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                    Publié le : 
                    02/10/2025
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                                Le 2 juillet 2025, le Tribunal de l’Union européenne a rendu deux arrêts marquants dans les affaires T-1103/23 et T-1104/23, opposant Ferrari SpA à l’EUIPO et à M. Hesse au sujet de la marque verbale TESTAROSSA.Ces décisions rappellent avec force que l’usage d’une marque peut être reconnu même lorsque la production du produit emblématique a cessé, à condition que le signe continue à remplir sa fonction essentielle sur le marché.
Un modèle iconique menacé de déchéance
Ferrari avait déposé en 2007 la marque TESTAROSSA pour couvrir notamment les automobiles, les pièces détachées, les accessoires et les modèles réduits. Mais en 2017, deux demandes en nullité ont conduit l’EUIPO à considérer que la marque n’avait pas été exploitée de façon sérieuse entre 2010 et 2015.Selon l’Office, l’absence de production de véhicules neufs suffisait à démontrer un défaut d’usage, justifiant la déchéance. Ferrari contestait cette approche, estimant que la vie commerciale de la marque ne se limitait pas à la chaîne de production.
L’approche pragmatique du Tribunal
Le Tribunal annule les décisions de l’EUIPO et rappelle plusieurs principes essentiels :Véhicules d’occasion : la revente de modèles Testarossa par des concessionnaires agréés peut constituer un usage sérieux, dès lors qu’elle est faite avec le consentement du titulaire, fût-il implicite. Le service de certification d’authenticité mis en place par Ferrari illustre ce lien de contrôle suffisant.
Pièces détachées et accessoires : le Tribunal souligne que la certification portait aussi sur les composants des véhicules. Dès lors, le Tribunal conclut que l’entreprise a démontré
son consentement implicite à l’usage, par des tiers, de la marque concernée.
Modèles réduits : pour les jouets, le Tribunal distingue l’usage informatif (qui se borne à signaler la fidélité de la reproduction) et l’usage sous licence officielle. En l’espèce, la mention « produit officiel sous licence Ferrari » démontrait un usage conforme à la fonction d’indication d’origine.
Ces différents éléments permettent d’établir que la marque TESTAROSSA restait exploitée, même en dehors d’une production industrielle de voitures neuves.
Une décision de principe pour les marques emblématiques
Au-delà du cas Ferrari, cette jurisprudence confirme que l’usage sérieux ne se limite pas à la mise sur le marché de produits sortis d’usine. Il peut également résulter :- de la revente de biens d’occasion, lorsqu’elle s’effectue dans un cadre contrôlé ou agréé par le titulaire ;
- de la fourniture de services de certification, garantissant l’origine et l’authenticité des produits ;
- de la commercialisation de produits dérivés officiels, dès lors que le titulaire exerce un contrôle sur leur mise en circulation.
L’arrêt ouvre donc une voie réaliste pour les titulaires de marques attachées à des produits iconiques ou de collection. Il reconnaît que la valeur d’une marque ne s’épuise pas avec l’arrêt d’une production, mais peut perdurer grâce aux canaux de distribution secondaire et aux produits sous licence.
Conclusion
Avec TESTAROSSA, le Tribunal de l’UE envoie un signal fort : une marque vit tant qu’elle continue à jouer son rôle de garantie d’origine, même dans des circuits indirects.Pour les praticiens, l’enseignement est clair : l’usage par les tiers – concessionnaires, distributeurs agréés, licenciés – peut, avec l’accord explicite ou implicite du titulaire, sauver une marque d’une déchéance.
https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:62023TJ1104
https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=OJ:C_202504448
Cet article n'engage que son auteur.
Auteur
 
                                                    Constance CUVILLIER
Avocate Associée
                            DU PARC - MONNET - DIJON
                            DIJON  (21)
                        Historique
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                        Ferrari TESTAROSSA : le Tribunal de l’UE réaffirme la souplesse de la preuve de l’usage sérieux
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