Le bon de visite
Publié le :
01/02/2008
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2008
Traiter directement après sa souscription ?Mon mari a visité une maison il y a 5 mois avec une agence qui lui a fait signer un bon de visite. A ce moment-là, nous avons jugé que cela ne nous convenait pas. Aujourd'hui, nous avons voulu revoir cette maison et souhaiterions l'acquérir. Or, il se trouve que le propriétaire a rompu son contrat avec l'agence. Sommes-nous autorisés à acheter ce bien en passant directement par le propriétaire ? Le bon de visite est-il devenu caduque ? Devons-nous attendre que le délai soit passé?
La réponse dépend des termes exacts du mandat que le propriétaire avait confié à l'agence immobilière.
Dans un mandat de cette nature, il est souvent prévu une clause pénale aux termes de laquelle le propriétaire s'interdit, pendant une période déterminée, de vendre à une personne qui aurait été présentée par l'agence.
Le bon de visite sert à l'agent immobilier à prouver que c'est lui qui a présenté l'acheteur au propriétaire; ainsi cela lui permet de demander l'application de la clause pénale à l'encontre du propriétaire vendeur.
Une décision sur le bon de visiteUn agent immobilier qui avait reçu mandat non exclusif de vente d'un local commercial, avait fait visiter ce bien à un acheteur, lequel l'a acquis par l'intermédiaire d'un autre agent immobilier.
Le premier agent immobilier ne peut rechercher la responsabilité de cet acquéreur dans la mesure où la signature d'un bon de visite n'a pu valablement engager son signataire puisque les termes de ce bon sont contraires aux dispositions de l'article 73 du décret du 20 juillet 1972, selon lesquelles l'agent immobilier ne peut demander ni recevoir d'autre rémunération, commission ni même indemnisation que celles prévues et dans les conditions déterminées dans le mandat.
En outre ce bon de visite permettrait à l'agent immobilier de contourner l'absence d'exclusivité du mandat et de fausser le contexte de libre concurrence pourtant accepté par lui.
Référence:
- Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1re Chambre, sect. B, 22 juin 2006 Relativiser sa valeurPetit rappel : lorsqu'une personne est intéressée par l'achat d'un bien immobilier mis en vente dans une agence, si elle visite, le professionnel lui fait signer un "bon de visite". Il s'agit d'un document établissant que le bien en vente a été présenté à cet éventuel acquéreur. Ainsi l'agent immobilier disposera d'une preuve que c'est lui qui a fait connaître le bien, preuve qu'il pourra utiliser en cas de difficultés pour le paiement de sa rémunération si la vente intervient. Cette preuve de présentation du bien peut également résulter d'un échange de lettres ou autres correspondances.
La Cour de cassation, par l'arrêt en référence a relativisé l'effet du document qui, il faut l'affirmer n'est pas un contrat.
La décision a été rendue au visa de l'article 6 de la loi du 2 janvier 1970 dite loi Hoguet, ensemble l'article 1134 du Code civil.
La Haute juridiction a en préliminaire rappelé que lorsque le mandant a donné à plusieurs mandataires le mandat non exclusif de vendre un même bien, il n'est tenu de payer une rémunération ou commission qu'à celui par l'entremise duquel l'opération a été effectivement conclue, au sens de l'article 6 de la loi du 2 janvier 1970 et cela même si l'acquéreur lui avait été précédemment présenté par un autre agent immobilier, sauf à ce dernier à prétendre à l'attribution de dommages-intérêts en prouvant une faute du vendeur qui, par abus de sa part et compte tenu des diligences accomplies, l'aurait privé de la réalisation de la vente.
En l'espèce, le propriétaire avait confié à l'agence immobilière Abondance Immobilière le 24 mars 2001 un mandat non exclusif de vendre sa maison, moyennant une rémunération de 5% à la charge de l'acquéreur.
Un couple a visité le bien par l'intermédiaire de cette agence selon bon de visite en date du 6 avril 2001, mais la vente a été réalisée entre les parties par l'intermédiaire d'une autre agence immobilière, l'agence Martin à laquelle le propriétaire avait également donné mandat non exclusif de vente.
L'agence Abondance Immobilière a demandé la condamnation du mandant à lui payer l'indemnité prévue au mandat.
Pour condamner le vendeur à payer à la première agence qui a fait visiter l'indemnité forfaitaire de 5% du prix de vente qu'elle réclamait pour non-respect par le vendeur de l'interdiction qui lui était faite de traiter directement avec un acheteur présenté par l'agence mandataire, l'arrêt de la cour d'appel attaqué énonce que l'interdiction de traiter directement avec l'acquéreur présenté par l'agence immobilière n'autorise pas les parties à traiter en dehors de la présence de celle-ci, que le terme directement n'a pas d'autre signification et qu'il n'autorise pas les parties à évincer l'agent immobilier en affectant de traiter avec un intermédiaire moins coûteux.
La Cour de cassation dit qu'en statuant ainsi, alors que le propriétaire avait confié aux deux agences des mandats de vente non exclusifs et que la vente a été réalisée par l'intermédiaire de l'une de ces deux agences moyennant paiement d'une commission librement négociée, la cour d'appel a violé les textes rappelés plus haut.
La Cour de cassation a donc censuré l'arrêt et renvoyé devant la même cour d'appel autrement composée.
Il sera noté que le second agent immobilier ici ne réclamait pas sa commission mais le montant d'une clause pénale égal à la commission. La rémunération elle n'est due que lorsque le négociateur a conclu la vente.
Noté aussi que la référence à l'article 1134 du Code civil disant que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ne s'explique que a contrario, parce que, d'une part, le bon de visite n'a pas fait naître une convention, d'autre part, le dispositif légal (loi Hoguet) prime sur le mandat qui lui est un contrat.
Référence:
- Cour de cassation, 1re Chambre civ., 16 mai 2006 (pourvoi N° 04-20.477), cassation
Cet article n'engage que son auteur.
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