
Bail d’habitation : Comment sous-louer son logement en toute légalité ?
Publié le :
22/09/2025
22
septembre
sept.
09
2025
Par une décision du 10 avril 2025, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a précisé que l’accord du bailleur permettant à son locataire de sous-louer le logement pouvait prendre la forme d’un accord tacite constitué par l’absence de protestation du bailleur sur les contrats de sous-location qui lui ont été présentés par le locataire et qui précisent les montants des loyers de sous-location (Cour de cassation, 3ème chambre civile, 10 avril 2025 n° 23-14.359).Le législateur a encadré la pratique de la sous-location par la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs. Aux termes de l’article 8 de cette loi, il a posé le principe de l’interdiction de la sous-location en aménageant toutefois une exception si le locataire obtient l’accord écrit du bailleur, y compris sur le prix du loyer. L’article précise que le prix du loyer au mètre carré de surface habitable des locaux sous-loués ne peut excéder celui payé par le locataire principal.
Se fondant sur cet article, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a jugé, dans une décision du 12 septembre 2019, que le locataire qui avait sous-loué son logement, sans y être autorisé par le bailleur, devait rembourser à ce dernier les loyers perçus grâce à cette sous-location.
La Cour de cassation précise en effet que ces loyers doivent être regardés comme des fruits civils appartenant par accession au propriétaire (Cour de cassation, 3ème chambre civile, 12 septembre 2019, n°18-20.727).
La facture pour le locataire qui a sous-loué son logement sans accord écrit du bailleur peut donc être salée, outre le fait que le locataire encourt la résiliation de son bail d’habitation ainsi que son expulsion.
La résiliation de son bail, son expulsion et le paiement d’une indemnité d’occupation, c’est la sanction qui était encourue par le locataire et demandée au juge par le propriétaire, dans l’affaire jugée par la Cour de cassation le 10 avril 2025.
Dans cette affaire, une clause du contrat de bail d’habitation autorisait le locataire à sous-louer le logement, cependant celle-ci ne prévoyait pas le montant du loyer de la sous-location.
Décidant de sous-louer le logement, le locataire a adressé au bailleur une copie des conventions de sous-location stipulant le prix des sous-loyers. Le bailleur n’a formulé aucune protestation sur les contrats qui lui ont été soumis.
Il reste que, devant le juge de cassation, le bailleur, se fondant sur l’article 1120 du Code civil qui dispose que le silence ne vaut pas acceptation, à moins qu'il n'en résulte autrement de la loi, des usages, des relations d'affaires ou de circonstances particulières, prétend que son absence de protestation ne pouvait valoir acceptation de sa part du prix du loyer de sous-location.
La Cour de cassation répond qu’en l’espèce les circonstances ont, au contraire, fait que le silence du bailleur sur les conventions de sous-location qui lui ont été présentées par le locataire, valait accord tacite de ce bailleur sur le montant des loyers de sous-location.
En l’occurrence, le Juge de cassation retient comme circonstance particulières :
- L’autorisation expresse de la sous-location prévue dans le bail d’habitation et le renvoi à l’annexe du contrat correspondant à un modèle-type de convention de sous-location ;
- Le comportement du locataire qui s’est toujours conformé aux stipulations de son bail d’habitation et a ainsi soumis au propriétaire les contrats de sous-locataire incluant le prix des sous-loyers dans les quinze jours de la signature desdits contrats ;
- L’absence de protestation du bailleur.
Par cette décision, la Cour de cassation adopte une lecture souple de la condition d’accord écrit du bailleur y compris sur le prix du loyer, prévue par l’article 8 de la loi du 6 juillet 1989 encadrant la sous-location.
La Cour de cassation admet en effet que l’accord du bailleur sur le prix du loyer soit un accord tacite et non un accord écrit.
