
Les règles garantissant l’indépendance et l’impartialité de la justice administrative précisées par le Conseil d’État
Publié le :
02/07/2024
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La formation de jugement est-elle impartiale lorsque l’un de ses membres a exercé, moins de deux ans auparavant, les fonctions de cheffe du service juridique et contentieux d’une administration partie à l’affaire et avait, en cette qualité, contribué à la préparation du mémoire en défense destiné à être produit dans le cadre de l’instance litigieuse ?CE, ass., 15 avr. 2024, n° 469719
La haute juridiction rejette tout doute sur la partialité du magistrat au motif que l’exercice passé, concomitant ou envisagé dans le futur, de fonctions administratives ne peut, par lui-même, constituer un motif suffisant pour mettre en doute son impartialité.
Dans un premier temps, le Conseil d’État a rappelé les principes et des règles garantissant l’indépendance et l’impartialité de la juridiction administrative.
Ainsi, les magistrats des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel exercent leurs fonctions en toute indépendance, dignité, impartialité, intégrité et probité et se comportent de façon à prévenir tout doute légitime à cet égard. (Article L231-1-1 du code de justice administrative).
Constitue un conflit d'intérêts toute situation d'interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou à paraître influencer l'exercice indépendant, impartial et objectif d'une fonction. (Article L231-4 du code de justice administrative).
Les juges ont estimé qu’il n’existait en l’espèce aucune atteinte au principe d’impartialité pour les motifs suivants :
- d’une part, en qualité de « cheffe du service juridique et contentieux » du département, le service juridique et contentieux ne constituait que l’un des services sous la direction juridique du juge en cause ;
- d’autre part, ni les écritures présentées par l’avocat du département, ni la production de l’organigramme de la direction juridique ne suffisait pas à établir que l’intéressée avait pris part à la défense du département dans le cadre de ses précédentes fonctions
La haute juridiction rappelle les cas dans lesquelles le magistrat doit se déporter :
- le jugement des affaires mettant en cause des décisions administratives dont il est l’auteur, qui ont été prises sous son autorité, à l’élaboration ou à la défense en justice desquelles il a pris part ;
- le jugement des autres affaires pour lesquelles, eu égard à l’ensemble des données particulières propres à chaque cas, notamment la nature des fonctions administratives exercées, l’autorité administrative en cause, le délai écoulé depuis qu’elles ont, le cas échéant, pris fin, ainsi que l’objet du litige, il existe une raison sérieuse de mettre en doute son impartialité ;
- le jugement des affaires dont il estime en conscience devoir se déporter, sans avoir à s’en justifier.
Cet article n'engage que son auteur.
Auteur

Capucine VARRON CHARRIER
Avocate Associée
CLAMENCE AVOCATS, Membres du Bureau, Membres du conseil d'administration
TOULON (83)
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