IRP : délais de consultation du comité social et économique (CSE)
Publié le :
29/09/2020
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2020
Par un arrêt du 8 juillet 2020 (Cass. soc. 8-7-2020 n° 19-10.987 FS-PBI, Sté Lur Berri c/ Sté Syndex), la chambre sociale de la Cour de cassation juge que le comité d'entreprise (CE) et l’employeur peuvent passer un accord, même informel, afin de prolonger les délais de consultation du premier.
Les faits de l’espèce remontent à 2016, le Comité Social et Economique (CSE) n’ayant pas encore fusionné les délégués du personnel (DP), comité d'entreprise (CE) et comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT).
Un CE avait désigné un expert-comptable pour l'assister notamment sur la situation économique et financière et la politique sociale de l'entreprise.
Cette dernière ayant estimé que les délais impartis à l'expert pour l'exercice de sa mission avaient été dépassés, elle avait saisi le président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés pour faire juger que les honoraires réclamés par l’expert n’étaient pas dus.
Déboutée et condamnée au fond à payer les honoraires, l’entreprise a formé un pourvoi.
Se fondant sur les articles L 2323-3 et R 2323-1-1 du Code du travail qui fixent les délais préfix impartis au CE pour rendre ses avis, la société soutient que l'expert, ayant déposé son rapport après l'expiration du délai imparti au CE pour se prononcer, ne peut plus réclamer d'honoraires.
Elle fait également valoir que seul un accord conclu entre l'employeur et la majorité des élus titulaires du comité peut proroger le délai imparti au CE pour rendre son avis.
La chambre sociale rejette ces arguments et juge qu’« un accord collectif de droit commun ou un accord entre le comité d'entreprise et l'employeur peut fixer d'autres délais que ceux prévus à l'article R 2323-1-1 du Code du travail, les prolonger ou modifier leur point de départ ».
Elle relève qu’en l'espèce, la cour d'appel a constaté qu'à la suite d'échanges avec le comité d'entreprise et l’expert, l'employeur avait abondé sa base de données économiques et sociales (BDES), provoqué une réunion extraordinaire du comité pour discuter de l'expertise, puis fixé au 27 avril 2017, conjointement avec le secrétaire du comité d'entreprise, la date de restitution des travaux d'expertise et de remise des avis du comité d'entreprise.
Pour la Cour de cassation, la cour d'appel avait déduit que les délais de consultation du comité d'entreprise, et par conséquent de l'expertise, avaient d'un commun accord été prolongés, de sorte que le rapport d'expertise n'avait pas été remis hors délais.
Les délais prévus par l’article R 2323-1-1 ne sont fixés qu’à défaut d’accord (collectif majoritaire ou, en l'absence de délégué syndical, conclu avec la majorité des élus titulaires).
En cas d’application des délais réglementaires, la haute juridiction décide que rien n'interdit cependant aux parties de convenir de modifier ces délais, les conditions de forme de cet accord étant alors moins contraignantes, puisqu'il peut s'agir d'un accord collectif «de droit commun» ou d'un accord «avec le comité d'entreprise», sans plus précision sur les modalités de conclusion ou de forme.
La chambre sociale de la Cour de cassation rend ici une décision résolument prétorienne, puisque prévue par aucun texte.
Par cet arrêt elle ouvre la possibilité aux partenaires sociaux de prolonger les délais de consultation prévus par les textes, s'ils s’en accordent et le jugent nécessaire.
Le fait est cependant qu’il n'existait pas en l'espèce d'accord formel entre l'employeur et le comité.
La Cour de cassation estime que les juges du fond pouvaient conclure à l’existence d’un accord informel au vu de trois éléments pouvant constituer un faisceau d'indices :
- l'abondement de la base de données économiques et sociales (BDES) par l'employeur à la suite d'échanges avec l'expert et le CE (après l'expiration des délais réglementaires) ;
- l'organisation d'une réunion extraordinaire du CE pour discuter de l'étendue de l'expertise ;
- l'établissement avec le secrétaire du CE de l'ordre du jour d'une réunion de remise du rapport de l'expert et de rendu des avis du comité, laissant ainsi supposer le délai de consultation du comité n'était pas expiré selon l'employeur.
Enfin, les textes relatifs au CSE étant très similaires à ceux relatifs au CE, la solution retenue dans cet arrêt semble parfaitement transposable au CSE.
Cet article n'engage que son auteur.
Auteur
Benjamin ROUX
Cabinet(s)
TOULON (83)
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