La solution est pragmatique tant il aurait été sévère d’expulser ou d’imposer le paiement d’une indemnité d’occupation au locataire qui était autorisé dans son bail d’habitation à sous-louer le logement qu’il occupe et qui a transmis à son propriétaire les conventions de sous-location pour son accord, lequel n’a formulé aucune opposition.
Dans un contexte de pénurie de logements, faut-il voir dans cette décision de la Cour de cassation le début d’un mouvement visant à assouplir les conditions de la sous-location ?
Un tel mouvement est à relativiser à ce stade. Est-ce que la Cour de cassation aurait adopté une solution similaire dans le silence du contrat de bail d’habitation sur la sous-location si le locataire avait présenté à son propriétaire les contrats de sous-location et que celui-ci n’avait pas réagi ? Rien n’est moins sûr…
L’accord tacite sur les prix des loyers de sous-location est une chose mais l’accord tacite sur le principe même de la sous-location en est une autre. Les locataires qui veulent sous-louer leur logement sont donc invités à la plus grande prudence et ainsi exhortés à se procurer l’accord écrit de leur bailleur pour procéder à la sous-location en toute légalité.
Cet article n'engage que son auteur.
Auteur

Alexandra DUPONT
Avocate
CORNET, VINCENT, SEGUREL NANTES
NANTES (44)
Historique
-
Bail d’habitation : Comment sous-louer son logement en toute légalité ?
Publié le : 22/09/2025 22 septembre sept. 09 2025Particuliers / Patrimoine / Immobilier / LogementPar une décision du 10 avril 2025, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a précisé que l’accord du bailleur permettant à son locataire de sou...
-
Cartes de simulations d’exposition aux ondes électromagnétiques : un nouvel outil pour rassurer la population
Publié le : 03/06/2025 03 juin juin 06 2025Particuliers / Patrimoine / Immobilier / LogementCollectivités / Services publics / UsagersLe développement des antennes radiotéléphoniques à haut débit s’impose sur nos territoires et inquiète une minorité de la population. Les valeurs limites d...
-
Encadrement des loyers en 2025 : bilan et perspectives
Publié le : 02/06/2025 02 juin juin 06 2025Particuliers / Patrimoine / Immobilier / LogementCollectivités / Services publics / Service public / Délégation de service publicIntroduit à titre expérimental par la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 dite Loi ÉLAN, le mécanisme d’encadrement des loyers dans les zones tendues fait...
-
Garantie d’éviction des servitudes non-apparentes : le vendeur ne peut s’exonérer que par une clause l’excluant expressément
Publié le : 30/04/2025 30 avril avr. 04 2025Particuliers / Patrimoine / Immobilier / LogementPar un arrêt du 13 février 2025 (Cour de cassation, 3e chambre civile, 13 février 2025 – n° 23-17.636), la Cour de cassation a apporté un éclairage sur l’é...
-
Responsabilité du diagnostiqueur et indemnisation du préjudice
Publié le : 18/03/2025 18 mars mars 03 2025Particuliers / Patrimoine / Immobilier / LogementLa Cour de cassation a rendu le 30 janvier 2025 deux arrêts (Cass, 3ème civ, 30 janvier 2025, n°23-14.069 et Cass, 3ème civ, 30 janvier 2025, n°23-14.029)...
-
Bail d’habitation : un propriétaire peut-il donner congé au locataire pour un motif de travaux à réaliser ? Oui
Publié le : 07/02/2025 07 février févr. 02 2025Particuliers / Patrimoine / Immobilier / LogementL'article 15 de la loi du 6 juillet 1989 prévoit que le bailleur peut donner congé à son locataire, avec un préavis de 6 mois, pour un motif légitime et sé...
-
Le délai de rétractation lors d'un achat immobilier : attention à bien compter
Publié le : 28/01/2025 28 janvier janv. 01 2025Particuliers / Patrimoine / Immobilier / LogementIl aura fallu un arrêt de la Cour de Cassation 3ème Chambre Civile du 19 décembre 2024 n° 23 - 12652 pour que l'on soit fixé sur la méthode pour compter le...