L’opposition à la déclaration préalable d’un projet soumis à permis de construire
Publié le :
03/10/2014
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Le maire a l'obligation de s'opposer à une simple déclaration préalable si le projet qui lui est soumis est en réalité soumis au régime du permis de construire.C'est le rappel effectué par le Conseil d'Etat dans une décision rendue le 9 juillet 2014, commune de CHELLES, n° 373295, décision qui, au-delà de ce rappel, offre l'occasion de faire le point sur la procédure contentieuse en ces temps de réforme du contentieux de l'urbanisme.
1. A l'origine de cet arrêt
Dans cette affaire, la société ORANGE FRANCE avait déposé une déclaration préalable pour la construction d'un relais de téléphonie mobile comportant un mât support d'antenne d'une hauteur de 24 mètres et un local technique attenant de 8,5 mètres carrés.
Le maire de la commune de CHELLES s'était opposé à ce projet au motif qu'il était de nature à porter atteinte au caractère des lieux avoisinants et aux paysages naturels et urbains.
Saisi par la société ORANGE FRANCE, le tribunal administratif de MELUN avait annulé pour excès de pouvoir cet arrêté et avait enjoint au maire de réexaminer la demande dans un délai déterminé.
L'affaire fut portée directement devant le Conseil d'Etat, l'appel n'étant pas ouvert contre les jugements rendus en matière de déclarations préalables, ce qui, comme nous le verrons, a changé depuis le 1er janvier 2014.
2. Rappel de principes par le Conseil d'Etat
Après avoir rappelé l'articulation entre les différentes autorisations d'urbanisme concernées par ce type de projet d'antenne relai, permis de construire (Art. L. 421-1 C. Urb.), déclaration préalable (Art. R. 421-2 à R. 421-8 C.Urb) et dispense de toute formalité (Art. R. 421-9 à R. 421-12 C. Urb.), le Conseil d'Etat annule le jugement rendu par le Tribunal administratif en rappelant deux principes :
1. Une antenne relai et le local technique nécessaire à son fonctionnement constitue un ensemble fonctionnel indissociable
Cette appréciation globale du projet exclu le bénéfice des exceptions mentionnées au a) et c) de l'article R. 421-9 du code de l'urbanisme : autrement dit, tout projet d'installation d'une antenne relai de plus de 12 mètres sera soumis à la délivrance d'un permis de construire sauf si le local technique nécessaire à son fonctionnement à une surface SHON inférieure à 2 mètres carrés.
En l'espèce, ce local technique mesurait 8,5 mètres carrés, le projet nécessitait donc impérativement un permis de construire alors qu'une simple déclaration préalable avait été déposée.
2. Le maire saisie d'une déclaration préalable pour un projet qui doit légalement faire l'objet d'un permis de construire à l'obligation de s'opposer à cette déclaration préalable et doit inviter le pétitionnaire à présenter une demande de permis de construire
Le Conseil d'Etat rappel que le maire est ici en situation de compétence liée, c’est-à-dire qu'il ne dispose d'aucun pouvoir d'appréciation ni d'aucun choix pour l'édiction de sa décision : il ne peut que constater l'existence ou l'absence des conditions légales.
Si le projet est soumis au régime du permis de construire, le maire ne peut que s'opposer à la déclaration préalable.
En matière de contentieux, cela à une conséquence redoutable :
Si le maire s'oppose à la déclaration préalable pour un autre motif que celui tiré de la nécessité de déposer un permis de construire, comme par exemple en l'espèce au motif que le projet ne s'intègrerait pas dans son environnement, la contestation de ce motif devant le juge sera inopérante, c’est-à-dire sans effet, inefficace.
Peu importe l'illégalité du motif retenu, si le maire était de toute façon tenu de s'opposer à la déclaration préalable.
3. Conséquence pratique
L'intérêt pratique de cet arrêt est de rappeler au justiciable qu'avant même d'introduire un recours contre une opposition à déclaration préalable, il est indispensable de s'assurer que le projet relève effectivement de ce régime et non pas du régime du permis de construire, hypothèse dans laquelle le recours sera sans aucun intérêt.
4. Un contentieux de l'urbanisme à plusieurs vitesses
Cet arrêt, par lequel le Conseil d'Etat statut sur un jugement rendu en premier et dernier ressort par le Tribunal administratif de Melun, offre l'occasion de faire un point rapide sur le contentieux de l'urbanisme qui a connu d'importantes modifications avec les décrets du 13 août 2013 (n° 2013-730) et 1er octobre 2013 (n° 2013-879).
4.1 En matière de déclaration préalable :
Jusqu'à très récemment les jugements rendus en matière de déclaration préalable étaient insusceptibles d'appel en application des articles R. 222-13 et R. 811-1 du Code de justice administrative.
Désormais et depuis le 1er janvier 2014, le recours en appel est ouvert à l'encontre des jugements rendus en matière de déclaration préalable : le double dégrée de juridiction est rétabli !
(Décret n° 2013-730 du 13/08/2013 modifiant l'article R. 811-1 du Code de justice administrative)
4.2 En matière de permis de construire :
C'est l'inverse : le double dégrée de juridiction est supprimé…mais pas partout !
En effet, depuis le 1er décembre 2013 et jusqu'au 1er décembre 2018 les tribunaux administratif statuent en premier et dernier ressort sur les recours contre les permis de construire ou de démolir un bâtiment à usage principal d'habitation ou contre les permis d'aménager un lotissement lorsque le bâtiment ou le lotissement est implanté en tout ou partie sur le territoire d'une commune qui se caractérise par un déséquilibre marqué entre l'offre et la demande de logements.
(Décret n° 2013-879 du 1er oct. 2013 créant un article R. 811-1-1 du Code de justice administrative)
Cette suppression de l'appel ne concerne dons pas l'ensemble des justiciables, quelques exceptions subsistants toujours.
Le contentieux de l'urbanisme est donc "légalement" un contentieux à plusieurs vitesses !
Cet article n'engage que son auteur.
Crédit photo : © delkoo - Fotolia.com
Auteur
ROUSSE Christian
Historique
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