Le devoir d'information appliqué aux professions médicales
Publié le :
29/08/2012
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L’obligation pesant sur le praticien d’informer son patient sur son état de santé, les thérapies à mettre en œuvre et leurs conséquences remonte, en jurisprudence, au milieu du 20ème siècle.
I – Les contours du devoir d'information appliqué aux professions médicales
A. Le champ d'application de l'information :
L’obligation pesant sur le praticien d’informer son patient sur son état de santé, les thérapies à mettre en œuvre et leurs conséquences… remonte, en jurisprudence, au milieu du 20ème siècle.
C’est ainsi que dès 1961, la Cour de cassation exigeait du praticien qu’il délivre une information « simple, approximative, intelligible et loyale ».
L’information devait donc être simplifiée au possible pour être accessible au profane, ce qui excluait également les risques exceptionnels encourus.
Depuis 1995, le devoir d’information a été érigé en obligation déontologique d’origine réglementaire.
Il est intégré au Code de la santé publique, à l’article R 4127-35 :
« Le médecin doit à la personne qu'il examine, qu'il soigne ou qu'il conseille une information loyale, claire et appropriée sur son état, les investigations et les soins qu'il lui propose. Tout au long de la maladie, il tient compte de la personnalité du patient dans ses explications et veille à leur compréhension.
Toutefois, lorsqu'une personne demande à être tenue dans l'ignorance d'un diagnostic ou d'un pronostic, sa volonté doit être respectée, sauf si des tiers sont exposés à un risque de contamination.
Un pronostic fatal ne doit être révélé qu'avec circonspection, mais les proches doivent en être prévenus, sauf exception ou si le malade a préalablement interdit cette révélation ou désigné les tiers auxquels elle doit être faite »
Le devoir d’information a reçu une consécration légale par l’intervention de la loi n°2002-303 du 4 mars 2002 :
« Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. Lorsque, postérieurement à l'exécution des investigations, traitements ou actions de prévention, des risques nouveaux sont identifiés, la personne concernée doit en être informée, sauf en cas d'impossibilité de la retrouver.
Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l'urgence ou l'impossibilité d'informer peuvent l'en dispenser. »
Cette information est délivrée au cours d'un entretien individuel.
La volonté d'une personne d'être tenue dans l'ignorance d'un diagnostic ou d'un pronostic doit être respectée, sauf lorsque des tiers sont exposés à un risque de transmission.
Les droits des mineurs ou des majeurs sous tutelle mentionnés au présent article sont exercés, selon les cas, par les titulaires de l'autorité parentale ou par le tuteur. Ceux-ci reçoivent l'information prévue par le présent article, sous réserve des dispositions de l'article L. 1111-5. Les intéressés ont le droit de recevoir eux-mêmes une information et de participer à la prise de décision les concernant, d'une manière adaptée soit à leur degré de maturité s'agissant des mineurs, soit à leurs facultés de discernement s'agissant des majeurs sous tutelle.
Des recommandations de bonnes pratiques sur la délivrance de l'information sont établies par la Haute Autorité de santé et homologuées par arrêté du ministre chargé de la santé.
En cas de litige, il appartient au professionnel ou à l'établissement de santé d'apporter la preuve que l'information a été délivrée à l'intéressé dans les conditions prévues au présent article. Cette preuve peut être apportée par tout moyen.
L'établissement de santé recueille auprès du patient hospitalisé les coordonnées des professionnels de santé auprès desquels il souhaite que soient recueillies les informations nécessaires à sa prise en charge durant son séjour et que soient transmises celles utiles à la continuité des soins après sa sortie ».
La Cour de cassation, en 1997, relayait ainsi l’exigence de délivrance d’une information « claire, loyale et appropriée » :
« Mais attendu que s'il est exact que le médecin a la charge de prouver qu'il a bien donné à son patient une information loyale, claire et appropriée sur les risques des investigations ou soins qu'il lui propose de façon à lui permettre d'y donner un consentement ou un refus éclairé »
Anticipant les exigences du législateur, les Hautes juridictions civile et administrative considèrent que l’étendue de l’information se prolonge à tous les actes et tous les risques, y compris graves, y compris exceptionnels :
« Mais attendu, d'abord, qu'il appartient au médecin de prouver qu'il a bien donné à son patient une information loyale, claire et appropriée sur les risques graves des investigations ou des soins qu'il lui propose, ou que le patient demande, de façon à lui permettre d'y donner un consentement ou un refus éclairé » (Cass, 27 mai 1998)
« Attendu qu'hormis les cas d'urgence, d'impossibilité ou de refus du patient d'être informé, un médecin est tenu de lui donner une information loyale, claire et appropriée sur les risques graves afférents aux investigations et soins proposés et qu'il n'est pas dispensé de cette obligation par le seul fait que ces risques ne se réalisent qu'exceptionnellement » (Cass, 7 octobre 1998)
« Considérant que lorsque l'acte médical envisagé, même accompli conformément aux règles de l'art, comporte des risques connus de décès ou d'invalidité, le patient doit en être informé dans des conditions qui permettent de recueillir son consentement éclairé ; que, si cette information n'est pas requise en cas d'urgence, d'impossibilité, de refus du patient d'être informé, la seule circonstance que les risques ne se réalisent qu'exceptionnellement ne dispense pas les praticiens de leur obligation » (CE, 5 janvier 2000, n°181899).
