Caution subrogée clause et déchéance terme

Caution subrogée : il ne lui est pas possible d’utiliser la clause de déchéance du terme

Publié le : 03/06/2024 03 juin juin 06 2024

Absence de transmission de la faculté de prononcer la déchéance du terme à la caution subrogée dans les droits de la banque : limite à l’effet translatif de la subrogation légale
Une banque consent un prêt professionnel à une société, garanti par un cautionnement accordé par une seconde société et un sous-cautionnement consenti par le gérant de cette société.

À la suite de la défaillance du débiteur principal, le prêteur actionne la caution qui règle plusieurs mensualités puis le solde du prêt.

Subrogée dans les droits du prêteur, la caution prononce la déchéance du terme et réclame le remboursement total de la dette au débiteur principal ainsi qu’à la sous-caution.

Ces derniers forment un pourvoi en reprochant à l’arrêt de la cour d’appel d’avoir jugé que la caution, bénéficiaire de la subrogation légale, avait pu exercer tous les droits du créancier subrogeant, dont celui de prononcer la déchéance du terme du contrat de prêt.

La Cour de cassation sanctionne la décision des juges du fonds au visa des anciens articles 1251 3° et 1252 du Code civil (dont le contenu est quasiment repris à l’identique dans le nouvel article 1346-4 du code civil issu de l’ordonnance du 10 février 2016 réformant le régime général des obligations) et indique qu’il résulte de la combinaison de ces textes que la subrogation légale permet de transférer à son bénéficiaire uniquement la créance et ses accessoires, à l’exception des droits exclusivement attachés à la personne du créancier, dont fait partie la déchéance du terme.

Au stade de la contribution à la dette, la caution bénéficie d’une dualité de recours à l’encontre du débiteur principal et de la sous-caution. 

En effet, le cautionnement étant le contrat accessoire à une obligation principale (en l’espèce, le remboursement du prêt contracté), aucune charge ne peut définitivement peser sur la caution.

À cette fin, la caution bénéficie d’une part, d’un recours subrogatoire (article 2309 du code civil), dont le mécanisme est exposé ci-après et d’autre part, d’un recours personnel (article 2308 dudit code) qui lui permet d’obtenir du débiteur principal le recouvrement de la somme payée ainsi que les intérêts moratoires, les frais exposés et d’éventuels dommages et intérêts.

Par principe la subrogation personnelle permet à la caution de se voir attribuer, afin de les exercer, les droits et actions détenus par le créancier subrogeant à l’encontre du débiteur principal et des tiers. 

Pour rappel, la subrogation légale est un mode de transmission de créance qui produit à la fois un effet extinctif et un effet translatif de la créance. 

Par la subrogation, le créancier appelé le subrogeant transmet au subrogataire, dans les limites de ce qu’il a payé, la créance et ses accessoires qu’il détient sur le débiteur, appelé le subrogé. 

À la différence du recours personnel, le recours subrogatoire est limité dans son quantum aux sommes effectivement payées par la caution au créancier et la caution s’expose à se voir opposer toutes les exceptions que le débiteur pouvait opposer au créancier.

Si la voie du recours subrogatoire est privilégiée en pratique, elle peut cependant s’avérer préjudiciable.

C’est ainsi que la Haute juridiction affirme que la déchéance du terme, étant un droit exclusivement attaché à la personne du créancier, ne saurait constituer un quelconque droit accessoire de la créance et ne pourrait donc être prononcée par la caution.

Autrement dit, la faculté de prononcer le remboursement anticipé du solde du prêt ne peut être transférée au bénéficiaire d’une subrogation légale car elle n’est pas un accessoire de la créance mais un droit exclusivement attaché à la personne du créancier.

La déchéance du terme est donc une prérogative inhérente à la qualité de prêteur de deniers.

Par ailleurs, il est possible de s’interroger sur l’utilisation du principe de l’ancien article 1252 du Code civil (repris dans sa substance par le nouvel article 1346-3 dudit code) qui énonçait que « la subrogation ne peut nuire au créancier lorsqu’il n’a été payé qu’en partie » pour justifier l’absence de possibilité pour la caution de provoquer la déchéance du terme.

En effet, lorsque la caution n’a payé que partiellement le créancier, ce dernier conserve sa qualité de créancier. Le paiement partiel fait alors naître un conflit d’intérêt entre le créancier subrogeant et la caution subrogée, conflit que le code civil tranche en faveur du subrogeant (Merryl Hervieu, Des avantages du recours personnel de la caution contre le débiteur principal, Dalloz, 2 mai 2024).

Or dans l’arrêt d’espèce, il est précisé que la caution a payé au créancier l’intégralité de la dette, de sorte que cette justification par le prisme de la subrogation partielle ne peut donc tenir.

En conclusion, il peut être perçu au travers de cette décision une invitation de la caution à exercer son recours personnel qui présente l’avantage de ne pouvoir se voir opposer les exceptions.

À tout le moins, l’arrêt pose une limite aux effets de la subrogation personnelle. 


Cet article a été rédigé par Alexandre ROY, juriste au sein du cabinet Drouineau 1927. Il n'engage que son auteur.

Auteur

DROUINEAU 1927
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POITIERS (86)
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