Clause de préciput et partage
Publié le :
30/10/2025
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En quoi consiste la clause préciputaire ? Quel est son objet, son support ? Qu'en est-il du droit de partage ? Retrouvez toutes les informations utiles dans cet article.
Du préciput :
(Du latin præcipuum prendre avant)Qu’est-ce que la clause préciputaire ?
Ce n’est pas une donation (art. 1516 code civil) même si elle entraine un avantage économique certain au profit du bénéficiaire. Cette qualification est d’ailleurs écartée pour le préciput par l’article 1516 du code civil. Plus généralement le caractère de donation est écarté pour tout avantage dans le cadre d’une communauté conventionnelle (art. 1527 du code civil).Ce n’est pas une clause d’attribution intégrale après décès qui transmet les biens de communauté au survivant sans partage. Le préciput n’attribue que certains biens.
C’est un avantage matrimonial inclus dans le contrat de mariage ou dans le contrat issu d’un changement de régime matrimonial.
Quel est son objet ?
Il s’agit pour l’époux survivant de pouvoir (sans obligation) prélever un bien ou un ensemble de biens meubles ou immeubles – y compris assurance-vie- lors du décès de son conjoint. Mais qu’en est-il si la rupture du lien patrimonial est due à un divorce ? Dans ce cas l’avantage disparait en principe mais pas toujours (voir ci-dessous).Quel est son support ?
Le contrat de mariage, acte notarié obligatoire qui contient cette clause. Ou en cas de changement de régime matrimonial le nouveau contrat établi par notaire.Quel régime matrimonial peut comporter cette clause ?
La communauté réduite aux acquêts ou une séparation de biens avec société d'acquêts mais uniquement pour cette dernière. Elle est inutile pour la communauté universelle avec attribution au dernier vivant.
Quand joue-t-elle ?
Au décès d’un des époux si elle est réciproque ou du décès de celui qui n’en bénéficie pas. En aucun cas elle ne joue en cas de dissolution du mariage par divorce sauf si convention contraire acceptée dans le contrat par l’attributaire ou renonciation à la suppression de l’avantage lors du divorce dans la convention de divorce. Ais alors la clause ne jouera qu’au décès de l’ex-conjoint.En quoi consiste-t-elle ?
E la possibilité par l’époux attributaire de prélever un bien déterminé ou non dans la succession. C’est un prélèvement unilatéral.Quelle est sa limite ? : Le prélèvement ne peut se faire que sur l’actif net de communauté ; et il ne peut supprimer la réserve ni les droits d’enfants issus d’un autre mariage sauf s’ils ont accepté la clause dans l’acte constitutif.
Du partage :
Le partage a pour objet de faire cesser une indivision ente deux ou plusieurs personnes sur tout ou partie d’un patrimoine. Que cette indivision soit post-communautaire, après décès ou particulière (achat en commun de personnes sans lien familial).L’article 1515 du code civil précise que le prélèvement permis par la clause préciputaire se fait avant tout partage d’une indivision.
Cela veut dire aussi qu’il ne crée pas non plus d’indivision et donc qu’il n’y a pas à la partager ou au moins que ne sont à partager que les biens non objet du prélèvement.
L’administration fiscale ne peut donc prétendre au paiement de droits de succession.
Mais qu’en est-il du droit de partage ?
L’administration fiscale a essayé de taxer ce prélèvement comme une opération de partage au droit de 2,5% (taux actuel).
La doctrine lui a pendant longtemps donné raison non sans implication sur le droit de l’indivision post successorale notamment.
Certaines juridictions de fond se sont insurgées en prétendant sur le fondement de la règle civile de l’article 15125 du code civil précité (le prélèvement s’opère avant tout partage) qu’aucun droit ne pouvait être perçu.
La chambre commerciale de la cour de cassation saisie d’un pourvoi à l’encontre d’un arrêt de la cour de Poitiers du 4 juillet 2023 a transmis pour avis à la 1° chambre la question suivante :
1515 du code civil constitue-t-il une opération de partage ? »
Et la première chambre a dit le 25 mai 2025 (23-19780) pour avis que le prélèvement n’était pas une obligation de partage et désavoue donc l’administration fiscale :
" Sauf cas particulier prévu par la loi, l'opération de partage, proprement dite, se définit comme celle qui, à l'issue du processus permettant de mettre fin à une indivision, contribue directement à la division de la masse indivise, préalablement liquidée, et à sa répartition entre les indivisaires à proportion de leurs droits respectifs."
La solution fiscale rejoint donc une fois de plus la solution civiliste et c’est heureux pour l’organisation de la sécurité du conjoint survivant qui voudra sécuriser sa résidence par exemple.
De la contestation :
Le risque du jeu de la clause préciputaire c’est l’existence d’enfants du premier lit qui vont se croire dépossédés de leurs droits successoraux. Ils peuvent donc tenter l’action en retranchement qui annihilerait le jeu de la clause.Le risque c’est aussi la création d’inégalité insupportables entre héritiers créant des litiges familiaux.
Les héritiers peuvent également contester l’atteinte à la réserve légale ce qui anéantirait le jeu de la clause.
En conclusion : Si la conclusion dans un contrat de mariage communautaire ou dans une société d’acquêts de la clause préciputaire permet de donner un avantage matrimonial au conjoint en assurant sa sécurité domiciliaire ou financière, si le prélèvement effectué échappe à la notion de partage, si les droits successoraux et de partage ne sont pas dus, il ne peut être affirmé que cette technique (peu utilisée ?) soit sans risque s’il y a des enfants du premier lit ou que le jeu du prélèvement ne laissera que des biens insuffisant pour couvrir la réserve légale.
Et puis il y a tellement de divorces…
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Cet article n'engage que son auteur.
Auteur
PROVANSAL Alain
Avocat Honoraire
Eklar Avocats
MARSEILLE (13)
Historique
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