Ces jurisprudences demeurent d’actualité :
- Voir par exemple sur la plénitude d’information :
« aucune information sur les différentes techniques envisagées, les risques de chacune et les raisons du choix de M. X... pour l'une d'entre elles » (Cass, 11 mars 2010)
- Voir par exemple sur un risque d’infection nosocomiale :
« Attendu qu'en vertu du second de ces textes, toute personne a le droit d'être informée, préalablement à toute investigation, traitement ou action de prévention qui lui est proposé, sur les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ;
Attendu que pour débouter M. X..., atteint d'une arthrite septique du genou après que M. Y..., médecin, y eut pratiqué une infiltration intra-articulaire, de son action en responsabilité à l'encontre de ce dernier, l'arrêt retient qu'en l'absence de preuve d'un défaut fautif d'asepsie imputable au praticien dans la réalisation de l'acte médical, il ne pouvait être reproché à celui-ci de n'avoir pas informé son patient d'un risque qui n'était pas lié à l'intervention préconisée ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle ne pouvait, en présence d'un risque d'infection nosocomiale scientifiquement connu comme étant en rapport avec ce type d'intervention, se fonder sur la seule absence de faute du praticien dans la réalisation de celle-ci pour déterminer la teneur de son devoir d'information, la cour d'appel a violé le texte susvisé » (Cass, 8 avril 2010)
B. La preuve de la délivrance de l'information :
Depuis 1997, il appartient au médecin de démontrer qu’il a correctement informé son patient sur les risques afférents à l’acte médical, sur les suites de l’acte et sur les alternatives envisageables :
« Attendu que celui qui est légalement ou contractuellement tenu d'une obligation particulière d'information doit rapporter la preuve de l'exécution de cette obligation ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le médecin est tenu d'une obligation particulière d'information vis-à-vis de son patient et qu'il lui incombe de prouver qu'il a exécuté cette obligation, la cour d'appel a violé le texte susvisé » (Cass, 25 février 1997)
« que, dans les circonstances de l'espèce, un tel document n'est pas de nature à établir que les praticiens se sont acquittés de leur obligation d'information ; qu'ainsi, les hospices civils de Lyon ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a reconnu l'existence d'un manquement à cette obligation de nature à engager leur responsabilité » (CE, 5 janvier 2000, n°181899)
Ce renversement de la charge de la preuve a été entériné par le législateur en 2002 :
« En cas de litige, il appartient au professionnel ou à l'établissement de santé d'apporter la preuve que l'information a été délivrée à l'intéressé dans les conditions prévues au présent article. Cette preuve peut être apportée par tout moyen ».
