
Garantie décennale : pour que les désordres soient réparables, il faut qu’ils soient survenus...
Publié le :
02/05/2018
02
mai
mai
05
2018
Cour de cassation, Chambre civile 3, 28 févr. 2018, n° 17-12460
A la suite de travaux réceptionnés le 01/10/2001, des maitres d'ouvrage ont estimé que des désordres seraient susceptibles d'affecter le réseau d'assainissement.
A l'occasion d'une réunion d'expertise, soit le 3 octobre 2011, il n'existait pas de désordre selon les écrits de l'expert judiciaire. Cependant, l'expert judiciaire n'excluait pas la survenance, à court terme, d'un désordre. Autrement dit, à ce stade, les désordres invoqués n'entraient pas dans la catégorie des désordres de nature décennale. Ces désordres étaient susceptibles de pouvoir être qualifiés de désordre de nature décennale dans une délai non précisément déterminé.
En l'espèce, au terme du délai d'épreuve décennal, soit courant 2011, valablement interrompu par la demande d'expertise judiciaire, il n'existait pas de désordre constaté. L'expert avait ainsi estimé que "l'écoulement des eaux dans les réseaux étant satisfaisant au jour du dépôt du rapport définitif".
Pendant un temps, la jurisprudence de la cour de cassation permettait une interprétation extensive de l'article 1792 du Code civil considérant que ce type de désordres non encore réalisés pouvaient être qualifiés de désordre futur lorsqu'il apparaissait certain qu'ils rendraient l'ouvrage impropre à sa destination. La cour d'appel de Pau avait jugé en prenant en compte cette interprétation. Elle est sanctionnée par la Cour de cassation à l'occasion de cet arrêt du 28 février 2018.
En effet, depuis 2002, la Cour de cassation est revenue à plus de rigueur : les dommages ne présentant pas encore la gravité de l'article 1792 ne pourront être pris en charge au titre de la garantie décennale que dans la mesure où, à raison de leur caractère évolutif, ils revêtiront certainement dans les dix ans à compter de la réception, la gravité requise (Civ. 3e, 3 déc. 2002, n° 01-13.855 , NP – Civ. 3e, 29 janv. 2003, 3 arrêts, n° 00-21.091 , 01-13.034 , 01-14.698 , Bull. civ. III, n° 18 ; RDI 2003. 185, obs. P. Malinvaud ; JCP 2003. II. 10077, avis av. gén. Guérin).
Reste qu'en l'espèce, l'action de maîtres d'ouvrage n'est pas définitivement exclue dès lors que l'interruption de la prescription leur permet d'agir plus tard lorsque les désordres se seront effectivement réalisés. L'interruption permise par l'action en justice a pour effet d'ouvrir au maître de l'ouvrage un nouveau délai, de même durée que celui interrompu, soit 10 ans, pour demander la réparation des désordres ( art. 2231 du Code civil).
Cet article n'engage que son auteur.
Crédit photo : © Michael Flippo - Fotolia.com
Auteur

ALCALDE Céline
Avocate Associée
DELRAN BARGETON DYENS SERGENT ALCALDE , DELRAN BARGETON DYENS SERGENT ALCALDE
MONTPELLIER (30)
Historique
-
Garantie décennale : pour que les désordres soient réparables, il faut qu’ils soient survenus...
Publié le : 02/05/2018 02 mai mai 05 2018Particuliers / Patrimoine / ConstructionCour de cassation, Chambre civile 3, 28 févr. 2018, n° 17-12460 A la suite de travaux réceptionnés le 01/10/2001, des maitres d'ouvrage ont estimé que d...
-
Un fournisseur peut-il se voir appliquer la qualité de constructeur ?
Publié le : 26/03/2018 26 mars mars 03 2018Particuliers / Patrimoine / ConstructionVoici donc un fournisseur qui, au motif qu’il exécute son obligation de conseil et d’information à l’égard d’un entrepreneur qui n’est pas son co-contracta...
-
Le caractère indéterminé d'un sinistre peut-il constituer une cause d'exonération de responsabilité sur le fondement de la garantie décennale des constructeurs ?
Publié le : 26/03/2018 26 mars mars 03 2018Particuliers / Patrimoine / ConstructionLa Cour de cassation a considéré que l’origine électrique du sinistre, déterminée par l’expert de justice, constituait la preuve suffisante d’une imputabil...
-
Quelques précisions sur la réception judiciaire
Publié le : 15/03/2018 15 mars mars 03 2018Particuliers / Patrimoine / ConstructionPar plusieurs arrêts intervenus en 2017, la Cour de cassation a précisé les contours de la réception judiciaire, ce qui est l’occasion d’en rappeler les fo...
-
Les murs de soutènement : définition de la propriété
Publié le : 28/02/2018 28 février févr. 02 2018Particuliers / Patrimoine / ConstructionDe nombreuses décisions de justice se penchent sur la question de la propriété des murs de soutènement. Il est évident que les enjeux techniques, juridi...
-
Vue chez le voisin : quelle distance faut-il respecter ? Dans quel(s) cas ?
Publié le : 15/02/2018 15 février févr. 02 2018Particuliers / Patrimoine / ConstructionSi un propriétaire peut en principe revendiquer la démolition des constructions voisines ouvrant une vue directe sur son terrain, c’est aux seules conditio...
-
Taxe d'aménagement : quels tarifs au mètre carré pour 2018 ?
Publié le : 07/02/2018 07 février févr. 02 2018Particuliers / Patrimoine / ConstructionLes valeurs au m2 de surface de construction, constituant l'assiette de la taxe d'aménagement perçue à l'occasion de la construction, de la reconstruction...