
Comment rédiger une demande de condamnation à astreinte ?
Publié le :
28/02/2022
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C'est à cette question que permet de répondre l'arrêt de la Cour de Cassation du 20 janv. 2022, n° 20-17.512.L'astreinte est un mécanisme visant à contraindre un débiteur récalcitrant à exécuter en nature l'obligation à laquelle il a été condamné.
Elle prend le plus souvent la forme d'une condamnation judiciaire du débiteur à une somme d’argent par heure, jour ou mois de retard à s'exécuter
Cette somme d'argent ne peut cependant être réclamée qu'après liquidation de l'astreinte par un juge.
En l'espèce deux associations avaient saisi un tribunal de grande instance afin de faire cesser la diffusion par la société M Motors Automobiles sur internet de visuels publicitaires mettant en scène des véhicules terrestres à moteur dans des espaces naturels, qui portaient atteinte aux dispositions des articles L. 362-1 et L. 362-4 du code de l'environnement.
La condamnation avait été assortie d'une astreinte débutant un mois après la signification du jugement.
En l'absence d'exécution, les associations avaient demandé la liquidation de l'astreinte et la Cour d'Appel d'Amiens avait eu à en connaître.
C'est l'arrêt rendu par la cour d'Appel d'Amiens qui est ici sanctionné par la Cour de Cassation au titre de chacun des motifs développés par l'association France nature environnement en son premier moyen.
Là où le TGI condamne la société M Motors Automobiles sous astreinte "par jour de retard", la Cour d'appel retient une condamnation sous astreinte "par infraction constatée".
C'est le premier motif de cassation car en application de l’article R. 121-1 du Code des procédures civiles d’exécution, le juge de l’exécution ne peut modifier le dispositif de la décision de justice servant de fondement aux poursuites. L'application de cet article, qui fait l'objet d'une jurisprudence importante, préserve l'autorité de la chose jugée de l'article 1355 Civ.
En l'espèce, l' article R.121-1 CPCE s'impose à la Cour d'appel statuant sur recours du JEX en vertu de l'effet dévolutif de l'appel résultant de l'article 561 CPC. La Cour de Cassation avait eu l'occasion de le confirmer par un arrêt rendu le 24 sept. 1997, Pourvoi no 95-13.386.
Cette première sanction ayant pour objet de retenir une condamnation "par jour de retard" au lieu d'une condamnation "par infraction constatée" n'est pas sans conséquence sur le second motif de cassation.
En effet, une condamnation "par infraction constatée" impose que la preuve de l'infraction soit rapportée par le créancier de l'obligation, ce qui n'est pas le cas d'une condamnation "par jour de retard", laquelle permet au créancier d'attendre que le débiteur apporte la preuve de l'exécution de l'obligation qui lui incombe.
La société M Motors Automobiles ayant été condamnée a faire cesser la diffusion de ses visuels publicitaires, l' astreinte de 1000 euros "par jour de retard et par visuel" courait donc jusqu'à ce que cette société apporte la preuve qu'elle avait stoppé cette diffusion.
Ce n'était donc pas à l'association de démontrer en établissant constat, que l'infraction perdurait, comme l'affirmait la Cour d' Appel.
La Cour de Cassation sanctionne la Cour d'Appel pour renversement de la charge de la preuve au visa de l'article 1353 Civ. dont l'alinea 2 dispose "...celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement...". Le paiement doit être entendu comme l'exécution de l'obligation.
Elle ajoute que la charge de la preuve de l'exécution d'une obligation de faire assortie d'une astreinte pèse sur le débiteur de l'obligation.
Inversement la preuve d'une obligation de ne pas faire incomberait au créancier de l'obligation.
Cela imposerait qu'une obligation de faire soit assortie d'une astreinte par jour de retard alors qu'une obligation de ne pas faire doive-t-être assortie d'une astreinte par infraction constatée.
Sous une apparente simplicité, cette analyse n'est pas dénuée d'ambiguïté.
Outre le fait que la distinction des obligations de faire et de ne pas faire ait été abandonnée depuis la réforme des obligations intégrée en 2016 dans le code Civil, elle n'est d'aucune utilité quand l'obligation peut indifféremment se décliner de manière affirmative "respecter les limitations de vitesse" ou négative "ne pas dépasser les limitations de vitesse".
Il est bien évident que dans les deux cas, le chauffard sera sanctionné "par infraction constatée".
Il serait ainsi plus utile de distinguer selon que l'obligation est instantanée ou continue, l'obligation instantanée devant faire l'objet d'une condamnation sous astreinte "par jour de retard", car il suffit à son débiteur de prouver son exécution, alors que l'obligation continue devrait faire l'objet d'une condamnation sous astreinte "par infraction constatée", la preuve du respect d'une obligation perpétuelle étant pour le moins malaisée voire impossible.
Il conviendra dans tous les cas de retenir que le choix de l'astreinte influe directement sur la charge de la preuve et donc sur son efficacité.
Cet article n'engage que son auteur.
Auteur

Hervé PIERSON
Commissaire de justice
Etude ACTA - PIERSON & Associés
METZ (57)
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