Droit funéraire : les récentes évolutions apportées par la loi 3DS et le décret du 5 août 2022
Publié le :
20/09/2022
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La loi dite 3DS du 21 février 2022 (loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale), et notamment ses articles 237 et 238, a apporté certaines modifications en matière de législation funéraire.Le décret d’application qui devait suivre est intervenu cet été afin d’apporter les précisions réglementaires nécessaires à la mise en œuvre de ces nouvelles dispositions (décret n° 2022-1127 du 5 août 2022 portant diverses mesures relatives à la réglementation funéraire).
Ces évolutions sont les suivantes.
Sur le fonctionnement du service des pompes funèbres :
Pour rappel, le service des pompes funèbres, qui est une mission de service public, est assuré soit par les communes, directement ou par voie de gestion déléguée, soit par toute autre entreprise ou association bénéficiaire de l’habitation prévue en la matière.Cette habilitation a pour objectif de permettre notamment le transport des corps avant et après la mise en bière, l’organisation des obsèques, la réalisation des soins de conservation, la fourniture des corbillards et des voitures de deuil…
Depuis l’intervention de la loi 3DS, le Préfet met fin à cette habilitation en cas de cessation d’exercice des activités au titre desquelles l’habilitation a été délivrée, alors qu’auparavant, il pouvait soit la suspendre soit la retirer.
Ainsi, le Préfet met obligatoirement fin à l’habilitation en cas de cessation d’exercice des activités susmentionnées.
De plus, il sera rappelé que ces régies et entreprises ou associations habilitées, établissent des devis conformes aux modèles établis par arrêté du ministre afin que les familles des défunts puissent choisir l’opérateur funéraire qui les accompagnera.
Désormais, ces devis, qui sont déposés auprès des communes, doivent être actualisés tous les trois ans, mais également publiés sur le site internet des communes de plus de 5000 habitants. Dans les autres communes, ces devis resteront consultables.
Ces nouvelles dispositions permettent donc d’avoir une meilleure lisibilité des différents opérateurs funéraires pouvant intervenir.
Enfin, ces opérateurs funéraires sont limités dans leurs offres de services, voire interdits de procéder à des démarches à domicile ou dans les lieux publics.
La loi 3DS a assoupli ce régime en introduisant une dérogation à cette interdiction de démarches à domicile, tout en les conditionnant : elles seront admises seulement si elles sont sollicitées par la personne ayant qualité pour pourvoir aux funérailles et que le décès a eu lieu à domicile.
Les opérateurs funéraires pourront alors recourir aux démarches à domicile les dimanches, jours fériés et aux heures de nuit, et uniquement dans le cadre de la commande de prestations de transport ou de dépôt de corps avant mise en bière et de soins de conservation à domicile.
Sur le renouvellement et la procédure de reprise des concessions funéraires :
Il n’est pas nouveau que les concessions temporaires, trentenaires et cinquantenaires sont renouvelables à l’expiration de cette période si la nouvelle redevance est acquittée, à défaut de quoi, le terrain concédé fera retour à la commune.Toutefois, ce terrain ne pourra être repris par la commune que deux années révolues après l’expiration de la période pour laquelle le terrain a été concédé.
Désormais, la commune sera tenue d’informer, par tout moyen, les concessionnaires et leurs ayants cause de l’existence d’un droit de renouvellement durant cet intervalle de deux ans.
La loi 3DS et le décret du 5 août 2022 ont également sensiblement modifié la procédure de reprise des concessions funéraires afin qu’elle soit mise en œuvre plus rapidement.
En effet, alors que la période de trente ans à l’issue de laquelle le maire peut constater l’état d’abandon d’une concession funéraire n’a pas été modifiée, le délai à l’issue duquel le maire peut saisir le conseil municipal afin de décider de la reprise de la concession a quant à lui été drastiquement réduit.
Dorénavant, le délai devant intervenir entre la publicité du premier procès-verbal de constat d’état d’abandon de la concession et la poursuite de la procédure de reprise de la concession est d’un an, et non plus de trois ans.
Le décret du 5 août 2022 était attendu sur ce point, puisque l’ancien article R. 2223-18 du code général des collectivités territoriales, prévoyait toujours un délai de trois ans entre la publicité du procès-verbal de constat d’état d’abandon et le second procès-verbal établi un mois avant la saisine du conseil municipal.
Ce décret était donc le bienvenu afin d’harmoniser la procédure de reprise des concessions funéraires.
