Raccordement à l’assainissement collectif - Gare aux participations exigées par la Commune
Publié le :
15/12/2014
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Depuis la Loi sur l’Eau du 3 janvier 1992, les Communes se trouvent de plus en plus impliquées dans la gestion des eaux usées générées par les constructions situées sur leur territoire.D’abord essentiellement compétentes en matière de gestion de l’assainissement collectif, elles ont vu leur compétence se renforcer et s’étendre progressivement au contrôle des installations d'assainissement non collectif, contrôle exercé à la fois a priori au moment de l’autorisation d’urbanisme, et a posteriori, via une vérification du fonctionnement et de l’entretien des installations existantes.
En parallèle, et en conséquence, de cette extension de compétence, les Communes sont chargées, depuis 1992 (Article L.372-3 du Code des Communes remplacé par l’article L.2224-10 du CGCT), d’établir des zonages distinguant les zones d’assainissement collectif, dans lesquelles elles ont la charge d’assurer la collecte et le traitement des eaux usées, et les zones d’assainissement individuel non collectif.
La distinction de ces deux zonages, si elle relève essentiellement du pouvoir d’appréciation des Communes, peut être appréciée à travers une double grille de lecture prévue par l’article R.2224-7 du CGCT : le coût de création d’un assainissement collectif et son intérêt pour l’environnement. En somme, si la création d’un réseau collectif d’assainissement présente un coût manifestement excessif pour un intérêt environnemental nul ou particulièrement limité, la création d’une zone d’assainissement collectif ne se justifiera pas.
Une fois prise la décision de créer un réseau d’assainissement collectif, reste l’étape la plus complexe pour la Commune, à savoir la question de son financement. A ce stade, la tentation est grande, notamment pour les petites collectivités aux ressources financières limitées, de chercher à imputer aux propriétaires raccordés le coût de l’investissement ainsi réalisé. Fréquentes sont ainsi les collectivités qui, ayant fait la somme du coût des travaux engagés, décident de le répartir entre l’ensemble des propriétaires impactés.
Une telle méthode apparaît toutefois juridiquement infondée, le Code de la Santé Publique prévoit en effet que seuls deux types de participation peuvent être imputés aux propriétaires raccordés : a Participation pour le Financement de l’Assainissement Collectif prévue à l’article L.1331-7 et la participation aux frais de branchement public prévue à l’article L.1331-2 du CSP. Non seulement, ces participations sont ainsi limitativement énumérées par le Code de la Santé Publique mais, plus encore, celui-ci encadre leur montant avec précision.
La participation pour le Financement de l’Assainissement Collectif
Prévue par l’article L.1331-7 du Code de la Santé Publique, la Participation pour le Financement de l’Assainissement Collectif (PAC) est une création de la loi n°2012-354 du 14 mars 2012, destinée à permettre aux collectivités de faire financer une partie de leur réseau d’assainissement collectif par les propriétaires raccordés.
Avant l’entrée en vigueur de cette loi, une Commune n’avait pas la possibilité de faire financer l’investissement lié à la création d’un réseau d’assainissement collectif par les propriétaires des constructions existantes. Seules les constructions édifiées postérieurement à l’entrée en service du réseau d’assainissement collectif pouvaient en effet se voir imputer une participation, alors appelée Participation pour Raccordement l’Egout.
Le système instauré par la loi du 14 mars 2012 ne confère pas pour autant une liberté totale aux collectivités, plusieurs limites aux participations exigibles étant instaurées.
1°/ Tout d’abord, la PAC n’est exigible que des propriétaires des « immeubles qui ont été raccordés au réseau public de collecte des eaux usées à compter du 1er juillet 2012 » (article 30 de la loi du 4 mars 2012). Les immeubles raccordés avant cette date ne peuvent en aucun cas, se voir imputer cette participation, quand bien même la Commune mettrait en œuvre des travaux de rénovation de son réseau ou de modernisation de la station de traitement. Seule une situation d’extension ou de reconfiguration de l’immeuble (création de logements supplémentaires) pourrait entraîner l’application d’une telleparticipation.
2°/ En outre, le versement de la PAC a pour objet de tenir compte de « l'économie réalisée [par les propriétaires des immeubles raccordés] en évitant une installation d'évacuation ou d'épuration individuelle réglementaire ou la mise aux normes d'une telle installation » (article L.1331-7 du CSP).
La PAC ayant ainsi pour objet de compenser une économie, elle ne peut, à notre sens, être exigée que des propriétaires d’immeubles non raccordés et d’immeubles bénéficiant d’un assainissement non-collectif qui n’est pas aux normes.
A l’inverse, le propriétaire d’un immeuble bénéficiant d’un assainissement non collectif aux normes ne peut pas se voir imputé une telle participation… pour la simple raison qu’il ne réalise aucune économie.
3°/ L’article L.1331-7 du CSP prévoit, en outre, que la PAC « s'élève au maximum à 80 % » de l’économie réalisée par le propriétaire de l’immeuble raccordé.
