
L'activité de conseil en propriété industrielle: une activité de caractère commercial?
Publié le :
03/09/2013
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La gestion d'un portefeuille (marques, noms de domaine) par un conseil en propriété industrielle est couverte par un mandat et non un contrat commercial.
Gestion des noms de domaine, activité de conseil en propriété industrielle et activité de caractère commercialCass, com, 3 avril 2013, n° 12-17905.
La Cour de cassation a confirmé que l’activité de conseils en propriété industrielle, même exercée sous forme de société commerciale, n’est jamais une activité commerciale (1) ; aussi, les dispositions de l’article L.422-6 du code de commerce relatives à la rupture brutale d'une relation commerciale établie (2), ne s’appliquent pas entre une société de CPI et son client.
En l'espèce, dans une affaire de transfert de portefeuille de marques et de noms de domaine, la Cour de cassation s’est prononcée en faveur de la société Galeries Lafayette qui avait retiré la gestion dudit portefeuille à une société de conseils en propriété industrielle (CPI), pour la confier à une autre. La société délaissée considérait ce transfert comme une rupture abusive de contrat commercial, et réclamait de ce fait des dommages et intérêts en réparation d’un préjudice économique et moral qu'elle prétendait avoir subi.
La Cour de cassation, confirmant la position de la Cour d’appel de Paris (3), a estimé que la nature de la relation contractuelle entre ces deux parties n’était pas celle d’un contrat commercial, mais celle d’un mandat. En effet, « la profession de conseil en propriété industrielle est incompatible avec toute activité de caractère commercial » (4) et « l'arrêt retient exactement que si cette profession peut être exercée sous forme de société commerciale, une telle faculté ne permet pas de déroger à cette incompatibilité ». Aussi « la Cour d'appel a retenu à bon droit que les conditions d'application de l'article L.442-6, I, 5° du code de commerce n'étaient pas réunies ».
Sur le point de l’éventuel abus de la rupture du mandat, la Cour de cassation a pris en considération le fait qu’il avait justement été apprécié « qu'un certain courant d'affaires [avait] été maintenu» entre les deux parties, puisque la société Galeries Lafayette avait « laissé le soin à la société [de CPI] de procéder, jusqu'à la fin de l'année 2008, à l'ensemble des renouvellements de marques », Ainsi, bien que « la rupture du mandat le 23 mai 2008 n'[ait] été précédée d'aucun avertissement », cette rupture n’était pas considérée comme présentant un caractère abusif ou vexatoire et la demande d’indemnisation de la société de CPI éconduite était rejetée.
La résiliation unilatérale d’un mandat du CPI par son client ne pourrait donner lieu à engagement de la responsabilité délictuelle du mandant que dans le seul cas où elle serait abusive. En l’espèce, le maintien par le client d’un certain courant d’affaires chez l’ex-CPI a permis de juger que les conditions de rupture n’étaient pas vexatoires, et ce, même si cette rupture n’était précédée d’aucun avertissement. Le client du CPI, a, comme le client de l’avocat, une grande liberté de choisir librement son conseil, et donc d’en changer.
Index:
(1) Cass, com, 3 avril 2013, n° 12-17905.
(2) Article L.442-6 du code de commerce : I-Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : (…) 5° De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. (…)
(3) Arrêt attaqué : Cour d’appel de Paris du 14 mars 2012.
(4) Article L.422-12 du code de la propriété intellectuelle : La profession de conseil en propriété industrielle est incompatible : 1° Avec toute activité de caractère commercial, qu'elle soit exercée directement ou par personne interposée ; (…)
Cet article a été rédigé par Me Marie PASQUIER. Il n'engage que son auteur.
Crédit photo : © Mimi Potter - Fotolia.com
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