L'exercice illégal de la médecine

Publié le : 23/03/2010 23 mars mars 03 2010

L’exercice illégal de la médecine notamment avec l’arrivée des médecines douces est fréquemment dénoncée soit par les médecins, soit par les patients victimes de ces personnes qui laissent aisément croire qu’ils sont médecins alors qu’il n’en est rien.

Quels sont les éléments constitutifs du délit d’exercice illégal de la médecine ?La diversité de la profession, l’art médical, la reconnaissance de cette profession mais aussi le contact humain, la volonté de diagnostiquer et de soigner attire un grand nombre d’altruistes mais dont certains peu scrupuleux sont rebutés par l’obtention des diplômes.

L’exercice illégal de la médecine notamment avec l’arrivée des médecines douces est fréquemment dénoncée soit par les médecins, soit par les patients eux-mêmes victimes de ces personnes qui laissent aisément croire qu’ils sont médecins alors qu’il n’en est rien.

Il appartient à tout citoyen d’informer le Procureur de la République de tout fait délictueux qu’il a pu constater ou dont il a été victime.

L’origine des dossiers pour exercice illégal de la médecine est le plus souvent due à des plaintes « patients » soit directement entre les mains du Procureur de la République, soit entre les mains du conseil de l’Ordre.

Le Conseil de l’Ordre des Médecins a donc à ce titre un rôle important à jouer en ce qu’il centralise le plus souvent les griefs formulés à l’égard des membres de son ordre et, de fait, à l’égard de ceux qui prétendent en faire partie.

Quels sont donc les éléments constitutifs du délit d’exercice illégal de la médecine ?


1. Les textes.

L’article 4161-1 du code de la santé publique dispose « exerce illégalement la médecine toute personne qui prend part habituellement ou par direction suivie, même en présence d’un médecin, à l’établissement d’un diagnostic ou d’un traitement de maladie congénitale ou acquise, réelle ou supposée, par acte personne, consultation verbale ou écrite ou par tous autres procédés quels qu’ils soient, ou pratique l’un des actes professionnels prévus dans une nomenclature fixée par arrêté du ministre chargé de la santé pris après avis de l’Académie nationale de médecine sans être titulaire d’un diplôme, certificat ou autre titre mentionné à l’article L 4131-1 et exigé pour l’exercice de la profession de médecin ou sans être bénéficiaire des dispositions spéciales mentionnées aux articles L 4111-2 à L 4111-4, L 4111-7, L 4112-6, L 4131-2 à L 4131-5,…

Ainsi, pour que les non médecins puissent être recherchés pour exercice illégal de la médecine, il faut prendre en considération les éléments constitutifs du délit qui sont essentiellement l’exécution d’un acte médical, d’un diagnostic ou d’un traitement, l’habitude ou la direction suivie et enfin le défaut de qualité de l’auteur.

Sur l’exécution d’un acte médical, d’un diagnostic ou d’un traitement

Sont bien sur réservés aux médecins les actes médicaux fixés par l’arrêté du 6 janvier 1962
« 1) toute mobilisation forcée des articulations et toute réduction au déplacement osseux ainsi que toute manipulation vertébrale et d’une façon générale tous les traitements dits d’ostéopathie, de spondylothérapie ou vertébrothérapie et de chiropraxie
2) le massage prostatique
3) le massage gynécologique
4) tout acte de physiothérapie aboutissant à la destruction si limitée soit-elle de tégument et notamment la cryothérapie, l’électrolyse, l’ électrocoagulation et la diathermocoagulation
5) tout mode d’épilation sauf les épilations à la pince ou à la cire, toute abrasion instrumentale des téguments à l’aide d’un matériel susceptible de provoquer l’effusion du sang (rabotage, meulage, fraisage)
6) le maniement des appareils servant à déterminer la réfraction oculaire
7) l’audiométrie tonale et vocale à l’exclusion des mesures pratiquées pour l’appareillage des déficients de l’ ouïe en application de l’article L 1510-1 du code de la santé publique
».

Le diagnostic est généralement entendu comme un acte consistant à déterminer la nature de l’affection dont une personne est atteinte, l’établir implique la mise en jeux d’une grande variété d’opérations dont chacune est de nature à réaliser l’un des éléments constitutif de l’infraction (cass crim 19/03/1953 D 1953.664).

Le traitement est considéré comme l’ensemble des moyens thérapeutiques et les prescriptions hygiéniques mis en oeuvre dans le but de guérir une maladie.

La Cour de Cassation a précisé que le traitement existe dès qu’un but curatif est poursuivi, quel que soit le procédé mis en oeuvre, il n’est pas nécessaire qu’un médicament soit prescrit (cass crim 19/06/1947 bul crim n° 505 et 506).

La jurisprudence s’est prononcée de manière très extensive tant sur le diagnostic que sur le traitement.


