
Le versement de bonus et de primes d’objectifs en France et en Espagne
Publié le :
17/04/2015
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2015
Dans une décision rendue le 12 février 2015, la chambre sociale de la Cour de Cassation française a reconnu que la situation économique d’une entreprise peut justifier le non-versement des primes d’objectifs.Cet arrêt confirme la décision de la Cour d’appel favorable à l’entreprise qui avait licencié son employé pour des raisons économiques sans lui verser ses primes d’objectifs. Les prétentions du salarié avaient donc été rejetées au motif que la situation économique de l’entreprise ne permettait aucune visibilité sur le long-terme, et qu’aucune autre prime n’avait été versée.
Ainsi, la Cour de Cassation va revenir sur les éléments qui permettent de qualifier la situation économique de l’entreprise.
On pourra ainsi noter : l’inversion de tendance dans l’activité globale de l’employeur ainsi que le contexte aléatoire et régressif dans lequel agissait l’entreprise. Cela ne permettant aucune visibilité au cours de l’année, durant laquelle aucune prime d’objectifs n’a donc été versée.
Cette décision introduit plus de flexibilité dans le système en place jusqu’alors plus protecteur envers le salarié qu’envers l’employeur. En l’espèce, le juge a retenu la situation économique de l’entreprise et le contexte dans lequel elle agit, et a refusé le bonus à l’employé.
Afin de comprendre en quoi cela constitue un assouplissement dans la protection des salariés en cas de licenciement, il convient de revoir le régime d’attribution des primes d’objectifs en France.
Il revient à l’entreprise en fonction de sa politique interne d’attribuer des primes et bonus pour la réalisation d’objectifs déterminés. Cette rémunération variable résulte de la réalisation par le salarié d’objectifs fixés annuellement et d’un commun accord.
Ainsi, le salarié bénéficie d’un droit d’information sur le mode de calcul de sa prime. Les conditions qu’impose l’employeur pour l’octroi de cette rémunération ne peuvent être fixées unilatéralement, et l’employé doit en avoir connaissance.
En plus de ce droit dont est titulaire le salarié, le droit français permet de faire intervenir le juge afin de déterminer les objectifs de résultats à atteindre par référence aux années ultérieures. Si au cours de cette procédure, l’employeur ne peut apporter de réponse claire sur les conditions de calcul de cette prime, il aura commis une faute et se verra obligé par le juge à payer au salarié le montant maximum de la prime, selon une jurisprudence constante.
Étant donné le champ d’action des entreprises sur le territoire européen, il est toujours intéressant d’avoir un aperçu de l’état du droit de nos voisins sur certains aspects pratiques. Ainsi, nous tenterons d’exposer brièvement ce que dit le droit espagnol sur le versement des primes d’objectifs.
En Espagne, le « bonus » fait partie des compléments de salaire tels que définis à l’article 26.3 du Statut des Travailleurs (Estatuto de los Trabajadores). Le bonus peut se définir comme un système de rémunération lié à la situation et aux résultats de l’entreprise, et à la réalisation de certains objectifs par ses employés. Son octroi dépend donc de divers facteurs, laissés à la libre-détermination par l’entreprise.
Toute modification de la prime constitue une modification du contrat de travail et est donc régie par l’article 41 du ST. Néanmoins les dispositions du code civil espagnol contenues dans les articles 1115 et 1256 s’appliquent aussi, étant donné le caractère négocié de cette rémunération.
Aussi, on peut noter un premier point commun entre droit espagnol et droit français : il est admis que le salarié pourra tout de même toucher sa prime en cas de non-respect par l’employeur de la nécessaire communication à son salarié des conditions d’attribution de la prime et objectifs à atteindre. En effet, si l’entreprise ne procède pas à une fixation claire des objectifs alors le juge procède à une interprétation « la plus adéquate afin que la clause contenant l’existence de la prime puisse produire des effets ».
De même, en Espagne, comme cette rémunération est de nature salariale, elle doit faire partie de l’indemnisation de départ en cas de licenciement. Il existe seulement 2 hypothèses qui permettent de ne pas inclure le montant de la prime dans cette indemnisation : le cas où les parties ont conclu de sa non prise en compte dans le calcul de l’indemnisation ; et le cas où un bonus a été versé de manière exceptionnelle, indépendamment de la réalisation d’objectifs.
Par contre, une différence constatée par une étude de la jurisprudence permet de conclure qu’en Espagne, le juge ne retient pas la situation financière de l’entreprise qui licencie pour des motifs économiques.
Dans une décision du 4 décembre 2013, le tribunal supérieur de justice de Madrid a utilisé une jurisprudence constante en jugeant que « autant dans le cas d’un licenciement objectif ou dans le cas d’un licenciement qualifié d’abusif, le calcul des indemnisations doit s’effectuer à travers le montant du salaire, selon les termes de l’article 26.1 du ST. Auquel s’ajoute le bonus perçu durant l’année du licenciement ».
Cet article a été rédigé par:Nicolás Melchior – Avocat chez Mariscal Abogados & Asociados
Astrid Berthomieu - Juriste spécialisée en droit de l'Union Europénne, stagiaire chez Mariscal Abogados & Asociados
Le cabinet Mariscal Abogados & Asociados est membre d'Eurojuris Espagne.
Cet article n'engage que son auteur.
Crédit photo : © JNT Visual - Fotolia.com
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