La jurisprudence est relativement exigeante et ne se satisfait pas de simples allégations :
« Attendu que pour écarter la responsabilité de M. Y... et de M. Z... pour méconnaissance de l'obligation d'informer Mme X..., préalablement à l'intervention, des risques liés à celle-ci, la cour d'appel s'est bornée à retenir, pour chacun d'entre eux, qu'il affirmait lui avoir donné oralement tous les éléments d'information et que rien ne permettait de mettre en doute ses affirmations ; qu'en se fondant sur de simples allégations, non corroborées par d'autres éléments de preuve, elle a violé les textes susvisés » (Cass, 14 octobre 2010)
Il faut des éléments tangibles permettant de s’assurer que l’information a été dispensée :
- Tels que des courriers adressés au patient :
« Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment de deux courriers produits au dossier émanant du professeur ayant opéré Mme A et préalables à l'intervention, que celle-ci a été informée des risques liés à l'opération et notamment du risque de paraplégie » (CAA PARIS, 10 juin 2010)
- Et non seulement à son médecin traitant CE, 28 juillet 2011 :
« qu'en application de ces dispositions, il appartient aux praticiens des établissements publics de santé d'informer directement le patient des investigations pratiquées et de leurs résultats, en particulier lorsqu'elles mettent en évidence des risques pour sa santé, à moins que celui-ci n'ait expressément demandé que les informations médicales le concernant ne lui soient délivrées que par l'intermédiaire de son médecin traitant
Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les praticiens des établissements publics de santé ont l'obligation d'informer directement le patient des investigations pratiquées et de leurs résultats, en particulier lorsqu'elles mettent en évidence des risques pour sa santé, à moins que celui-ci n'ait expressément demandé que les informations médicales le concernant ne lui soient délivrées que par l'intermédiaire de son médecin traitant ; qu'il appartient aux établissements publics de santé d'établir que cette information a été délivrée » (CE, 28 juillet 2011)
- Des attestations du patient sur la nature et l’étendue de l’information reçue :
« Considérant que, pour écarter la responsabilité du centre hospitalier de Châteauroux au titre d'un défaut d'information, la cour a relevé que, par une attestation signée antérieurement à l'intervention litigieuse, Mme A avait donné son consentement à la réalisation de cette opération, en certifiant que l'ensemble des risques et complications potentiels de cette chirurgie lui avaient été clairement indiqués ; que cette attestation faisait état de l'entretien individuel que la patiente avait eu avec le praticien qui allait réaliser l'intervention ; qu'en estimant, au vu de ces éléments, que le centre hospitalier établissait lui avoir délivré l'information prévue par l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, la cour n'a pas commis d'erreur de droit » (CE, 14 novembre 2011)
- Un faisceau d’éléments (courriers, consultations et délai de réflexion) :
« Mais attendu qu'après avoir retenu à juste titre que le médecin, à qui incombe la charge de la preuve de ce qu'il a informé son patient dans les conditions prévues à l'article L. 1111-2 du code de la santé publique, peut s'en acquitter par tous moyens, la cour d'appel a constaté qu'il résultait de l'expertise que Mme X... avait déjà subi une intervention d'arthrodèse vertébrale par le même praticien le 17 février 2000 avec un résultat favorable, qu'elle était suivie par ce chirurgien depuis l'année 2000, que les douleurs lombaires étant réapparues en 2002, elle l'avait revu à cette époque puis à de très nombreuses reprises, avant que soit posée l'indication chirurgicale, face à la résistance de la symptomatologie au traitement médical et à la rééducation après trois années d'essai ; qu'elle a relevé en outre que chaque consultation était suivie d'une lettre de M. Y... adressée au médecin traitant, que le chirurgien avait prescrit une IRM lombaire réalisée le 4 janvier 2005 et que l'intervention n'avait été programmée qu'après une nouvelle consultation ; que c'est dès lors dans l'exercice de leur pouvoir souverain d'appréciation que les juges du fond ont estimé que les nombreuses consultations qui avaient précédé l'intervention critiquée démontraient le soin que M. Y... avait pris pour analyser avec Mme X..., en lien avec son médecin traitant, l'ensemble des éléments de nature à fonder un choix éclairé, établissant qu'elle avait reçu toute l'information nécessaire sur l'objectif, les conséquences et les risques prévisibles » (Cass, 12 juin 2012)
Mais, il faut également des éléments tangibles permettant de s’assurer que l’information a été « digérée » :
« qu'elle a ensuite, sans contradiction, constaté qu'en raison du court laps de temps qui avait séparé la consultation initiale et l'opération, M. Y..., n'ayant reçu aucune information sur les différentes techniques envisagées, les risques de chacune et les raisons du choix de M. X... pour l'une d'entre elles, n'avait pu bénéficier d'un délai de réflexion, pour mûrir sa décision en fonction de la pathologie initiale dont il souffrait, des risques d'évolution ou d'aggravation de celle-ci et pour réunir d'autres avis et d'autres informations nécessaires avant une opération grave à risques, ce dont il résultait qu'en privant M. Y... de la faculté de consentir d'une façon éclairée à l'intervention, M. X... avait manqué à son devoir d'information » (Cass, 11 mars 2010)
« qu'elle a d'ailleurs, à la suite de cette information, demandé un délai de réflexion avant de consentir à ladite intervention » (CAA PARIS, 10 juin 2010).
