Bail commercial : point de départ de la prescription de l'action en augmentation de loyer
Publié le :
03/11/2021
03
novembre
nov.
11
2021
La Cour de Cassation a eu à se prononcer sur le délai de prescription de l’action en augmentation de loyer en raison de l’existence d’une sous-location.Nous savons que toutes les actions exercées sur le fondement du statut des baux commerciaux relèvent de la prescription biennale sur le fondement de l’article L 145-60 du Code de Commerce.
Le juge des loyers commerciaux doit donc être saisi dans un délai de deux ans faute de voir l’action du demandeur déclarée irrecevable et prescrite.
Ainsi, nous savons que pour une demande de révision de loyer le point de départ de la prescription est la date d’expédition de la demande de révision par lettre recommandée avec accusé de réception.
Pour une action en fixation du loyer renouvelée, qu’il s’agisse d’un congé avec offre de renouvellement ou d’une demande de renouvellement acceptée par le bailleur à l’intérieur du délai légal, le point de départ de la prescription est la date d’effet du nouveau bail, c’est-à-dire la date pour laquelle le congé a été donné.
Si le bailleur accepte la demande de renouvellement après l’expiration du bail à renouveler, le délai de prescription court au terme des trois mois impartis au bailleur pour répondre.
Qu’en est-il dans le cadre d’une action en augmentation du loyer principal en cas de sous-location ?
L’article L 145-31 du Code de Commerce prévoit qu’en cas de sous-location autorisée, le propriétaire est appelé à concourir à l’acte.En principe, sauf stipulation contraire au bail ou accord du bailleur, toute sous-location totale ou partielle est interdite.
L’article L 145-31 alinéa 3 prévoit que lorsque le loyer de la sous-location est supérieur au prix de la location principale, le propriétaire a la faculté d'exiger une augmentation correspondante du loyer de la location principale, augmentation qui, à défaut d'accord entre les parties, est déterminée selon une procédure fixée par décret en Conseil d'Etat, en application des dispositions de l'article L. 145-56.
En l’espèce, la Cour d’Appel de RENNES, par arrêt du 1er juillet 2020, avait considéré que la demande du bailleur était prescrite comme intervenue au-delà de deux ans, car l’action tendant à l’augmentation du loyer du bail commercial fondée sur l’article L 145-31 alinéa 2 du Code de Commerce se prescrit par deux ans à compter de la date à laquelle le bailleur a eu connaissance du fait que le prix de la sous-location était supérieur au loyer principal.
La Cour d’Appel de RENNES avait déclaré prescrite l’action du bailleur, car la SCI avait découvert courant 2008 la mise en sous-location par son locataire d’espaces de bureaux et avait, dès ce moment, pu obtenir de la locataire tout renseignement sur les conditions de ces locations.
Dès lors, elle devait introduire sa demande dans le délai de deux ans suivant cette découverte.
La Cour de Cassation, dans son arrêt du 9 septembre 2021 (Cour de cassation, 3ème chambre civile, 9 septembre 2021, n° 20-19.631), considère au contraire que la prescription de l’action en augmentation de loyer en raison de l’existence d’une sous-location commence à courir à compter du jour où le bailleur a connaissance du montant du loyer du sous-bail.
Cela veut dire que la prescription ne démarre pas à compter du jour où le bailleur a connaissance de l’existence d’un sous-locataire, mais du jour où il a connaissance du montant du loyer pratiqué par le locataire principal à l’égard du sous-locataire.
Cette jurisprudence est favorable au bailleur.
Cette jurisprudence laisse interrogatif.
En effet, aux termes de l’article L 145-31 du Code de Commerce, la sous-location totale ou partielle est en principe interdite.
Si elle est autorisée, le propriétaire est appelé à concourir à l’acte.
S’il est appelé à concourir à l’acte, il est amené à connaître le montant du loyer de la sous-location.
Ce n’est que dans l’hypothèse où la sous-location est interdite et qu’elle a eu lieu sans le concours à l’acte qui est obligatoire aux termes de l’article L 145-31, que le bailleur devrait pouvoir échapper à la prescription.
La distinction opérée par la Cour de Cassation entre la connaissance de l’existence du bail et la connaissance du montant du loyer pratiqué dans le cadre de la sous-location n’apparaît pas pertinente.
Il faudra donc suivre l’évolution de cette jurisprudence.
Cet article n'engage que son auteur.
Auteur
MEDINA Jean-Luc
Avocat Associé
CDMF avocats , Membres du conseil d'administration
GRENOBLE (38)
Historique
-
Loyer du bail renouvelé : conditions de fixation à la valeur locative
Publié le : 04/01/2022 04 janvier janv. 01 2022Entreprises / Gestion de l'entreprise / Construction ImmobilierL’arrêt commenté (Cour Cass., 3ème civ., 13 octobre 2021, n° 20-12.901) est intéressant, car il traite d’un problème très courant. Des bailleurs ont a...
-
Actions en démolition d'un ouvrage et contrôle de proportionnalité sur la solution réparatoire
Publié le : 22/12/2021 22 décembre déc. 12 2021Particuliers / Patrimoine / ConstructionEntreprises / Gestion de l'entreprise / Construction ImmobilierDeux arrêts intéressants ont été rendus dans le courant de l'année 2021 en matière de contrôle de proportionnalité exercé par la Cour de cassation dans le...
-
Travaux de terrassement sans apports de matériaux et garantie décennale
Publié le : 10/12/2021 10 décembre déc. 12 2021Particuliers / Patrimoine / ConstructionEntreprises / Gestion de l'entreprise / Construction ImmobilierLa responsabilité décennale des constructeurs pouvant être engagée sur le fondement des articles 1792 et suivants du Code civil concerne les dommages - mêm...
-
Clarification salutaire sur l'exercice du droit de préférence du preneur à bail commercial
Publié le : 09/12/2021 09 décembre déc. 12 2021Entreprises / Gestion de l'entreprise / Construction ImmobilierIl résulte des dispositions de l’article L 145-46-1 du Code de commerce que le propriétaire d’un local à usage commercial qui souhaite le vendre doit notif...
-
Bail commercial : inapplication de la prescription biennale et fraude
Publié le : 30/11/2021 30 novembre nov. 11 2021Entreprises / Gestion de l'entreprise / Construction ImmobilierUne société exploitante de deux hôtels a conclu un contrat de prestations de services avec une société, en mettant à sa disposition un local, le linge néce...
-
Bail commercial : point de départ de la prescription de l'action en augmentation de loyer
Publié le : 03/11/2021 03 novembre nov. 11 2021Entreprises / Gestion de l'entreprise / Construction ImmobilierLa Cour de Cassation a eu à se prononcer sur le délai de prescription de l’action en augmentation de loyer en raison de l’existence d’une sous-location. N...
-
Motif de déplafonnement et point de départ du taux d’intérêt
Publié le : 02/11/2021 02 novembre nov. 11 2021Entreprises / Gestion de l'entreprise / Construction ImmobilierL’arrêt de la 3ème chambre civile la Cour de cassation du 9 septembre 2021, publié au Bulletin, est très intéressant, car il revient sur deux points import...