Cette limitation implique que, pour le propriétaire d’un immeuble raccordé, la PAC doit correspondre, au maximum à 80 % du coût d’installation d’un assainissement individuel aux normes. De la même façon, pour le propriétaire d’un assainissement individuel non réglementaire, la PAC ne peut excéder 80 % du coût de la mise aux normes.
Bien qu’il n’existe, à ce jour, aucune décision juridictionnelle en la matière, toute interprétation contraire aurait pour effet de remettre en cause la notion « d’économie réalisée » par les propriétaires qui doit guider cette appréciation.
4°/ Enfin, et il s’agit somme toute d’une obligation logique, le montant total des PAC dont la collectivité entend poursuivre le recouvrement ne peut excéder le coût réel supporté par la collectivité. La création d’un réseau d’assainissement ne peut avoir pour objet, ou pour effet, de générer du bénéfice au profit de la Commune.
La participation aux frais de branchement public
A côté de la PAC, l’article L.1331-2 du Code de la Santé Publique prévoit la faculté, pour les collectivités, de solliciter des propriétaires des immeubles raccordés une participation aux frais de branchement publique.
Cette participation, prévue dès l’ordonnance du 23 octobre 1958 relative au raccordement obligatoire des immeubles aux réseaux d’égouts, répond à une logique radicalement distincte.
En effet, pour fonctionner, un réseau de collecte des eaux usées nécessite à la fois des canalisations principales mais également des raccordements permettant de desservir l’ensemble des immeubles concernés.
Tout raccordement est constitué de deux parties que sont le branchement public, compris entre la canalisation principale et la limite de propriété privée (le tabouret dans la plupart des cas) et le branchement privé intégralement situé sur la propriété privée.
Dans le cadre de la réalisation d’un réseau d’assainissement collectif, afin de faciliter les travaux et d’en diminuer les coûts globaux, la Commune peut décider de procéder d’office et d’elle-même à a réalisation de la partie publique du branchement. En contrepartie, le Code de la Santé Publique prévoit qu’elle peut en imputer le coût aux propriétaires raccordés, tout en encadrant avec une grande précision le montant (vor aussi, sur ce point, et de manière plus détaillée notre précédent article).
1°/ Tout d’abord, la participation visant à compenser le coût engagé par la collectivité pour réaliser la partie publique du branchement, elle ne peut être exigée que si ces travaux ont effectivement été mis en œuvre. A défaut, aucune participation n’est exigible à ce titre (CAA Nantes, 17 mai 2013, n°12NT01839).
2°/ Conformément à l’article L.1331-2 du Code de la Santé Publique, cette participation doit correspondre à « tout ou partie des dépenses entraînées par ces travaux, diminuées des subventions éventuellement obtenues et majorées de 10 % pour frais généraux. »
Ainsi, la Commune doit tout d’abord apprécier de manière forfaitaire, ou générale, le coût réel des travaux de réalisation des branchements publics (et seulement de ce branchements ; les canalisations installées pour le réseau principal doivent nécessairement être exclues), en retrancher les subventions obtenues (par exemple, dans le cas d’une subvention de 20 % du réseau par l’agence de l’eau) et ajouter 10 % pour frais généraux.
La Commune doit ensuite répartir ce coût entre l’ensemble des branchements publics réalisés. Il est, à cet égard indifférent qu’un même branchement desserve un immeuble collectif ou un immeuble individuel, seul compte en effet le coût réel de son installation (CAA Lyon, 20 décembre 1994, n°94LY00892).
Compte tenu de ces règles d’encadrement, et en résumé, dès lors que la collectivité ne peut facturer que la canalisation, le tabouret et la main d’œuvre, il est particulièrement rare qu’une telle participation puisse excéder un montant de 800 €.
3°/ La loi du 14 mars 2012 a, enfin, prévu une articulation entre cette participation aux frais de branchements et la PAC.
En effet, lorsqu’une Commune a institué, sur son territoire, ces deux participations le montant qu’il est possible d’exiger au titre de la PAC (80% de l’économie réalisée) doit être diminué du montant de la participation versée au titre du branchement public.
Les participations exigibles dans le cadre de la création d’un assainissement collectif apparaissent ainsi strictement encadrées à la fois dans leur principe, et dans leur montant. Si les principes d’encadrement peuvent paraître simples à l’initié, force est de constater qu’en pratique les collectivités ne les maîtrisent pas suffisamment et continuent à exiger des participations trop élevées conduisant de plus en plus de particuliers à porter ces affaires devant les juridictions administratives. La fréquence de la méconnaissance du Code de la Santé Publique par les Communes ne peut que nous conduire à les encourager dans cette démarche.
Cet article n'engage que son auteur.
Crédit photo : © Graphies.thèque - Fotolia.com
Auteurs
Adrien COLAS
Vincent LAHALLE
Avocat Associé
LEXCAP RENNES
RENNES (35)
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