II – La sanction du défaut d'information en terme de préjudice :
A. L’application traditionnelle du principe de perte de chance :
La jurisprudence s’est fixée en 1990 pour considérer que le défaut d’information devait s’apprécier au regard de la perte de chance du patient de se soustraire à un risque qui s’est finalement réalisé :
« Mais attendu qu'en manquant à son obligation d'éclairer M. Y... sur les conséquences éventuelles de son choix d'accepter l'opération qu'il lui proposait, M. X... a seulement privé ce malade d'une chance d'échapper, par une décision peut-être plus judicieuse, au risque qui s'est finalement réalisé, perte qui constitue un préjudice distinct des atteintes corporelles qui seules ont fait l'objet de la demande de réparation de M. Y... » (Cass, 7 février 1990)
Toutefois, s’il est improbable que le patient informé ait renoncé à l’opération, en l’absence d’alternative thérapeutique notamment, la jurisprudence considérait qu’il n’existe pas de lien de causalité entre le défaut d’information et le préjudice allégué :
« que c'est par une appréciation souveraine tirée de ces constatations que la cour d'appel a estimé qu'informé du risque de perforation, M. X... n'aurait refusé ni l'examen, ni l'exérèse du polype, de sorte qu'il ne justifiait d'aucun préjudice indemnisable » (Cass, 20 juin 2000)
« qu'enfin, la violation de l'obligation d'information incombant au praticien ne peut être sanctionnée qu'autant qu'il en résulte un préjudice dont l'existence est souverainement constatée par les juges du fond ; que c'est donc à bon droit que la cour d'appel, qui a relevé qu'il n'était pas démontré qu'informée du risque exceptionnel tenant à l'acte chirurgical dont la nécessité était admise par l'expert compte tenu du danger inhérent à la présence d'un nodule, la patiente aurait refusé l'intervention et en déduit qu'elle ne démontre pas que l'absence d'information lui ait causé un préjudice indemnisable, a statué comme elle l'a fait » (Cass, 13 novembre 2002)
Au-delà de cette notion de perte de chance, la jurisprudence refusait tout autre chef d’indemnisation, notamment pour préjudice moral :
« Attendu que l'arrêt retient que le manquement, par M. Y..., à son devoir d'information à l'égard de Jean-Louis X... avait été la source d'un préjudice moral ;
Qu'en statuant ainsi, quand le seul préjudice indemnisable à la suite du non-respect de l'obligation d'information du médecin, laquelle a pour objet d'obtenir le consentement éclairé du patient, est la perte de chance d'échapper au risque qui s'est finalement réalisé, la cour d'appel a violé les textes susvisés » (Cass, 6 décembre 2007)
Enfin et s’agissant de l’évaluation du préjudice, la jurisprudence raisonne en plusieurs temps, à savoir :
1°) Quelle est l’étendue du préjudice final ?
2°) Quel est le pourcentage de chance perdue au regard de l’état de santé du patient, de l’évolution prévisible de la pathologie, du risque afférent à l’intervention et des effets probables de l’information ?
3°) Application du pourcentage de chance perdue au préjudice final
« Attendu que l'indemnité due à la victime d'un accident médical qui a perdu une chance, du fait d'un défaut d'information sur les risques d'une intervention chirurgicale dans les conditions prévues par le second de ces textes, d'éviter le dommage en refusant définitivement ou temporairement l'intervention projetée, doit être déterminée en fonction de son état et de toutes les conséquences qui en découlent pour elle et correspondre à une fraction, souverainement évaluée, de ses préjudices » (Cass, 9 février 2012)
« qu'en se fondant sur un tel motif, alors qu'il lui appartenait seulement, pour déterminer si la patiente avait été privée d'une chance d'éviter le dommage, de vérifier si, eu égard à son état de santé et aux alternatives thérapeutiques existantes, elle avait la possibilité de refuser l'intervention qui lui était proposée, la cour a commis une erreur de droit ; que si elle a également relevé que Mme A ne demeurait atteinte d'aucune séquelle invalidante, une telle circonstance n'était pas de nature à faire disparaître son droit à réparation, dès lors que le risque qui s'était réalisé avait entraîné une invalidité temporaire qui n'avait pu être réparée que par une nouvelle intervention » (CE, 2 juillet 2010)
B. La consécration d'un préjudice spécifique et autonome :
Depuis 2010, la jurisprudence a procédé à un revirement en consacrant un droit automatique à indemnisation dès lors qu’est constaté un défaut d’information.