2. Habitudes ou directions suivies

Le délit d’exercice illégal est un délit d’habitude, un acte isolé ne suffit pas à le constituer (cass crim 04/04/1919), en revanche, l’habitude est constituée par la réalisation du 2ème fait délictueux (cass crim 04/12/1926 bul crim n° 334).
La direction suivie signifie qu’un seul patient suivi plusieurs fois suffit à caractériser le délit d’exercice illégal.


3. Le défaut de qualité de l’auteur de l’acte

Sont, bien sur, qualifiés de non médecins, toute personne dépourvue de diplôme mais l’article 4161-1 du code de la santé publique sanctionne autant le non médecin que la personne qui exerce la médecine sans satisfaire aux conditions légales d’exercice (diplôme d’état), qui ne possède pas la nationalité requise, qui n’est pas inscrite au tableau de l’ordre ou qui est sous le coup d’une interdiction d’exercer la médecine ou encore des personnes qui munies d’un titre régulier, sortent des attributions que le titre leur confère.

Plus spécialement, le délit d’exercice illégal concerne très généralement les personnes dépourvues de titre.

Citons en conséquence les activités susceptibles de revêtir le caractère délictueux d’exercice illégal de la médecine.
Le magnétisme, l’hypnothérapie, le spiritisme sont à la frontière et ne peuvent revêtir le caractère du délit d’exercice illégal que lorsqu’il y a l’établissement d’un diagnostic ou d’un traitement.

La radiesthésie est libre et échappera à l’incrimination d’exercice illégal si elle n’est que l’adjuvent d’un examen médical soumis directement à un médecin.

Concernant la chiropraxie et l’ostéopathie:
Le décret de 1962 réservait aux médecins les manipulations articulaires, les réductions et déplacements osseux
etc…
La Loi du 4 mars 2002 a institué un diplôme sanctionnant une formation spécifique à l’ostéopathie ou à la chiropraxie permettant l’accès à la profession correspondante par inscription sur une liste dressée par le décret.
Ces deux fonctions sont donc aujourd’hui autorisées et réglementées alors qu’auparavant, elles rentraient indiscutablement dans le cadre de l’exercice illégal de la médecine.

Concernant l’acupuncture:
Elle constitue une thérapeutique tant en raison des moyens d’action qu’elle utilise que des actions organiques qu’elle est susceptible de susciter.
Elle ne peut donc être pratiquée que par des membres du corps médical (cass 03/02/1987 D 1987 jurisprudence constante jusqu’à présent).

Il y a donc une grande variété de comportements ou de professions non réglementées susceptibles de tomber sous le coup de l’infraction d’exercice illégal de la médecin dès lors qu’il y a diagnostic ou traitement.

L’exercice illégal de la médecin est réprimé par l’article L 4161-5 du code de la santé publique et est puni de 2 ans d’emprisonnement et de 30.000 € d’amende.

Les personnes physiques encourent également les peines complémentaires suivantes :
- « L’affichage ou la diffusion de la décision prononcée,
- La confiscation de la chose qui a servi ou été destinée à commettre l’infraction ou de la chose qui en est le produit,
- L’interdiction définitive ou pour une durée de 5 ans au plus d’exercer une ou plusieurs professions régies par le présent code ou toute autre activité professionnelle ou sociale à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise,
- L’interdiction d’exercer pour une durée de 5 ans l’activité de prestation de formation professionnelle continue au sens de l’article L 1313-1 du code du travail et le fait d’exercer l’une de ces activités malgré une décision judiciaire d’interdiction définitive ou temporaire est punie des mêmes peines.
»
(version du 24 novembre 2009)

Il faut noter aussi que la complicité est punissable au même titre que le concourt prêté aux personnes non dépourvues de diplômes.
Cela concerne bien évidemment les médecins qui auraient recourt habituellement à des non diplômés lorsque ces derniers se livrent à des diagnostics ou des traitements en leur présence.

L’ordre départemental des Médecins du Gard est bien évidemment à même de vous renseigner ou de transmettre des informations nécessaires aux personnes compétentes ou faire cesser tout comportement délictueux et il doit
rester votre interlocuteur privilégié.

Si toutefois, les éléments constitutifs de l’infraction détaillés ci-dessus ne sont pas constitués, il est alors possible d’envisager, à l’égard de celui qui, ostentatoirement, utilise le titre de médecin pour le délit d’usurpation de titre de médecin, prévu par l’art. L 4162-1 du même code.

Il faut donc être vigilent car, si le titre « médecin » est protégé, le terme « médecine » ne l’est pas pour autant, ce qui n’est pas sans poser de difficulté par l’utilisation du terme « médecine chinoise » s’il n’est pas par ailleurs relevé l’exercice illégal de la médecine…Sont punis au terme de l’art. 433-17 d’un an d’emprisonnement et de 15.000 € d’amende.





Cet article n'engage que son auteur.

Auteur

DELRAN Camille
Avocat Associé
DELRAN BARGETON DYENS SERGENT ALCALDE , DELRAN BARGETON DYENS SERGENT ALCALDE
NIMES (30)
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