Employeur : quelle conduite tenir en cas d’information d’un éventuel harcèlement ?
Publié le :
30/03/2020
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Aux termes d’un arrêt rendu le 27 novembre 2019 (n°18-10.551), la Chambre sociale de la Cour de cassation rappelle le rôle de l’employeur dans le cadre de faits pouvant être qualifiés de harcèlement moral.Une salariée, en arrêt de travail pour maladie, avait écrit une première fois à son employeur pour lui faire part de problèmes de santé liés à son travail, puis une seconde fois pour se plaindre du harcèlement moral qu'elle subissait de la part de sa supérieure hiérarchique. La salariée a ensuite été licenciée pour insuffisance professionnelle.
Cette dernière a saisi la juridiction prud'homale aux fins de voir déclarer nul le licenciement qui faisait suite à sa dénonciation d’un harcèlement moral et de condamner la société au paiement de diverses sommes notamment pour harcèlement moral et violation de l'obligation de sécurité et de loyauté.
La Cour d’appel a prononcé la nullité du licenciement, faute pour la société de rapporter la preuve que la salariée n’avait pas été licenciée à la suite de sa dénonciation et a infirmé le jugement, en qu'il avait débouté la salariée de sa demande de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité
La Cour estimait que le harcèlement moral n’étant pas établi, la demande de dommages et intérêts fondée sur l’obligation de sécurité de l’employeur ne pouvait prospérer.
La Cour de Cassation a cassé l’arrêt de la Cour d’appel mais seulement en ce qu'il a débouté la salariée de sa demande en dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité.
La Cour de cassation a jugé que :
« Vu l'article L. 4121-1 du code du travail dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n 2017-1389 du 22 septembre 2017 et l'article L. 4121-2 du même code dans sa rédaction antérieure à la loi n 2016-1088 du 8 août 2016
Attendu que l'obligation de prévention des risques professionnels, qui résulte des textes susvisés, est distincte de la prohibition des agissements de harcèlement moral instituée par l'article L. 1152-1 du code du travail et ne se confond pas avec elle ;
Attendu que pour débouter la salariée de sa demande de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité, l'arrêt retient qu'aucun agissement répété de harcèlement moral n'étant établi, il ne peut être reproché à l'employeur de ne pas avoir diligenté une enquête et par là-même d'avoir manqué à son obligation de sécurité ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés. »
C’est l’apport de cet arrêt.
En effet, la Cour de cassation juge que l’employeur, averti d’une situation de harcèlement moral, doit prendre toutes les mesures nécessaires et diligenter une enquête afin d’établir la vérité et ce, même s’il ne dispose que des seules affirmations du salarié.
La Cour de cassation adopte une position particulièrement sévère à l’égard de l’employeur en considérant que, s’il ne diligente pas une enquête après la dénonciation de faits de harcèlement par un salarié, il manque à son obligation de prévention, et ce, même si les faits ne sont pas établis.
Le principe est donc clairement posé par la Cour : quels que soient la pertinence et le degré de précision des allégations du salarié qui se prétend harcelé, l’enquête interne s’impose, ce qui tend à limiter drastiquement le pouvoir d’appréciation de l’employeur.
Si vous, employeurs, êtes confrontés à cette situation, n’hésitez pas à vous faire accompagner par un avocat spécialisé en droit du travail.
Cet article n'engage que son auteur.
Auteur
Magalie MARCHESSEAU LUCAS
Avocate Associée
AVOCADOUR - membre du GIE AVA
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