« Vu les articles 16, 16-3, alinéa 2, et 1382 du code civil ;
Attendu qu'il résulte des deux premiers de ces textes que toute personne a le droit d'être informée, préalablement aux investigations, traitements ou actions de prévention proposés, des risques inhérents à ceux-ci, et que son consentement doit être recueilli par le praticien, hors le cas où son état rend nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle elle n'est pas à même de consentir ; que le non-respect du devoir d'information qui en découle, cause à celui auquel l'information était légalement due, un préjudice, qu'en vertu du dernier des textes susvisés, le juge ne peut laisser sans réparation ;
Attendu que pour écarter toute responsabilité de M. Y... envers M. X..., l'arrêt, après avoir constaté le manquement du premier à son devoir d'information, retient qu'il n'existait pas d'alternative à l'adénomectomie pratiquée eu égard au danger d'infection que faisait courir la sonde vésicale, qu'il est peu probable que M. X..., dûment averti des risques de troubles érectiles qu'il encourait du fait de l'intervention, aurait renoncé à celle-ci et aurait continué à porter une sonde qui lui faisait courir des risques d'infection graves ;
En quoi la cour d'appel a violé, par refus d'application, les textes susvisés » (Cass, 3 juin, 2010)
« Mme X..., qui n'avait perdu aucune chance de pouvoir choisir entre une technique opératoire et un traitement médicamenteux puisque l'intervention était médicalement indispensable, ne rapportant pas la preuve d'un préjudice en lien de causalité avec le défaut d'information imputable au médecin ;
Qu'en statuant ainsi, alors que toute personne a le droit d'être informée, préalablement aux investigations, traitements ou actions de prévention proposés, des risques inhérents à ceux-ci, que son consentement doit être recueilli par le praticien, hors le cas où son état rend nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle elle n'est pas à même de consentir et que le non-respect du devoir d'information qui en découle cause à celui auquel l'information était légalement due un préjudice que le juge ne peut laisser sans réparation, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés » (Cass, 26 janvier 2012)
« Attendu que le non-respect par un médecin du devoir d'information dont il est tenu envers son patient, cause à celui auquel cette information était légalement due un préjudice qu'en vertu du texte susvisé le juge ne peut laisser sans réparation » (Cass, 12 juin 2012)
La jurisprudence de 2007 est donc mise à néant et la constatation de l’absence d’alternative thérapeutique n’est pas de nature à dispenser le médecin de l’obligation d’information.
En doctrine, deux théories s’affrontent quant à la nature du préjudice :
Soit il s’agit d’un préjudice d’impréparation quant aux conséquences, ce qui suppose la réalisation du risque et la constatation d’un lien de causalité.
Mais la jurisprudence actuelle est très affirmative en ce qu’elle consacre, en toute hypothèse, un droit à indemnisation.
Soit il s’agit effectivement d’un préjudice moral correspondant à la violation d’un droit subjectif.
Toutefois, une telle analyse pourrait ouvrir la voie à une indemnisation automatique d’un patient bien soigné et bien portant pour atteinte à son droit patrimonial à l’information !
Très récemment, la Cour de Cassation a eu l’occasion de se prononcer en considérant qu’il s’agissait d’un préjudice moral destiné à réparer un droit subjectif et un défaut de préparation :
« Mais attendu que l'arrêt énonce que, s'agissant d'un droit personnel, détaché des atteintes corporelles, accessoire au droit à l'intégrité physique, la lésion de ce droit subjectif entraîne un préjudice moral, résultant d'un défaut de préparation psychologique aux risques encourus et du ressentiment éprouvé à l'idée de ne pas avoir consenti à une atteinte à son intégrité corporelle » (Cass, 12 juillet 2012).
A noter que ce revirement n’est pas repris par les juridictions administratives qui s’en tiennent au seul principe de perte de chance :
« que le défaut d'information ouvre droit à réparation lorsqu'il a eu pour conséquence la perte par le patient d'une chance d'échapper, en refusant de subir l'acte qui lui était proposé, au dommage qui a résulté pour lui de la réalisation d'un risque de décès ou d'invalidité » (CE, 2 juillet 2010)
« Considérant en revanche qu'un manquement des médecins à leur obligation d'information n'engage la responsabilité de l'hôpital que dans la mesure où il a privé le patient de la possibilité d'éviter le risque lié à l'intervention ; que, dès lors, Mme A n'est pas fondée à demander réparation du préjudice moral qui aurait résulté pour son mari du seul fait de la méconnaissance par les Hospices civils de Lyon de leur obligation d'information » (CAA LYON, 19 avril 2012).
Cet article n'engage que son auteur.
Crédit photo : © James Steidl - Fotolia.com
Auteur
Flavien MEUNIER
Avocat Associé
LEXCAP NANTES
NANTES (49)
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