Sur le transfert de corps dans un cercueil adapté à la crémation :
La loi 3DS a permis de combler un vide législatif majeur dans le cadre de la crémation de certains cercueils, notamment lorsqu’il s’agissait d’un rapatriement d’une personne décédée à l’étranger.En effet, il est courant que les conventions internationales obligent le transport des défunts dans des cercueils composés de zinc qui est un matériau incompatible avec la crémation.
En l’absence de texte juridique en la matière, il était courant de procéder à un changement de cercueil afin de procéder à la crémation, alors même que cela contrevenait à la règle selon laquelle il est interdit d’ouvrir un cercueil avant un délai minimal de cinq ans.
Afin de pallier ce vide juridique, la loi 3DS a donc inséré un nouvel article L. 2243-42-1 dans le code général des collectivités territoriales : lorsque le corps du défunt a été placé, pour assurer son transport, dans un cercueil composé d’un matériau incompatible avec la crémation, alors la personne ayant qualité pour pourvoir aux funérailles doit solliciter, auprès du maire, une autorisation de transfert de corps vers un cercueil adapté.
Cette autorisation ne sera toutefois délivrée que si le défunt n’était pas atteint par l’une des infections transmissibles prescrivant ou interdisant certaines opérations funéraires et dont la liste est fixée par voie réglementaire.
Cette autorisation sera établie sans frais et pourra être adressée par voie dématérialisée.
Elle vaudra alors autorisation de fermeture du nouveau cercueil et, sauf nécessité d’autorisation préalable du parquet, également autorisation de crémation.
Le maire devra statuer sous un délai de six jours à compter de la réception de la demande.
Après le changement de cercueil, la crémation devra toutefois s’opérer sans délai.
Sur la valorisation des métaux issus de la crémation :
Autre modification majeure apportée par la loi 3DS et le décret du 5 août 2022 : les métaux issus de la crémation qui ne sont pas assimilés aux cendres du défunt seront récupérés par le gestionnaire du crématorium afin qu’ils soient cédés, à titre gratuit ou onéreux, en vue du traitement approprié pour chacun d’eux.Le produit éventuel de cette cession sera alors inscrit en recette de fonctionnement au sein du budget du crématorium, ce produit pouvant être destiné soit à financer la prise en charge des obsèques des personnes dépourvues de ressources suffisantes, soit à faire l’objet d’un don à une association d’intérêt général ou à une fondation reconnue d’utilité publique.
Si ce produit est destiné à financer la prise en charge des obsèques des personnes dépourvues de ressources suffisantes, alors le crématorium devra verser ce produit à une ou plusieurs communes qui l’affectera à cet effet.
Afin d’assurer une information complète des familles, ces informations devront figurer sur tout document contractuel prévoyant la crémation du défunt et devront également être affichées dans la partie des crématoriums ouverte au public.
Sur les autres modifications mineures :
Le décret du 5 août 2022, a également apporté certaines modifications mineures afin de tenir compte de certaines évolutions en matière civile.A titre d’exemple, le nouvel article R. 2213-17 du code général des collectivités territoriales, ne mentionne plus que la fermeture des cercueils sera effectuée par l’officier d’état civil mais par le maire, afin de tenir compte de l’abrogation de l’ancien article 77 du code civil par le décret n° 60-285 du 28 mars 1960…
De la même manière, le nouvel article R. 2213-20 du code général des collectivités territoriales, ne prévoit plus la mention du « nom patronymique » et, le cas échéant, du « nom marital » sur la plaque apposée sur le couvercle du cercueil, mais la mention du « nom de famille », et s’il y a lieu, du « nom d’usage » du défunt.
Ces modifications permettent ainsi de tenir compte de l’évolution législative intervenue en 2002 : la loi française ne parle plus de « nom patronymique » mais de « nom de famille » afin d’abandonner toute référence à la lignée paternelle.
En résumé, quand bien même certaines de ces évolutions ne peuvent être accueillies que favorablement dans la mesure où elles permettent de mieux adapter la législation funéraire aux difficultés pouvant être rencontrées, il n’en demeure pas moins que certaines de ces mesures comme la valorisation des métaux issus de la crémation pourraient être accueillies défavorablement par les proches des défunts incinérés.
Cet article n'engage que son auteur.
Auteur
Julia FINKELSTEIN
Avocate
1927 AVOCATS - Poitiers
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