Procédure de divorce: l'effet dévolutif de l’appel et le maintien du devoir de secours
Publié le :
19/07/2013
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Est-il possible, malgré le fait que l’acceptation des époux ne soit susceptible d’aucune rétractation par la voie de l’appel, d’interjeter appel général du jugement dans l’unique objectif de maintenir le devoir de secours pendant l’instance d’appel ?Conséquence de l’effet dévolutif de l’appel sur le maintien ou non du devoir de secours pendant l’instance d’appel
Il résulte de l’article 562 du Code de Procédure Civile que :
« L’appel ne défère à la Cour que la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément ou implicitement et de ceux qui en dépendent.
La dévolution s’opère pour le tout lorsque l’appel n’est pas limité à certains chefs, lorsqu’il tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible ».
Un arrêt récent de la Cour de Cassation, se fondant sur les dispositions de cet article, est venu en rappeler les conséquences, en matière de divorce, sur la situation matrimoniale des époux. Ainsi, la Haute Cour a-t-elle rappelé que l’appel général interjeté à l’encontre d’un jugement statuant sur les conséquences d’un divorce emportait une dévolution pour le tout, la limitation des critiques dans les conclusions des parties à certains chefs du jugement, ne valant pas acquiescement et n’emportant pas d’effet sur leur situation matrimoniale (Cass. 2ème civ. 31 janvier 2013 n°11-29.004).
Autrement dit, c’est la déclaration d’appel et non les conclusions des parties, qui fixe les limites de la discussion devant la Cour. Rien n’empêche cependant, dans le cadre d’un appel général, de limiter la discussion qu’à certains chefs du jugement dans le cadre des conclusions.
Dès lors, les conséquences de la limitation ou non d’un appel sur le paiement d’une pension au titre du devoir de secours pendant l’instance en divorce, apparaît très clairement.
Ainsi, si l’on se place du point de vue de l’époux créancier d’une telle pension, l’intérêt sera de limiter la discussion en appel, dans le cadre de la déclaration, aux seules conséquences du divorce et de permettre ainsi au devoir de secours de disparaitre alors que le prononcé du divorce, non remis en question deviendra, quant à lui, définitif. A l’inverse, il conviendra de ne pas limiter l’appel dans la déclaration et d’interjeter appel général du jugement de divorce, si l’intérêt de l’époux débiteur est de maintenir la pension au titre du devoir de secours durant l’instance pendante devant la Cour.
La durée des procédures en appel permet de comprendre l’intérêt d’une telle stratégie sur la situation de l’un ou de l’autre des époux.
La question s’est alors posée de savoir ce qu’il en était des conséquences d’une déclaration d’appel général sur un jugement prononçant un divorce pour acceptation du principe de la rupture du mariage.
En effet, il résulte de l’article 233 du Code Civil que « le divorce peut être demandé par l’un ou l’autre des époux ou par les deux époux lorsqu’ils acceptent le principe de la rupture du mariage sans considération des faits à l’origine de celle-ci.
Cette acceptation n’est susceptible de rétractation, même par la voie de l’appel ».
Autrement dit, est-il possible, malgré le fait que l’acceptation des époux ne soit susceptible d’aucune rétractation par la voie de l’appel, d’interjeter appel général d’un tel jugement dans l’unique objectif de maintenir le devoir de secours pendant l’instance d’appel ?
La question a été tranchée par la Cour de cassation à propos du divorce sur demande acceptée dont est issu, depuis la loi du 26 mai 2004, le divorce pour acceptation du principe de la rupture du mariage dans un arrêt rendu en date du 4 juin 2007 (Cass. Civ. 1ère 4.06.07 n°05-20.079) :
« (…) Attendu qu’ayant relevé que la déclaration d’appel formée par Mr Y… à l’encontre du jugement du 3 juin 1996 ayant prononcé le divorce sur double aveu, n’était pas limitée aux conséquences de celui-ci et que la Cour avait, dans le dispositif de l’arrêt du 2 septembre 2002, confirmé les dispositions du jugement autres que celles relatives à la prestation compensatoire et aux pensions alimentaires destinées aux enfants, c’est sans dénaturer l’arrêt servant de base aux poursuites que la Cour d’Appel qui a justement énoncé que l’autorité de chose jugée n’avait lieu qu’à l’égard de ce qui avait été tranché dans le dispositif, en a justement déduit que la décision prononçant le divorce n’était pas passée en force de chose jugée et que la pension alimentaire allouée à l’épouse pour la durée de l’instance restait due (…) ».
Dans un avis rendu en 2008, la Cour de Cassation avait rappelé que l’appel général d’un jugement prononçant un divorce sur le fondement des articles 233 et 234 du Code Civil, même si l’acceptation du principe de la rupture du mariage ne peut plus être remis en cause, sauf vice du consentement, ne met pas fin au devoir de secours, la décision n’acquérant force de chose jugée qu’après épuisement des voies de recours (avis n°008004P du 9 Juin 2008).
Il n’y a donc aucune ambiguïté sur ce point.
La seule limite à ce principe réside dans l’existence d’un appel incident qui pourrait élargir l’étendue de la dévolution en cas de limitation de l’appel dans la déclaration aux seules conséquences du divorce. L’arrêt de la Cour de Cassation en date du 23 mai 2012 est sur ce point intéressant (Cass. Civ. 2ème 23 mai 2012, n° 11-12.813 : Juris Data n° 2012-010787). Ainsi, a-t-il été jugé que :
« (...) après avoir relevé que ni l'appel limité du mari, ni les conclusions d'appel incident limité de son épouse n'avaient remis en cause le prononcé du divorce, la cour d'appel en a exactement déduit que le jugement de divorce du 25 octobre 2000 était passé en force de chose jugée à la date de l'appel incident limité ».
En conséquence, si l’appel limité peut être un obstacle à l’effet dévolutif de l’appel, l’appel incident de l’intimé, peut l’être tout autant.
L'auteur de l'article:Anne DE REVIERS, avocate à Poitiers.
Cet article n'engage que son auteur.
Crédit photo : © richard villalon - Fotolia.com
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