
Crédit photo : © ALF photo - Fotolia.com
Piratage d’un compte bancaire : le client est-il automatiquement responsable ?
Publié le :
10/01/2019
10
janvier
janv.
01
2019
La preuve d’une négligence grave « ne peut se déduire du seul fait que l’instrument de paiement ou les données personnelles qui lui sont liées ont été effectivement utilisées. »
Sur le rappel des textes légaux :
En matière de piratage d’un compte bancaire, il incombe au Juge de vérifier que :- L’utilisateur de services de paiement a pris toute mesure raisonnable pour préserver la sécurité de ses données de sécurité personnalisées et a informé sans tarder son établissement de crédit (articles L. 133-16 et L. 133-17 du code monétaire et financier) ;
- Le prestataire de services de paiement a rapporté la preuve que l’utilisateur, niant avoir autorisé l’opération de paiement, avait agi frauduleusement ou n’avait pas satisfait, intentionnellement ou par négligence grave, à ses obligations (article L. 133-19, IV et L. 133-23 du code susvisé).
Sur le rappel des faits :
En novembre 2013, Monsieur Y a prétendu que ses données personnelles avaient été modifiées depuis le site internet de son établissement de crédit afin de recevoir sur un autre numéro les codes de confirmation nécessaires pour valider des opérations de paiement et de retrait depuis son compte pour un montant total de 2.979.61 euros.Ainsi, Monsieur Y a contesté avoir réalisé lesdites opérations et en a demandé le remboursement auprès de sa banque, laquelle a refusé de faire droit à sa demande.
Sur la décision de la juridiction de proximité :
Par une décision de la juridiction de proximité de Laon en date du 6 mars 2017, la demande de remboursement de Monsieur Y a été rejetée au motif que celui-ci « a nécessairement communiqué à un tiers ses données personnelles, qu’il était de sa responsabilité de veiller à ce qu’elles demeurent secrètes et ne soient divulguées à quiconque, et a ainsi commis une négligence grave de nature à exclure le remboursement. »Cette décision n’est pas surprenante au regard de la jurisprudence constante en la matière (Voir en ce sens : Cour de cassation, Chambre Commerciale, 28 mars 2018 , n°16.20.018 : « manque, par négligence grave, à son obligation de prendre toute mesure raisonnable pour préserver la sécurité de ses dispositif de sécurité personnalisés l’utilisateur d’un service de paiement qui communique les données personnelles de ce dispositif de sécurité en réponse à un courriel qui contient des indices permettant à un utilisateur normalement attentif de douter de sa provenance, peu important qu’il soit au non, avisé des risques d’hameçonnage. »
Sur l’arrêt inédit de la Cour de cassation :
Cour de cassation, Chambre commerciale, 21 novembre 2018, n°17-18888Pourtant, au visa des articles L. 133-16, L. 133-17, L.133-17, L. 133-19, IV et L. 133-23 du Code monétaire et financier, dans leur version antérieure à celle issue de l’ordonnance du 9 août 2017, la décision rendue le 6 mars 2017 a été cassée en toutes ses dispositions au motif que la preuve d’une négligence grave « ne peut se déduire du seul fait que l’instrument de paiement ou les données personnelles qui lui sont liées ont été effectivement utilisées. »
En présence d’une telle décision, l’on s’interroge de savoir les magistrats ont fait preuve de davantage de souplesse dans l’appréciation de la gravité de la négligence commise par l’utilisateur de services de paiement ou s’ils ont simplement reproché aux premiers juges d’avoir déduit trop hâtivement que Monsieur Y avait nécessairement communiqué ses données personnelles à un tiers…
Il conviendra de demeurer attentif aux prochaines décisions rendues par la Haute Cour pour tenter de répondre à cette interrogation.
Cet article a été rédigé par Me Mazzonetto. Il n'engage que son auteur.
Auteur

DROUINEAU 1927
Cabinet(s)
Saint-Benoît (86)
Historique
-
Mesures en faveur du pouvoir d'achat : publication de la loi portant mesures d'urgence économiques et sociales
Publié le : 14/01/2019 14 janvier janv. 01 2019Particuliers / Emploi / Retraite / Epargne salarialeLa loi portant mesures d'urgence économiques et sociales a été pbliée au JO du 26 décembre 2018 : prime exceptionnelle défiscalisée, exonération de cotisat...
-
Qu'est-ce que le bail mobilité ?
Publié le : 11/01/2019 11 janvier janv. 01 2019Particuliers / Patrimoine / Immobilier / LogementLa loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite « loi Elan » a été publiée au journal officiel du 24 novembre 2018. Elle insta...
-
Piratage d’un compte bancaire : le client est-il automatiquement responsable ?
Publié le : 10/01/2019 10 janvier janv. 01 2019Particuliers / Consommation / Informatique et InternetEntreprises / Finances / Banque et financeLa preuve d’une négligence grave « ne peut se déduire du seul fait que l’instrument de paiement ou les données personnelles qui lui sont liées ont été effe...
-
Agent immobilier : sans vente, la clause pénale est inapplicable
Publié le : 03/01/2019 03 janvier janv. 01 2019Particuliers / Patrimoine / Immobilier / LogementLa jurisprudence ne cesse de veiller à la stricte application de la loi Hoguet du 2 janvier 1970 qui règlemente la profession d’agent immobilier et notamme...
-
Comment apprécier le risque médical ?
Publié le : 02/01/2019 02 janvier janv. 01 2019Particuliers / Santé / Préjudice corporelLe patient qui subit un dommage à la suite d’un acte de prévention, de diagnostic ou de soins qui n’engage ni la responsabilité du professionnel de santé,...
-
Bail d’habitation : quelles sont les conditions à respecter pour le bailleur qui souhaite donner congé à ses locataires pour vendre ?
Publié le : 31/12/2018 31 décembre déc. 12 2018Particuliers / Patrimoine / Immobilier / LogementLa particularité du congé adressé par le propriétaire réside dans le fait qu’il contient une offre de vente pour le locataire, valable durant deux mois....
-
Cosmétiques : attention aux étiquettes trompeuses : l'expérimentation sur les animaux est interdite en Europe
Publié le : 20/12/2018 20 décembre déc. 12 2018Particuliers / Consommation / DistributionEntreprises / Marketing et ventes / ConcurrenceL’expérimentation animale portant sur les produits cosmétiques est interdite par la réglementation européenne. Par conséquent, l’allégation « non testé sur...