La question prioritaire de constitutionnalité devant les juridictions administratives
Publié le :
09/03/2010
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Le décret du 16 février 2010 portant application de la loi du 10 décembre 2009 relative à l’application de l’article 61-1 de la Constitution est entré en vigueur le 1er mars 2010.
L’exception d’inconstitutionnalité devant les tribunaux administratifs et cours d'appeLa grande presse s’est fait l’écho de cette importante réforme, très attendue.
Le décret n° 2010-148 du 16 février 2010 portant application de la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l’application de l’article 61-1 de la Constitution, issu de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, est entré en vigueur le 1er mars 2010.
Les grandes lignes des dispositions applicables devant les Tribunaux administratifs et les Cours administratives d’appel sont ci-après rappelées :
1. Pour les parties :
• Il est nécessaire de formuler la question de constitutionnalité par un mémoire (donc par écrit) distinct, et ce, à peine d’irrecevabilité, alors même qu’il n’y a pas d’obligation pour le juge d’en aviser les parties, ni d’invitation à régulariser ;
• Le mémoire doit être motivé, d’où l’importance de procéder à toute vérification préalable sur le cédérom qui a été adressé aux professionnels par le Conseil Constitutionnel : « Cinquante ans de jurisprudence » afin d’éviter de soulever la question sur un texte qui a déjà été soumis au contrôle de constitutionnalité
• La question peut être soulevée pour la première fois en appel (ou en cassation) y compris par voie incidente.
2. Pour le juge :
• Il procède à la transmission du mémoire aux autres parties sauf si la demande est manifestement inopérante : pas de rapport avec le litige, Conseil Constitutionnel en cours de saisine, ou constitutionnalité du texte déjà examinée, …
• Il peut statuer par voie d’ordonnance :
- Si le juge décide de transmettre la question au Conseil d’Etat, sa décision est notifiée aux parties qui ont un mois pour présenter leurs observations au Conseil d’Etat (mais pas de recours contre la décision de transmission). La juridiction saisie doit, sauf exceptions, surseoir à statuer.
- Si le juge décide de ne pas transmettre la question, cette décision ne pourra être contestée qu’en même temps, le cas échéant, que la décision au fond, mais par un mémoire distinct et motivé, déposé dans le délai de l’appel et accompagné d’une copie de la décision de refus de transmission.
Plusieurs questions ont été suscitées par l’examen des nouvelles dispositions ; quelques éléments de réponse peuvent être apportés en attendant que la jurisprudence se fixe :
• A partir de quand la question peut-elle être soulevée ?
Elle peut être soulevée dans les affaires en cours, en première instance comme en appel, avant clôture, voire même après clôture ; le juge apprécie alors s’il est ou non nécessaire de rouvrir les débats.
• Quid si la solution du litige est évidente sur le fondement d’autres dispositions que celles dont l’inconstitutionnalité a été soulevée ?
L’exception d’inconstitutionnalité « vit sa vie » indépendamment du fond du litige. Le procès devient donc l’instrument du contrôle de constitutionnalité. Mais le juge peut prendre des mesures conservatoires ou provisoires.
• N’y a-t-il pas un risque de dévoiement ?
Il sera nécessaire de veiller à un usage loyal de la question de constitutionnalité, éviter d’en faire un usage dilatoire ou abusif …
• La décision sera-t-elle être motivée ?
Comme toute décision de justice, la décision sera motivée, même sommairement.
• Quel domaine d’application ?
Toute atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution …
De nombreuses applications peuvent être envisagées, y compris en référé, par exemple, en matière d’hospitalisation d’office, rétention administrative, contentieux électoral, D.A.L.O., droit des étrangers, de l’environnement, …
Il conviendra cependant et dans la mesure du possible, de privilégier le contrôle de conventionalité – qui échappe à la lourdeur de la procédure susvisée et qui est exercé directement par le juge saisi du fond du litige.
Cet article n'engage que son auteur.
Auteur

CHARLES-NEVEU Brigitte
Avocate Honoraire
NEVEU, CHARLES & ASSOCIES
NICE (06)
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