
Crédit photo : © Olivier Le Moal
La renonciation aux intérêts moratoires est prohibée : une nécessaire piqure de rappel
Publié le :
11/08/2021
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Dans un arrêt récent mentionné dans les tables du recueil Lebon, le Conseil d’Etat (1) a rappelé que la renonciation aux intérêts moratoires est prohibée dans les contrats de transaction portant sur des marchés publics.
La commune de Liévin a confié, par un contrat conclu le 12 août 1991, l'aménagement de la friche Sabès à Liévin à la société immobilière de construction de Liévin. Ce contrat a été repris tant par la communauté d'agglomération de Liévin, venue aux droits de la commune de Liévin, que par la société Territoires 62, succédant à la société Adévia.
Par une délibération du 17 mars 2006, la communauté d'agglomération de Lens-Liévin a clôturé l'opération d'aménagement de la friche Sabès, en arrêtant le déficit à la somme de 857 664,64 euros.
Le conseil communautaire de la communauté d'agglomération de Lens-Liévin ayant, par une délibération du 1er juin 2015, autorisé son président à signer un contrat de transaction avec la société Territoires 62, en vue de lui régler une somme égale à ce déficit, en contrepartie de la renonciation de cette société à réclamer des intérêts moratoires qui s'élèvent à la somme de 158 746 euros et de son désistement ou renonciation de toute action relative à l'exécution du contrat, la transaction a été signée le 13 août 2015.
Plusieurs élus du conseil communautaire de Lens-Liévin ont contesté la validité du contrat de transaction devant le tribunal administratif de Lille qui a, par jugement du 16 octobre 2018, annulé le protocole transactionnel sauf à ce que le conseil communautaire adopte, dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement, une nouvelle délibération autorisant la signature du contrat.
La cour administrative d'appel de Douai a, par arrêt du 27 février 2020, annulé le jugement du 16 octobre 2018, annulé le protocole transactionnel conclu le 13 août 2015 et rejeté le surplus de ses demandes. La haute juridiction est venue rappeler, au visa de l’article 67 de la loi du 8 août 1994 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, que toute renonciation au paiement des intérêts moratoires exigibles en raison du défaut, dans les délais prévus, soit du mandatement
des sommes dues, soit de l'autorisation d'émettre une lettre de change-relevé, soit du paiement de celle-ci à son échéance, est réputée non écrite.
Elle a aussi rappelé qu’un marché public est un contrat conclu par les collectivités publiques en vue de la réalisation de travaux, fournitures et services en contrepartie d'un prix, mais que le fait de confier l’étude et la réalisation d’opérations d’aménagement à une personne publique ou privée, n’a pas pour effet de soustraire au respect des règles régissant les marchés publics.
Pour requalifier la concession d’aménagement en marché public, la cour a estimé que bien que formellement conclu en qualité de concession d'aménagement soumis aux dispositions du code de l'urbanisme, le contrat constitue un marché public, dès lors que la rémunération du cocontractant n'est pas substantiellement liée aux résultats de l'opération d'aménagement.
Enfin, lorsqu’il constate l’existence de vices entachant la validité du contrat, le juge doit soit
proposer la poursuite du contrat, soit inviter les parties à prendre des mesures de régularisation,
soit le résilier ou le résoudre.
« Toute renonciation au paiement des intérêts moratoires est réputée non écrite. ».
Cette disposition est aujourd’hui codifiée à l’article L 2192-14 du code de la commande publique.
On a souvent tendance à penser que le contrat de transaction passé avec une personne morale de droit public, qui permet certes de résoudre une difficulté, peut s’exonérer de certaines règles dès lors qu’un équilibre est trouvé par un renoncement réciproque des parties. C’est une erreur.
1 Cf. le Conseil d’Etat, 18 mai 2021, n° 443153, Communauté d’agglomération de Lens-Liévin.
Cet article n'engage que son auteur
Auteur

Dominique NICOLAS
Avocat
Avocats Réunis
LE LAMENTIN (977)
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