du contrat de travail, qui ne peut être modifié, ni dans son montant, ni dans sa structure sans son accord, peu importe que le montant de rémunération soit supérieur au salaire antérieur.
Par un arrêt non publié au bulletin, la Chambre sociale de la Cour de Cassation a confirmé sa jurisprudence s’agissant de la modification de la rémunération contractuelle.
Au cas d’espèce, il s’agissait d’un ingénieur commercial lequel bénéficiait d’une rémunération fixe complétée par une prime en fonction des contrats réalisés.
Ce salarié a, par la suite, été promu au poste de Directeur d’agence.
A ce titre, il a obtenu une augmentation de salaire brut de 110 % mais ne percevait plus de commission.
Le salarié a saisi, le Conseil de Prud’hommes, notamment de rappel de commissions.
La Cour d’Appel de Versailles a rejeté cette demande.
La Chambre Sociale a cassé l’arrêt jugeant que la rémunération contractuelle d’un salarié constituait un élément du contrat de travail, qui ne pouvait être modifié, ni dans son montant, ni dans sa structure sans son accord, peu importe que le montant de rémunération soit supérieur au salaire antérieur.
Cette décision a été rendue sous le visa de l’article 1134 du Code Civil, en sa rédaction antérieure à l’Ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, c’est-à-dire au motif que les conventions ne peuvent être révoquées que par le consentement des parties ou par les causes que la Loi autorise.
Il est donc reproché à l’employeur de ne pas avoir respecté la rémunération telle que contractuellement prévue en ne payant plus les primes et ce sans l’accord express du salarié.
Il s’agit d’une jurisprudence constante de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation : La rémunération contractuelle d'un salarié constitue un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié sans l’accord express du salarié, l'acceptation d'une modification de la rémunération ne pouvant résulter de la seule poursuite, par le salarié, de son travail.
Pratiquement, il faut signer un avenant au contrat de travail.
De manière plus générale, ne peuvent être modifiés, sans l'accord du salarié, notamment :
- les taux de commission
- le taux horaire du salaire prévu par le contrat de travail
- le montant de l'acompte sur la rémunération variable du salarié
Il convient, par ailleurs, de raisonner de manière large et d’identifier toute modification qui peut avoir un impact direct sur la rémunération :
Ainsi, la modification d’une zone géographique d’un commercial qui aurait pour conséquence de diminuer la partie variable de sa rémunération contractuelle constitue une modification du contrat de travail.
Il en est de même en cas, par exemple, du retrait de l'usage du véhicule de l'entreprise mis à la disposition du salarié voire de la réduction d'une indemnité kilométrique contractuelle prévue.
Etant précisé sur ce dernier point que les indemnités de déplacement ne constituent pas, en principe, un élément de la rémunération contractuelle mais un remboursement de frais qui ne doit plus être versé s’il n’est plus justifié dès lors que le salarié n’effectue plus de déplacements, sauf si l'employeur s'est contractuellement engagé à les payer.
La rédaction du contrat de travail sur ce point est donc très importante.
Outre que l’employeur doit être très attentif à la rédaction des clauses contractuelles s’agissant notamment de la rémunération, il doit être également vigilant s’agissant de la présentation des bulletins de salaire.
En effet, constitue une modification nécessitant l'accord du salarié, l'intégration au salaire de base, de la prime d'ancienneté, de la prime de pause et de toute prime de nature conventionnelle. A défaut d’accord, le salarié pourra saisir le conseil des prud’hommes et solliciter le paiement des dites primes (qu’il touchera donc deux fois ! ).
En cas de poursuite du contrat de travail sans l’accord express du salarié, les sanctions pour l’employeur peuvent être sévères : outre le paiement de rappel de salaire non versé, l’absence d’accord du salarié peut justifier la prise d'acte par ce dernier de la rupture de son contrat de travail ou sa résiliation judiciaire aux torts de l'employeur, à condition cependant que ce manquement empêche la poursuite du contrat (pour rappel, une prise d’acte et une résiliation judicaire justifiées emportent les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et notamment l’octroi de dommages et intérêts).
Tel n'est heureusement pas le cas, par exemple, lorsque la modification de la rémunération n'a pas eu de conséquences défavorables sur le montant de la rémunération ou ne représente qu'une faible partie de celle-ci.
Un mot sur les éléments de salaire non contractuels résultant d’un usage ou d'un engagement unilatéral de l'employeur :
L’employeur peut les dénoncer à condition de respecter une procédure spéciale :
- Dénonciation notifiée auprès des représentants du personnel et
- Dénonciation individuelle auprès de tous les salariés qui en bénéficient ou qui pourraient en bénéficier (dénonciation par lettre remise en mains propres contre décharge ou par lettre recommandée avec accusé de réception).
Par ailleurs, l'employeur doit respecter un délai de prévenance suffisant.
Ce délai est apprécié en fonction de l’avantage lui-même (exemple : entre 6 et 12 mois pour une prime de vacances ou pour une prime de 13ème mois)
La dénonciation régulière de l'usage est opposable au salarié qui ne peut plus prétendre à la poursuite du travail aux conditions antérieures.
A contrario et dans l’hypothèse d’une dénonciation irrégulière, la cessation d'un usage ou d'un avantage unilatéral ne peut résulter ni du non-respect par l'employeur de ses engagements ni de l'absence de réclamation des salariés. L’avantage reste du.
Cet article n'engage que son auteur.
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Auteur

Anne-Sophie LE FUR
Avocate Associée
CORNET, VINCENT, SEGUREL NANTES
NANTES (44)
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