Faillite : la revendication du vin
Publié le :
20/09/2007
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Partons de l’exemple suivant : un viticulteur adhère à une cave coopérative et en application des statuts de cette coopérative, il apporte, au moment des vendages, l’ensemble des raisins qui constitue sa production annuelle. Quelques semaines plus tard, la Cave Coopérative se trouve en faillite, c’est-à-dire qu’après avoir déposé le bilan, elle se trouve placée en redressement judiciaire puis en liquidation judiciaire.
La question des stocks de la Coopérative
La question qui se pose est de savoir si le viticulteur qui a apporté ses raisins à la Cave Coopérative peut les reprendre ou doit les abandonner au motif qu’ils constituent les stocks de la Coopérative qu’il convient de liquider.
Le principe juridique général est posé dans la partie du Code de commerce qui traite des procédures collectives.
Le Code de commerce précise dans ses dispositions codifiées sous les articles L 624-9 et suivants que tout propriétaire d’un bien (et donc du vin) peut revendiquer sa marchandise qui se trouverait, au jour du jugement prononçant le redressement judiciaire ou la liquidation judiciaire du débiteur, dans le patrimoine de ce dernier.
Les deux conditions à remplir
En l’espèce, dans l’exemple que nous avons pris, le viticulteur a remis sa vendange à la Cave Coopérative et le jour où la Cave Coopérative a été placée en redressement judiciaire, la vendange dudit viticulteur était toujours comptabilisée au titre des stocks.
Deux conditions importantes sont à remplir pour que l’action en revendication de la marchandise détenue par le débiteur en redressement judiciaire ou en liquidation judiciaire aboutisse.
La première condition est celle de démontrer que celui qui revendique le bien est réellement propriétaire du bien.
La deuxième condition consiste à démontrer que les marchandises existent toujours en nature dans le patrimoine du débiteur.
Concernant la première condition
Dans l’exemple que nous avons évoqué, le viticulteur remplit la première condition.
En effet, ce viticulteur a apporté des raisins dans le cadre d’un contrat de coopération.
Or, lorsque le viticulteur apporte son raisin à une Cave Coopérative, cet apport ne constitue pas une vente mais s’inscrit dans le cadre d’une opération globale comprenant la vinification, le logement et la vente en commun dans le cadre d’un mandat confié à la Coopérative.
Par conséquent, le viticulteur demeure propriétaire de ce raisin qui se trouve dans les stocks du débiteur.
Cette première condition est donc remplie et le viticulteur coopérateur est bien présumé propriétaire (Cour de Cassation du 11 juillet 2006).
Concernant la seconde condition
En ce qui concerne la seconde condition, le viticulteur doit donc démontrer que les raisins qu’il a apportés à la Cave Coopérative se retrouvent en nature.
L’écueil principal vient de la difficulté à identifier le raisin apporté par ce viticulteur parmi les autres raisins apportés par les autres adhérents.
Le viticulteur doit démontrer qu’il y a identité entre la chose livrée et la chose revendiquée.
Dans l’exemple mentionné ci-dessus, chacun des coopérateurs qui a apporté son raisin à la Cave Coopérative a pu justifier de ses déclarations de récoltes annuelles lesquelles mentionnent de façon distincte et individualisée les différentes productions apportées qui sont ainsi identifiables ; en outre, le stock de la Cave Coopérative est constitué d’hectolitres provenant des récoltes d’années déterminées et réparties en appellations distinctes.
Le jugement de la Cour de cassation
Par conséquent, la Cour de Cassation a pu juger, dans son arrêt du 11 juillet 2006, que les marchandises appartenant au viticulteur coopérateur pouvaient valablement lui être restituées puisque les raisins se retrouvaient encore en nature dans les Caves de la Coopérative.
Si la Coopérative avait procédé à la vinification et avait ainsi transformé le raisin en vin, la solution aurait été différente.
En résumé, tout propriétaire d’un bien qui se trouve dans le patrimoine d’un débiteur placé sous le régime de la faillite peut revendiquer ce bien à condition que ce bien se retrouve en nature et sans transformation dans le patrimoine de ce dernier. Cet article n'engage que son auteur.
Auteur
Alexis GAUCHER-PIOLA
Avocat Associé
Alexis GAUCHER-PIOLA
LIBOURNE (33)
Historique
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